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21/03/2024 | FRANCE | N°22/08420

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 5ème chambre civile, 21 mars 2024, 22/08420


N° RG 22/08420 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XFSS
5ème CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND





30F

N° RG 22/08420 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XFSS

Minute n° 2024/00



AFFAIRE :


S.A.S. GCMT

C/

S.A.R.L. ERICK AUGIER











Grosses délivrées
le

à
Avocats : la SELARL CABINET CAPORALE - MAILLOT - BLATT ASSOCIES
la SCP D’AVOCATS INTER-BARREAUX MAUBARET



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
5ème CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 21 MARS 2024

COMPOSI

TION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :

Marie WALAZYC, Vice-Présidente
Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président
Angélique QUESNEL, Juge

Isabelle SANCHEZ, Greffier lors des débats et Pascale BUSATO, Gref...

N° RG 22/08420 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XFSS
5ème CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

30F

N° RG 22/08420 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XFSS

Minute n° 2024/00

AFFAIRE :

S.A.S. GCMT

C/

S.A.R.L. ERICK AUGIER

Grosses délivrées
le

à
Avocats : la SELARL CABINET CAPORALE - MAILLOT - BLATT ASSOCIES
la SCP D’AVOCATS INTER-BARREAUX MAUBARET

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
5ème CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 21 MARS 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :

Marie WALAZYC, Vice-Présidente
Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président
Angélique QUESNEL, Juge

Isabelle SANCHEZ, Greffier lors des débats et Pascale BUSATO, Greffier lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 25 Janvier 2024
Délibéré au 21 mars 2024
Sur rapport de conformément aux dispositions de l’article 785 du code de procédure civile

JUGEMENT:

Contradictoire
Premier ressort
Prononcé publiquement par mise à disposition du jugement au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile

DEMANDERESSE :

S.A.S. GCMT
immatriculée au RCS de BORDEAUX sous le n° 837 725 480
agissant par son représentant légal domicilié en cette qualité
au siège social Boulevard du Président Wilson – 33200 BORDEAUX
331 Boulevard du Président Wilson
33200 BORDEAUX

représentée par Maître Clémence LEROY-MAUBARET de la SCP D’AVOCATS INTER-BARREAUX MAUBARET, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant

DÉFENDERESSE :

S.A.R.L. ERICK AUGIER immatriculée au RCS de BORDEAUX sous le n° 438 270 456 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité
au siège social : 13 rue Huguerie 33000 BORDEAUX

N° RG 22/08420 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XFSS

13 rue Huguerie
33000 BORDEAUX

représentée par Maître Olivier MAILLOT de la SELARL CABINET CAPORALE - MAILLOT - BLATT ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant

******

EXPOSE DU LITIGE

Faits constants :

Par acte authentique du 29 octobre 1986, Mme [R], aux droits de laquelle est venue la société GCMT, a donné en location à usage commercial aux consorts [E], aux droits desquels est venue la SARL ERICK AUGIER, un immeuble sis à BORDEAUX (33000) 13 rue Huguerie, bail à usage d’hôtel consenti pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 1986.

Le bail a été renouvelé pour une nouvelle durée de neuf années à compter du 1er janvier 2013. Il est venu à expiration contractuelle le 31 décembre 2021.

Par arrêt en date du 6/10/2016, la Cour de cassation a rejeté le recours formé par les bailleurs contre un arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux du 7/04/2015, rendu sur renvoi après cassation, qui a ainsi définitivement mis à la charge des bailleurs les travaux prescrits par l’administration (commission de sécurité et d’accessibilité de la ville de Bordeaux) afin d’assurer la mise aux normes de l’hôtel loué ; outre le remplacement de la chaudière ; travaux à effectuer dans un délai de six mois et - pour le cas où ils ne les réaliseraient pas - a condamné les bailleurs au montant des dits travaux.

