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30/04/2024 | FRANCE | N°22/01132

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 5ème chambre civile, 30 avril 2024, 22/01132


N° RG 22/01132 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WGCW
CINQUIÈME CHAMBRE
CIVILE

SUR LE FOND



53D

N° RG 22/01132 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WGCW

Minute n° 2024/00



AFFAIRE :


[L] [W]

C/


[J] [O]







Grosses délivrées
le

à
Avocats : Me Pauline BERGEON
Me Jennifer PRIGENT



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT DU 30 AVRIL 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré

Jean-No

ël SCHMIDT, Vice-Président,
Statuant à Juge Unique

Isabelle SANCHEZ, Greffier lors des débats et Pascale BUSATO, Greffier lors du prononcé


DÉBATS

A l’audience publique du 06 Février 2024

JUGEMENT

Contradictoir...

N° RG 22/01132 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WGCW
CINQUIÈME CHAMBRE
CIVILE

SUR LE FOND

53D

N° RG 22/01132 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WGCW

Minute n° 2024/00

AFFAIRE :

[L] [W]

C/

[J] [O]

Grosses délivrées
le

à
Avocats : Me Pauline BERGEON
Me Jennifer PRIGENT

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 30 AVRIL 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré

Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président,
Statuant à Juge Unique

Isabelle SANCHEZ, Greffier lors des débats et Pascale BUSATO, Greffier lors du prononcé

DÉBATS

A l’audience publique du 06 Février 2024

JUGEMENT

Contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile

DEMANDERESSE

Madame [L] [W]
née le 30 Décembre 1975 à PUTEAUX
de nationalité Française
6 route des Binaudes
33390 BLAYE

représentée par Me Jennifer PRIGENT, avocat au barreau de BORDEAUX

DÉFENDEUR

Monsieur [J] [O]
né le 17 Décembre 1970 à CONFLANS SAINTE HONORINE
de nationalité Française
36 Boulevard du 11 Novembre
33540 SAUVETERRE-DE-GUYENNE

représenté par Me Pauline BERGEON, avocat au barreau de BORDEAUX
N° RG 22/01132 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WGCW

EXPOSE DU LITIGE

Faits constants :

Le couple alors formé de Mme [L] [W] et M [J] [O] a acquis en indivision un appartement à usage locatif en état futur d'achèvement, à CAVIGNAC (33620), au prix de 124.500 €, par acte du 19 octobre 2005, ce à concurrence de 50% chacun.

L'acquisition a été intégralement financée par un prêt souscrit par eux deux en qualité de co-emprunteurs solidaires auprès de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL D'AQUITAINE (ci-après “la banque) d'une durée de 180 mois dont 179 mois en différé de capital, moyennant : 179 mensualités chacune de 472,06 € correspondant aux intérêts d'emprunt et primes d’assurance, ainsi qu’une dernière mensualité fixée au 5 octobre 2020 pour un montant de 124.868,31 €.

Ce prêt était, en outre, garanti par le nantissement d'un contrat d'assurance-vie d’une somme de 55.295,08 €, souscrit par Mme [W], avec délégation de créance au profit de la banque.

Mme [W] et M. [O] se sont séparés en 2007.

Un compromis de vente de l’appartement pour un prix de 60.000 € a été régularisé suivant acte sous seing privé en date du 2 juillet 2019 avec une vente initialement fixée au 2 octobre 2019.
M [O] a déposé une demande de traitement de sa situation de surendettement le 30 août 2019.

Par décision du 11 octobre 2019, la Commission de surendettement des particuliers de la Gironde a déclaré sa demande recevable.

Le CREDIT AGRICOLE D'AQUITAINE a contesté cette décision devant le Tribunal Judiciaire de Bordeaux, lequel a infirmé la décision de la commission suivant jugement du 17 décembre 2020.

Entre temps, le prêt n’a pas été remboursé à l’échéance convenue du 5 octobre 2020, il restait dû la dernière mensualité de 124.868,31 €, outre les intérêts de retard qui ont alors courus.

