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26/03/2024 | FRANCE | N°23/07101

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Jex droit commun, 26 mars 2024, 23/07101


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 26 Mars 2024


DOSSIER N° RG 23/07101 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YDU5
Minute n° 24/ 89


DEMANDEUR

Monsieur [J] [K]
né le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 12] (PAKISTAN)
demeurant [Adresse 2]
[Adresse 2]

représenté par Maître Ludovic BOUSQUET, avocat au barreau de BORDEAUX


DEFENDEUR

S.A.R.L. LC ASSET 2, inscrite au RCS du Luxembourg sous le n° B 241621, dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son représentant léga

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représentée en France par la SAS LINK FINANCIAL, inscrite au RCS de Nantes sous le n° 842 762 528, dont le siège social est [Ad...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 26 Mars 2024

DOSSIER N° RG 23/07101 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YDU5
Minute n° 24/ 89

DEMANDEUR

Monsieur [J] [K]
né le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 12] (PAKISTAN)
demeurant [Adresse 2]
[Adresse 2]

représenté par Maître Ludovic BOUSQUET, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEUR

S.A.R.L. LC ASSET 2, inscrite au RCS du Luxembourg sous le n° B 241621, dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal
représentée en France par la SAS LINK FINANCIAL, inscrite au RCS de Nantes sous le n° 842 762 528, dont le siège social est [Adresse 1],
venant aux droits de la société HOIST FINANCE AB, elle-même venant aux droits de la société SOGEFINANCEMENT
Elisant domicile en l’étude de la SCP CAMBRON
[Adresse 8]

représentée par Maître Paola JOLY de la SCP BAYLE - JOLY, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant, Maître Alexandre ROTCAJG, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier

A l’audience publique tenue le 13 Février 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 26 Mars 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

Le 26 mars 2024
Formules exécutoires aux avocats + dossiers
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties

EXPOSE DU LITIGE

Se prévalant d’un jugement du tribunal d’instance de Bordeaux en date du 29 avril 2014, la SARL LC ASSET 2 a fait diligenter une saisie-attribution sur les comptes bancaires de Monsieur [J] [K] par acte en date du 3 juillet 2023, dénoncée par acte du 5 juillet 2023 pour une somme de 33.966,64 euros.

Par acte de commissaire de justice en date du 3 août 2023, Monsieur [K] a fait assigner la SARL LC ASSET 2 devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin de voir annulée cette saisie.

A l’audience du 13 février 2024 et dans ses dernières conclusions, Monsieur [K] sollicite que le jugement du tribunal d’instance de Bordeaux en date du 29 avril 2014 soit déclaré nul et non avenu et que soit en conséquence annulée la saisie-attribution pratiquée le 3 juillet 2023. Il demande également la condamnation de la SARL LC ASSET 2 aux dépens et au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions et au visa de l’article L111-3 du Code des procédures civiles d’exécution, Monsieur [K] conteste être débiteur d’une quelconque somme à l’égard de la société ayant pratiqué la saisie ou son auteure, la société SOGEFINANCEMENT, alors qu’il indique n’être arrivé sur le territoire français qu’en 2012 .Il soutient n’avoir jamais demeuré à l’adresse où le jugement lui a été signifié et souligne que le commissaire de justice a réussi à retrouver sans difficulté son adresse pour réaliser les actes d’exécution forcée au profit de la défenderesse.

A l’audience du 13 février 2024 et dans ses dernières écritures, la SARL LC ASSET 2 conclut au rejet de toutes les demandes, à la validation de la saisie-attribution et à la condamnation du demandeur aux dépens et au paiement d’une somme de 900 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

La défenderesse soutient avoir qualité à agir au regard de la cession de créance intervenue à son profit. Elle fait valoir que le commissaire de justice a réalisé toutes les diligences requises par l’article 659 du Code de procédure civile lors de la signification du jugement, Monsieur [K] vivant bien à [Localité 10] à cette époque avant de modifier plusieurs fois d’affilée son lieu de résidence. Elle souligne que le demandeur n’a pas interjeté appel de la décision fondant la saisie litigieuse.

L’affaire a été mise en délibéré au 26 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales

- Sur la recevabilité

Les articles L211-4 et R211-11 du Code des procédures civiles d’exécution relatifs à la saisie-attribution disposent : « Toute contestation relative à la saisie est formée dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat.
En l'absence de contestation, le créancier requiert le paiement de la créance qui lui a été attribuée par l'acte de saisie.
Toutefois, le débiteur saisi qui n'aurait pas élevé de contestation dans le délai prescrit peut agir à ses frais en répétition de l'indu devant le juge du fond compétent. »
« A peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L'auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. Il remet une copie de l'assignation, à peine de caducité de celle-ci, au greffe du juge de l'exécution au plus tard le jour de l'audience. »

L’article R232-7 du Code des procédures civiles d’exécution relatif à la saisie de droits d’associés prévoit quant à lui : « A peine d'irrecevabilité, la contestation est dénoncée le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L'auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. »

Monsieur [K] conteste la saisie-attribution pratiquée par une assignation délivrée le 3 août 2023 alors que le procès-verbal de saisie date du 3 juillet 2023 avec une dénonciation effectuée le 5 juillet 2023. La contestation de la saisie-attribution était donc recevable jusqu’au 5 août 2023. Elle est intervenue dans les délais.

Monsieur [K] justifie par ailleurs du courrier recommandé réceptionné le 7 août 2023, donc envoyé en temps utile, faisant état de la contestation portée adressé à l’huissier ayant réalisé la saisie-attribution.

Il doit donc être déclarée recevable en sa contestation de la saisie-attribution.

