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26/03/2024 | FRANCE | N°23/08085

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Jex droit commun, 26 mars 2024, 23/08085


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 26 Mars 2024


DOSSIER N° RG 23/08085 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YJHI
Minute n° 24/ 92


DEMANDEUR

S.A.R.L. JET FLY EVASION, immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 839 291 358, agissant poursuites et diligences de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Jérémy GRANET de la SCP DAGG, avocats au barreau de BORDEAUX


DEFENDEUR

Monsieur [K] [X], exerçant sous l’enseigne GARAGE [X], immat

riculée au RCS de Bordeaux sous le n° [Numéro identifiant 5]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 7]
[Adresse 6]
[Localité 4]...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 26 Mars 2024

DOSSIER N° RG 23/08085 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YJHI
Minute n° 24/ 92

DEMANDEUR

S.A.R.L. JET FLY EVASION, immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 839 291 358, agissant poursuites et diligences de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Jérémy GRANET de la SCP DAGG, avocats au barreau de BORDEAUX

DEFENDEUR

Monsieur [K] [X], exerçant sous l’enseigne GARAGE [X], immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° [Numéro identifiant 5]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 7]
[Adresse 6]
[Localité 4]

représenté par Maître Patrick TRASSARD de la SELARL TRASSARD & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier

A l’audience publique tenue le 13 Février 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 26 Mars 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
Le 26 mars 2024
Formules exécutoires aux avocats + dossiers
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties

EXPOSE DU LITIGE

Se prévalant d’une ordonnance du président du tribunal de commerce de Bordeaux rendue le 8 juin 2023, Monsieur [K] [X] a fait diligenter sur les comptes bancaires de l’EURL JET FLY EVASION une saisie conservatoire par acte du 25 août 2023. Cet acte a été dénoncé à l’EURL JET FLY EVASION par acte du 1er septembre 2023.

Par acte de commissaire de justice signifié le 28 septembre 2023, l’EURL JET FLY EVASION a fait assigner Monsieur [X] afin de voir ordonnée la mainlevée de la mesure conservatoire.

A l’audience du 13 février 2024 et dans ses dernières conclusions, l’EURL JET FLY EVASION sollicite que la mainlevée de la saisie conservatoire soit ordonnée, que Monsieur [X] soit débouté de ses demandes et qu’il soit condamné aux dépens outre le paiement d’une somme de 5.000 euros de dommages et intérêts et 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions et au visa de l’article L511-1 du Code des procédures civile d’exécution, la demanderesse s’oppose à tout sursis à statuer, soulignant que la décision à venir de la cour d’appel de Bordeaux quant à l’ordonnance du juge de la mise en état refusant l’allocation d’une provision est sans lien avec le présent litige. Par ailleurs, elle fait valoir qu’aucune des conditions cumulatives nécessaires à l’octroi d’une saisie conservatoire n’est réunie en l’espèce. Elle conteste toute apparence de créance soulignant régler les loyers dus, l’absence d’encaissement des chèques établis à ce titre par le bailleur ne pouvant lui être imputé. Elle souligne qu’au-delà d’un chiffrage erratique ayant varié au cours des différentes instances judiciaires, la créance a été de façon constante considérée comme se heurtant à une contestation sérieuse. Elle conteste tout risque dans le recouvrement de la créance, soulignant que les motifs allégués à ce titre par la défenderesse n’ont aucun lien avec sa potentielle solvabilité, la saisie conservatoire ayant au demeurant été largement fructueuse. Elle fait enfin valoir que la saisie pratiquée pour la somme de 75.490,59 euros l’a été par malice et lui cause un préjudice économique.

A l’audience du 13 février 2024 et dans ses dernières écritures, Monsieur [X] sollicite in limine litis un sursis à statuer dans l’attente de la décision de la Cour d’appel de Bordeaux sur l’ordonnance du juge de la mise en état du 23 janvier 2024. Au fond, il conclut au rejet de toutes les demandes et à la condamnation de la demanderesse aux dépens et au paiement d’une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le défendeur fait valoir que si la décision d’appel devait lui allouer une provision, la mainlevée de la saisie conservatoire menacerait directement le recouvrement de sa créance. Il soutient bénéficier d‘un principe de créance consistant en des loyers, des sommes dues au titre de la TVA et au regard des charges d’eau et d’électricité correspondant à l’occupation du local. Il souligne que le président du tribunal de commerce a déjà apprécié le risque de recouvrement de sa créance et soutient que le comportement de la demanderesse qui se maintient dans les lieux nonobstant l’expiration du contrat de bail et en construisant des annexes hors de toute autorisation municipale constitue une menace pour le recouvrement de sa créance.
L’affaire a été mise en délibéré au 26 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales

- Sur le sursis à statuer

L’article 378 du Code de procédure civile dispose : « La décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine. »

En l’espèce, l’ordonnance du juge de la mise en état du 23 janvier 2024 rejette la demande de provision de Monsieur [X] au motif d’un manque de justificatifs mais également en relevant le caractère sérieusement contestable des sommes réclamées, leur sort étant lié à la décision à intervenir au fond sur la qualification du bail.