Après plusieurs prorogations, la vente de l’appartement est finalement intervenue au mois de mars 2021, ce qui a permis, le 1/04/2021, de régler l'emprunt à hauteur de 57.883,03 €, laissant ainsi une créance due à la banque de 67.231,41€.

M. [O] n’a pas participé à l’apurement de cette dette.

Mme [W], de son côté, a soldé l'emprunt avec ses deniers personnels au titre de son obligation à la dette étant co-emprunteur solidaire du prêt consenti par la banque.

Pour ce faire elle a débloqué son contrat d'assurance-vie et a désintéressé la banque à hauteur de 52.034,05 € ; supportant à cette occasion la fiscalité consécutive au déblocage du contrat d'assurance vie, pour une somme de 3.261,03 €.

Le 2/04/2021, Mme [W] a également effectué un règlement d'un montant de 15.063,33 € au profit de la banque.

Par courrier LR/AR de son conseil en date du 2/06/2021, Mme [W] a demandé à M. [O] de lui payer sa part définitive dans la dette due à la banque après revente de l’appartement, outre la moitié des frais de fiscalité occasionné lors du rachat du compte d’assurance vie, soit la somme totale de 35.246,23 €.

Par courrier du 14/06/2021, M. [O] a contesté et demandé que la somme de 15.000 € soit communiquée à la Banque de France au titre d’une “dette convenue”.

Procédure :

Par assignation délivrée le 11/02/2022, Mme [L] [W] a assigné M. [J] [O] à comparaître devant le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX aux fins de paiement de sa part contributive à la dette du prêt bancaire pour un montant de 35.246,23 €.

M. [O] a constitué avocat et fait déposer des conclusions N°2 en date du 23/02/2023.

En cours de procédure, par l’intermédiaire de son conseil, M. [O] a fait déposer deux chèques CARPA pour un montant total de 12.975,05 € qu’il a, par le même courrier de son conseil du 12/10/2023, reconnu devoir à Mme [W].

L'ordonnance de clôture est en date du 24/01/2024.

Nonobstant cette cloture, M. [O] a fait signifié par RPVA en date du 2/02/2024 des conclusions n°3 et sa pièce n°12.

Les débats s’étant déroulés à l’audience du 6/02/2024, l’affaire a été mise en délibéré au 30/04/2024.

PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR, Mme [W] :

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 31/12/2023 et reprises à l'audience, le demandeur sollicite du Tribunal de :
DECLARER recevables et bien fondées l'action et les demandes présentées par Madame [L] [W],
En conséquence,
DEBOUTER Monsieur [J] [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;
CONDAMNER Monsieur [J] [O] à payer à Madame [L] [W] la somme de 22.271,18 € ;
CONDAMNER Monsieur [J] [O] à payer à Madame [L] [W] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNER Monsieur [J] [O] aux entiers dépens de la présente instance.

Mme [W] fait valoir, au visa des articles 1310, 1313 et 1317 du Code civil, qu’elle serait en droit d’exercer son recours contre M. [O] pour la part contributive de ce dernier à la dette d’emprunt qu’elle a dû payer à la banque en raison de la solidarité de son engagement auprès de celle-ci.

Elle explique qu’ayant tous deux effectué un mauvais placement immobilier financé à l’aide d’un prêt “in fine” souscrit en co-emprunteurs solidaires auprès de la banque, le montant de la revente de l’appartement acquis par le prêt, n’aurait pas suffit à apurer cette dette et qu’elle aurait ainsi été contrainte de racheter son contrat d’assurance vie, lequel servait de garantie au prêt, supportant à cette occasion une fiscalité dont elle demande le partage de son coût, pour régler la créance de la banque ; outre un versement complémentaire effectué depuis son compte bancaire.

Elle conteste que le rachat de son compte d’assurance vie, financé selon elle par ses propres deniers, puisse venir en déduction de la dette du prêt ; le Tribunal judiciaire de Bordeaux n’aurait eu à se prononcer que sur la seule obligation à la dette de M [O] afin de déterminer s’il pouvait bénéficier de la mesure sollicitée, et non pas sur sa contribution définitive à la dette liée au prêt.

Elle produit les pièces justificatives des paiements intervenus et ramène sa demande principale à la somme de 22.271,18 € pour tenir compte des versements CARPA intervenus en cours de procédure pour 12.975,05 €.