Par exploit du 24 juin 2021, la SAS GCMT a donné congé à la Société ERICK AUGIER pour le 31 décembre 2021, avec refus de renouvellement et offre d'indemnité d'éviction.

Saisi par la société GCMT, le Juge des Référés du Tribunal Judiciaire de BORDEAUX a ordonné le 8 novembre 2021 une expertise afin de détermination des indemnité d'éviction prévue l'article L.145-14 du code de commerce, et indemnité d'occupation due par le preneur en application de l'article L 145-28 du même code.

L’expert judiciaire a déposé son pré-rapport le 4 mai 2022, puis le rapport final, le 5 août 2022.

Procédure :

Par acte d’huissier signifié en date du 9/11/2022, la SAS GCMT (ci-après “le bailleur”) a assigné la SARL ERICK AUGIER (ci-après “le preneur”) à comparaître devant le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX aux fins de fixation de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation.

L'ordonnance de clôture est en date du 21/12/2023.

Les débats s’étant déroulés à l’audience collégiale du 25/01/2024, l’affaire a été mise en délibéré au 21/03/2024.

PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR, le bailleur :

Dans son assignation introductive, le demandeur sollicite du Tribunal de :

FIXER l'indemnité d'éviction tous préjudices confondus revenant à la Société ERICK AUGIER à la somme de 210.000 euros, frais de licenciement du personnel en sus,
FIXER ET CONDAMNER la Société ERICK AUGIER au paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant annuel de 25.200 euros, charges et taxe en sus, à compter du 1er janvier 2022 jusqu'à la récupération des locaux et remise des clés avec indexation le 1er janvier de chaque année sur la variation de l'indice des loyers commerciaux,
ORDONNER à la Société ERICK AUGIER de libérer les locaux de tous biens et occupants de son chef dans le délai de trois mois suivant la date de versement (ou de séquestration) de l'indemnité d'éviction conformément aux dispositions prévues par l'article L 145-29 du Code de Commerce et ORDONNER à l'issue de ce délai, son expulsion et celle de tous biens et occupants de son chef avec le concours de la force publique.
RAPPELER l'exécution provisoire de droit,
CONDAMNER la Société ERICK AUGIER au paiement d'une indemnité de 4 000 euros sur le fondement des dispositions prévues par l'article 700 du CPC outre entiers dépens qui comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire.

Dans l’assignation le bailleur prend appui sur les conclusions du rapport d’expertise judiciaire et adopte les chiffres proposés par l’expert sauf à réduire le montant du poste des indemnités accessoires au regard du poste d’honoraires de conseils techniques.

Le bailleur n’a pas conclu en réplique des conclusions du preneur, notifiées par RPVA le 7/06/2023.

PRÉTENTIONS DU DÉFENDEUR, le preneur :

Dans ses dernières conclusions en date du 7/06/2023, le preneur demande au tribunal de :
FIXER à la somme de 370.193 € l'indemnité d'éviction que la SAS GCMT devra payer à La SARL unipersonnelle ERICK AUGIER exerçant sous l'enseigne HÔTEL CHOISEL, et le condamner à la régler
CONDAMNER la SAS GCMT au paiement d'une somme complémentaire de 92.100 € au titre de l'indemnité pour moins-value du fonds de commerce
FIXER l'indemnité d'occupation à la somme de 21.100 € HT et Hors charges à compter du 1 er janvier 2022
REJETER l'ensemble des demandes de la SAS GCMT
CONDAMNER la SAS GCMT au paiement d'une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens comprenant notamment les frais d'expertise
RAPPELER que la décision est exécutoire de droit

Le preneur conteste chacun des postes d’indemnisation de l’éviction retenu par l’expert judiciaire faisant valoir notamment que :