L’office du juge d’appel ne différant pas de celui du juge de la mise en état quant à la recevabilité des prétentions, le caractère très incertain de la procédure d’appel ne justifie pas qu’il soit sursis à statuer dans l’attente de cette décision. Cette demande sera donc rejetée.

- Sur la saisie conservatoire

L’article L511-1 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit : « Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement.
La mesure conservatoire prend la forme d'une saisie conservatoire ou d'une sûreté judiciaire. »

Deux conditions cumulatives sont donc imposées par ce texte pour la prise d’une mesure conservatoire : l’existence d’une apparence de créance et une menace sur son recouvrement.

Il est constant qu’une apparence de créance est suffisante et que celle-ci doit seulement être vraisemblable et son montant peut être fixé de façon provisoire. La menace pour le recouvrement de la créance peut quant à elle être fondée sur la situation objective du débiteur ou résulter d’une appréciation des conséquences subjectives de son attitude.
La charge de la preuve de la réunion de ces conditions repose sur la partie se prévalant de la qualité de créancier. Le juge de l’exécution apprécie à l’aune du débat contradictoire succédant à la phase de requête unilatérale liée à l’autorisation de pratiquer la saisie conservatoire si les conditions cumulatives d’application du texte sont réunies.

En l’espèce, Monsieur [X] fait valoir que l’EURL JET FLY EVASION a manqué à ses obligations de locataire en ne réglant pas les charges locatives ainsi que la TVA sur le loyer et en faisant construire des annexes sans autorisation. Outre que ce comportement n’a aucun lien avec la solvabilité de la société demanderesse, l’EURL JET FLY EVASION justifie de l’établissement de chèques d’un montant de 1.200 euros correspondant au loyer TTC du 5 novembre 2021 au 5 mai 2023. L’absence d’encaissement de ces chèques par le bailleur n’est pas imputable au locataire mais il est en tout état de cause établi que l’absence de paiement de la TVA, qualifiée de manquement contractuel n’est pas établie. La demanderesse justifie par ailleurs d’un courrier de la mairie de [Localité 4] en date du 10 mai 2022 précisant tolérer l’installation temporaire d’un chalet à proximité des lieux loués, ce qui empêche de caractériser un autre manquement contractuel à cet égard.

Le maintien dans les lieux désormais contesté par Monsieur [X] a pourtant fait l’objet d’encaissement de loyers et de délivrance de quittances postérieurs à l’expiration du contrat de bail témoignant d’une acceptation au moins pour une certaine période du maintien du locataire.

Plus fondamentalement, Monsieur [X] n’apporte aucun élément probatoire de nature à établir une résistance volontaire au paiement et une insolvabilité de la demanderesse dont le compte bancaire a permis une saisie de plus de 75.000 euros. Ainsi, aucun bilan, aucun élément de nature à établir l’existence d’un risque d’insolvabilité n’est produit aux débats.

Monsieur [X] n’établit donc pas les circonstances susceptibles de mettre en péril le recouvrement de sa créance, condition essentielle à la mise en œuvre d’une saisie conservatoire. Il y a donc lieu d’ordonner la mainlevée de la mesure conservatoire.

- Sur l’abus de saisie

L’article L121-2 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit :
« Le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie. »
Le caractère abusif peut résulter du caractère disproportionné de la saisie pratiquée notamment au regard du montant de la créance ou de l’existence d’autre sûreté au profit du créancier.

En l’espèce, Monsieur [X] se prévaut d’une créance et a obtenu l’accord du juge pour procéder à la saisie conservatoire. Par ailleurs, l’EURL JET FLY EVASION ne justifie pas du préjudice dont elle se prévaut.

Elle sera donc déboutée de sa demande.

Sur les autres demandes

Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.
Monsieur [X], partie perdante, subira les dépens et sera condamné au paiement d’une somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.

PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort,
REJETTE la demande de sursis à statuer ;
ORDONNE la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée par Monsieur [K] [X] sur les comptes bancaires de l’EURL JET FLY EVASION par acte du 25 août 2023 ;
DEBOUTE l’EURL JET FLY EVASION de sa demande de dommages et intérêts ;
CONDAMNE Monsieur [K] [X] à payer à l’EURL JET FLY EVASION la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [K] [X] aux dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.

LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Jex droit commun
Numéro d'arrêt : 23/08085
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;23.08085 ?
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