Elle soutient une demande de dommages et intérêts qu’elle fixe à 5.000 € pour cause de résistance abusive du défendeur.

Elle s’oppose fermement à l’octroi de délais de paiement estimant que M. [O] aurait déjà disposé de 6 années pour payer sa part contributive et que ses deux règlements intervenus en cours de procédure démontreraient une capacité financière suffisante.

PRÉTENTIONS DU DÉFENDEUR, M [O] :

Dans ses dernières conclusions signifiées avant la clôture de l’instruction du dossier, soit le 23/02/2023, (ainsi que ses pièces 1 à 11), le défendeur demande au tribunal de :
LIMITER le montant des condamnations à l’encontre de Monsieur [J] [O] à la somme de 12.975,05 €, correspondant à sa part contributive, outre la moitié des intérêts de retard.
DEBOUTER Madame [L] [W] du surplus de ses demandes formulées contre Monsieur [J] [O].
OCTROYER à Monsieur [J] [O] des délais de paiement sur 24 mois.

M [O] prétend que le montant du rachat du contrat d’assurance vie qui venait en garantie du prêt consenti devrait être imputé sur la dette solidaire et non pas sur la seule part contributive de Mme [W], il s’appui sur le jugement du Tribunal judiciaire du 17/12/2020 qui aurait évalué sa dette au titre du prêt à 18.000 € uniquement ; alors que, selon la lettre du 14/01/2021 du conseil de Mme [W], seule la somme de 19.784,05 € lui aurait été demandée.

Il forme en outre une demande de délai de paiement sur 24 mois indiquant n’avoir pour seules ressources qu’un salaire de 2.500 €, avec une charge personnelle de loyer de 570 € et une pension alimentaire de 360 € versée à Mme [W] pour les deux enfants communs et qu’il ne serait ainsi pas en mesure de s’acquitter intégralement de la dette.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures notifiées aux parties aux dates sus mentionnées.
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MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le rejet des conclusions n°3 de M [O] signifiées en date du 2/02/2024

En droit, selon l'article 802, en vigueur depuis le 31 juillet 2023 :

"Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni
aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.
Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture.
Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l'instance en l'état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption.

Il résulte de ces dispositions que, postérieurement à la date de l'ordonnance de clôture, faute de se limiter à une demande incontestable de paiement de loyers et d'avoir par ailleurs précisément sollicité la révocation de la dite ordonnance par voie de conclusions, les parties sont irrecevables à produire des conclusions et des pièces nouvelles.

Or, M. [O] a fait signifié en date du 2/02/2024 de nouvelles conclusions et une nouvelle pièce (n°12) alors que l'ordonnance de clôture était fixée au 24/01/2024, sans même en demander la révocation, de sortes que ces écritures et cette pièce ne pourront qu'être rejetées par le Tribunal, ne respectant pas de surcroît le principe du contradictoire, principe cardinal de notre droit.

Aussi, seules ses dernières conclusions n° 2 signifiées le 23/02/2023 et ses pièces 1 à 11 seront prises en compte par le Tribunal pour statuer sur le litige.

Sur la demande de condamnation de M [O] au titre de la contribution à la dette solidaire du prêt bancaire

Le litige porte en synthèse sur la détermination de la part contributive définitive de chacun des co-emprunteurs solidaires à la dette issue de l’emprunt contracté auprès de la banque pour financer l’acquisition d’un appartement revendu par la suite à perte pour solder partiellement la dette.

- à titre liminaire, sur la portée du jugement du Tribunal judiciaire du 17/12/2020

En droit selon l'article 1355 code civil :

"L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité." (Principe de triple identité)

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A l’évidence cette décision de justice (pièce 10, demandeur) n’a pas porté sur le même chose demandée (là: M. [O] était’il dans l’impossibilité de faire face à l’ensemble de ses dettes et pour ce faire analyser l’obligation à la dette restant due après paiements déjà intervenus ? ; ici: quelle est la part contributive finale de chacun des co-emprunteurs ? ), ni entre les mêmes parties (là: la banque et M [O] ; ici: Mme [W] et M. [O]) ; alors qu’au surplus l’autorité de chose jugée ne s’attache qu’au dispositif, lequel s’est contenté de dire irrecevable la demande de traitement de surendettement formée par M. [O], de sorte qu’il est faux de dire que ce jugement emporte fixation de la part contributive de M. [O] à la dette d’emprunt à la somme de 18.000 €.