- Sur la nullité de la signification du jugement du 29 avril 2014

L’article 659 du code de procédure civile dispose que :
« Lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.
Le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l'huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification.
Le jour même, l'huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l'accomplissement de cette formalité.
Les dispositions du présent article sont applicables à la signification d'un acte concernant une personne morale qui n'a plus d'établissement connu au lieu indiqué comme siège social par le registre du commerce et des sociétés. »
S’agissant du régime de nullité des actes d’huissier, l’article 649 du code de procédure civile dispose :
“La nullité des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure.”

L’article 114 du code de procédure civile dispose :
“Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.”

L’article 478 du code de procédure civile dispose que le jugement rendu par défaut ou le jugement réputé contradictoire au seul motif qu’il est susceptible d’appel est non avenu s’il n’a pas été notifié dans les six mois de sa date.

Le jugement du tribunal d’instance en date du 29 avril 2014 a été rendu en premier ressort et était réputé contradictoire, l’adresse visée pour le défendeur non comparant étant le 98 cours alsace Lorraine à Bordeaux. C’est à cette même adresse que l’huissier a tenté en vain de retrouver Monsieur [K] ainsi qu’en témoigne l’acte du 6 juin 2014 transformé en procès-verbal de recherches infructueuses.

Cet acte précise que l’huissier s’est rendu à cette adresse à laquelle personne ne répondait à l’identification du demandeur. Au titre des diligences accomplies, il mentionne :
« -le gardien de la résidence correspondant à cette adresse m’a indiqué que le requis ne faisait pas partie des résidents et qu’il ne le connaissait pas,
-après recherches, j’ai trouvé une nouvelle adresse sur la commune de [Localité 10] au [Adresse 5]
-ce même jour, je me suis transporté au [Adresse 6], où étant, je constate que le nom du requis n’apparait pas sur la boite aux lettres, les personnes que j’ai rencontré dans le voisinage m’ont indiqué ne pas connaître le requis.
-malgré recherches, il ne m’a pas été possible de déterminer son éventuel lieu de travail.
-L’administration des Postes sous couvert du secret a refusé de me communiquer une quelconque adresse,
-les services municipaux de la ville n’ont pu me renseigner davantage
-de retour en mon étude, j’ai consulté le site internet des pages blanches et des pages jaunes sur le département de la Gironde en vain
-j’ai contacté mon correspondant qui n’a pu me fournir de nouveaux éléments notamment le lieu de travail du requis ».

Monsieur [K] justifie qu’à cette époque il demeurait bien à [Localité 10] après un séjour à [Localité 9], via un bail prenant effet au1er juin 2014 pour un logement sis [Adresse 7].

Les diligences de l’huissier, si elles sont détaillées, manquent de précision dans la mesure où il n’explique pas comment l’adresse [Adresse 11] a pu être mentionné comme étant celle de Monsieur [K]. Par ailleurs, la cession de créance a été signifiée au demandeur à son ancienne adresse à [Localité 9] par courrier du 29 juin 2023 alors que la cession de créance et un commandement de payer aux fins de saisie-vente lui ont été signifiés à son adresse actuelle le 30 juin 2022.

Enfin, la défenderesse justifie du contrat de cession de créance et d’une attestation de celle-ci mentionnant le nom du demandeur et un numéro de prêt mais en aucun cas du contrat fondant le titre exécutoire dont l’exécution est réclamée et partant l’adresse déclarée sur celui-ci. Elle ne fournit pas davantage l’assignation délivrée en vue de l’audience du 25 février 2014 devant le tribunal d’instance de Bordeaux, ni les correspondances et mises en demeure évoquées par la décision du tribunal d’instance.

Dans ce contexte, au regard des diligences incomplètes relatées par l’huissier et en l’absence de pièces justifiant de la méconnaissance de l’adresse du débiteur par la société prêteuse ayant cédé sa créance, il y a lieu de considérer que la signification intervenue le 6 juin 2014 transformée en procès-verbal de recherches infructueuses est nulle.

En application des dispositions susvisées, le jugement du tribunal d’instance du 29 avril 2014 non valablement signifié doit être déclaré non avenu.

Le procès-verbal de la saisie-attribution pratiquée le 3 juillet 2023 sera donc annulé et mainlevée de cette mesure sera ordonnée.

Sur les autres demandes
Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

La SARL LC ASSET 2, partie perdante, subira les dépens et sera condamnée au paiement d’une somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de proc&dure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort,
DECLARE la contestation de la saisie -attribution intervenue par acte du 3 juillet 2023 sur les comptes bancaires de Monsieur [J] [K] à la diligence de la SARL LC ASSET 2 recevable ;
ANNULE l’acte de signification du jugement du tribunal d’instance de Bordeaux en date du 29 avril 2014 opposant la SAS SOGEFINANCEMENT à Monsieur [J] [K] en date du 6 juin 2014 ;
DECLARE le jugement du tribunal d’instance de Bordeaux en date du 29 avril 2014 opposant la SAS SOGEFINANCEMENT à Monsieur [J] [K] non avenu ;
ANNULE le procès-verbal de saisie-attribution intervenue par acte du 3 juillet 2023 sur les comptes bancaires de Monsieur [J] [K] à la diligence de la SARL LC ASSET 2 ;
ORDONNE la mainlevée de la saisie-attribution intervenue par acte du 3 juillet 2023 sur les comptes bancaires de Monsieur [J] [K] à la diligence de la SARL LC ASSET 2 ;
CONDAMNE la SARL LC ASSET 2 à payer à Monsieur [J] [K] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DEBOUTE la SARL LC ASSET 2 de sa demande fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SARL LC ASSET 2 aux dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.

LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Jex droit commun
Numéro d'arrêt : 23/07101
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;23.07101 ?
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