- sur la fixation de la part contributive définitive de M [O] au titre du prêt bancaire
Réponses du Tribunal :

En droit, selon l'article 1317 du Code civil :

“Entre eux, les codébiteurs solidaires ne contribuent à la dette que chacun pour sa part.
Celui qui a payé au-delà de sa part dispose d'un recours contre les autres à proportion de leur propre part. "

En l’espèce :

- S’agissant de l’imputation du montant du rachat du contrat d’assurance vie affecté au remboursement partiel du prêt in fine, il convient de relever qu’il n’est pas contesté que ce contrat était un bien personnel de Mme [W], qu’aucune disposition conventionnelle n’est sérieusement invoquée, et encore moins justifiée, qui aurait convenu entre les parties que le prix de rachat de ce contrat serait affecté au remboursement du prêt pour le compte des deux co-emprunteurs (ni d’ailleurs sous quelle contre partie), le seul fait que ce contrat ait été nanti par la banque à titre de garanti ne saurait y palier, une garantie n’étant pas un moyen contractuel de paiement, mais une sûreté accordée au créancier par l’un des débiteurs.

Il convient donc de dire que le montant de ces fonds utilisés pour apurer partiellement la dette solidaire de prêt vient en déduction de la seule part contributive du détenteur du contrat d’assurance vie, à savoir Mme [W], et non pas en déduction de la dette solidaire.

- S'agissant de la lettre du conseil de Mme [W] du 14/01/2021, il convient de relever que les erreurs et maladresses de celle-ci qui laissaient entendre au final que la dette de M [O] serait de 19.784,05€ (ce, avant les versements effectués par M [O] en cours de procédure) ne constituent ni aveux, ni démonstration d'un renoncement partiel et elles ne font pas plus obstacles à la prise en compte des termes précis, démonstratifs et circonstanciés du second courrier du même conseil adressé par LR/AR du 2/06/2021, et accompagné de toutes les pièces justificatives, lequel courrier conclut lui à une dette contributive de 35.246,23 €.

- S’agissant de l’imputation effectuée par Mme [W] de son paiement du 2/04/2021 pour une somme de 15.063,33€ au profit de la banque pour finir d’apurer la dette du prêt, il y a également lieu à l’affecter à sa seule part contributive.

- En revanche, s’agissant de sa volonté d’exiger que son co-emprunteur solidaire contribue, pour moitié, au coût fiscal (3.210,04€) lié au rachat du contrat d’assurance vie, cette demande ne repose sur aucune base légale. En effet, la fiscalité de rachat est liée au type de placement choisi par Mme [W] et ne repose que sur les profits personnels qu’elle a réalisé à l’occasion de ce placement (et non pas communs aux deux parties) ; alors que de plus, sa décision de rachat reste un choix personnel, à ce titre elle ne justifie pas que la banque l’ait contrainte à y procéder, alors que d’autre voies de financement était, le cas échéant envisageables.

Aussi, cette quote part du coût de la fiscalité pour 1.630,52€ ne sera pas ajoutée à la part contributive de M. [O].

- Au final, du montant du prêt restant dû à la banque après dépassement de la date d’échéance, soit la somme de 125.114,44 € diminuée du montant du prix de revente de l’appartement, frais déduits, pour 57.883,03€, la part contributive finale de M. [O] dans le remboursement de la dette de prêt bancaire doit être fixée à 67.231,41€ divisé par deux, soit 33.615,71€, somme qu’il sera condamné à rembourser à Mme [W], déduction faite des deux versements intervenus en cours de procédure pour un montant total de 12.975,05€, soit une condamnation à 20.640,66 €.

Sur la “demande de condamnation” à des dommages et intérêts pour résistance abusive du défendeur

Dans les motifs de ses conclusions n° 2, Mme [W] évoque une demande de condamnation de M. [O] au titre d’une supposée résistance abusive de ce dernier, pour un préjudice qu’elle fixe à 5.000 €.

Observations du Tribunal :

Le Tribunal n'est saisi que par le dispositif des conclusions, en effet, l'article 768 du CPC dispose notamment que :

"Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion".

Or, aucune demande de condamnation à ce titre et pour ce montant ne figure au dispositif des conclusions n° 2 de la demanderesse, il n'y a donc pas lieu de statuer sur ce point, en application de l'article sus-visé.

Sur la demande de délais de paiement

A titre principal, M. [O] invoque ses difficultés financières et forme une demande de délai de 24 mois pour payer les sommes restants dues au titre de sa part contributive à la dette du prêt ; alors que Mme [W] s’y oppose.

Le Tribunal retient qu'en droit, selon l'article 1244-1 du Code civil, devenu 1343-5, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues par le débiteur et statuer sur le sort des intérêts encourus de ce fait. Il découle de ce texte que le juge peut dans l'exercice de ses compétences, en tout état de cause et de procédure, accorder un délai de grâce, lequel à pour objet de permettre au débiteur de bonne foi de pouvoir s'acquitter de sa dette dans le délai légal (2 ans).

Il ressort également de cette disposition légale que le juge doit apprécier celle-ci en tenant compte tant de la situation du débiteur, que de son comportement.

En l'espèce, force est de constater que le défendeur a - dans les faits - d'ores et déjà bénéficié de longs délais de paiement, puisque la mise en demeure d'avoir à payer sa part contributive date de juin 2021, outre le fait qu’il savait depuis 2005 qu’il aurait à contribuer pour moitié au remboursement du capital à l’issue du prêt, celui-ci étant “in fine” ; ainsi ce sont en tout 18 années qu’il aurait dû mettre à profit pour faire face à sa dette.

De même, il ne présente aucun plan d’apurement de la dette ou de la condamnation à intervenir, il n’indique pas avec quels moyens financiers il réglerait celle-ci dans le délai demandé.

Au surplus, il n’appartient pas à son co-emprunteur de devenir en quelque sorte son banquier, alors que d’une part, la persistance de leurs relations est rendue nécessaire par la présence de deux enfants communs et alors que d’autre part, il ne démontre pas avoir mis tout en oeuvre pour obtenir en temps utiles un éventuel concours bancaire.

Par ces motifs, sa demande sera rejetée.

Sur les autres demandes :

- sur les dépens,
Les dépens seront supportés par la partie qui succombe, en application de l'article 696 du code de procédure civile, ici M. [O].

- sur la demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la partie non condamnée aux dépens, tout ou partie des frais non compris dans les dépens qu’elle a engagé pour faire valoir ses droits et assurer correctement sa défense. Cependant, faute de produire la justification des dits frais irrépétibles, Une somme de 1.500 € sera fixée.

- sur l’exécution provisoire,
L’exécution provisoire de la décision à venir est de droit et il n’y a pas lieu à l’écarter.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX,

- REJETTE les conclusions n°3 de M. [O] signifiées le 2/02/2024, soit postérieurement à l’Ordonnance de clôture intervenue le 24/01/2024 ;

- FIXE la part contributive finale de M. [O] au titre du remboursement du prêt consenti par la CRCAMA du 12/07/2005 à la somme de 33.615,71 € ;

- CONDAMNE M. [Z] [O] à payer à Mme [L] [W] la somme de 20.640,66€, somme qui tient compte des versements CARPA intervenus en cours de procédure pour un montant total de 12.975,05 € ;

- REJETTE la demande de délais formée par M. [O] ;

- CONDAMNE M. [J] [O] aux entiers dépens ;

- CONDAMNE M. [J] [O] à payer à Mme [L] [W] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- RAPPELLE que le présent jugement est assorti de plein droit de l’exécution provisoire,

- REJETTE les demandes plus amples ou contraires des parties.

La présente décision est signée par Monsieur Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président, et Madame Pascale BUSATO, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 5ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01132
Date de la décision : 30/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-30;22.01132 ?
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