- s’agissant de la valeur du fonds de commerce tant la moyenne fixée sur les trois années 2018, 2019 et 2020, alors que l’année 2020, impactée par la crise sanitaire COVID-19 devrait être neutralisée, que sur le fait d’avoir retenu un chiffre d’affaire hors taxe , alors qu’il conviendrait de le retenir en TTC, que du coefficient retenu par l’expert à 75% ; alors qu’un coefficient de 100% serait plus approprié, s’agissant d’un taux moyen national pour ce type de commerce, sur ce point l’impact négatif du covid serait compensé par l’actractivité de Bordeaux.
Par ailleurs il invoque un préjudice complémentaire au titre d’une moins value du fonds de commerce dont il rend responsable son bailleur, faute de ce dernier de ne lui avoir pas assurer la délivrance parfaite du bien loué en raison de l’absence de travaux qui auraient incombé au bailleur suite à des décisions judiciaires ; préjudice qu’il évalue forfaitairement à 30% de la valeur du fonds de commerce.

Enfin, il conteste également l’évaluation faite par l’expert de l’indemnité d’occupation qui devrait tenir compte de l’impact persistant de la crise sanitaire et d’une plus grande incidence de la précarité à hauteur de 20% d’abattement de l’indemnité en raison de la situation de l’hôtel vis à vis de l’administration, au lieu de 10%.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé aux dernières écritures notifiées aux dates sus mentionnées aux parties

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’indemnité d’éviction
Les parties s’opposent sur le montant de l’indemnité d’éviction proposée par l’expert pour les sommes suivantes :
- évaluation du fonds de commerce à 176.000€, reposant sur la moyenne des trois années d’exploitation 2018, 2019 et 2020, affecté d’un taux (barème) de 75% (pour mémoire le droit au bail étant évalué à 22.800€)
- indemnité accessoires (frais d’emploi 17.600, trouble d’exploitation 14.351, honoraires et conseils techniques 10.000 et frais administratifs 2.000) soit une somme globale de 44.000€

Réponse du Tribunal :
L’article L145-14 du code de commerce dispose que :
“Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.
Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.”
Il est admis que pour évaluer la valeur le juge doit se positionner à une date la plus proche de sa décision.
- sur la valeur du fonds de commerce
Le preneur affirme que ce serait le chiffre d'affaire TTC, et non pas HT comme retenu par l'expert, qui devrait servir de base, que l'année 2020 affectée par la crise covid devrait être neutralisée, alors que devrait être retenu le taux moyen national de 1, au lieu de 0,75 tel que retenu par l'expert.
En l'espèce, l'expert s'est basé sur les chiffres d'exploitation des trois dernières années qui lui étaient soumises (2018, 2019 et 2020), et, interpellé par les dires du conseil du preneur du 5/07/2022, il a maintenu son évaluation.
Tout d’abord, il convient de relever que le preneur n’a pas fait part à l’expert de la critique portant sur le fait d’avoir retenu un chiffre d’affaire HT au lieu de TTC. Bien au contraire son dire du 5/07/2022 conclu à la nécessité de porter l’évaluation à 100% de la moyenne du chiffre d’affaire HT des années 2018 et 2019.
Par ailleurs, s’il est vrai que le montant de la TVA n’est pas à priori exclue, aucun texte, ni usage démontré par le preneur, ne vient au cas présent corroborer cette exigence, elle sera donc écartée ; alors qu’il est constant que le montant de TVA perçu par les commençants hôteliers n’a pas vocation à venir grossir sa marge brute d’exploitation, qui est l’un des critères d’évaluation d’un fonds de commerce.
Ensuite, faute pour le preneur de venir conforter son argumentation en produisant des chiffres d’affaires pertinents pour les années antérieures à 2018 et 2019, ou encore postérieures (par exemple 2020 et 2021), le Tribunal ne peut que valider la démarche de l’expert judiciaire en retenant les trois années 2018, 2019 et 2020 ; alors qu’au surplus les dispositions gouvernementales liées au Covid 19 n’ont pas porté interdiction d’hébergement en hôtel.
Enfin, s’agissant du coefficient appliqué au chiffre d’affaire moyen, l’expert commis est un expert local, c’est à dire à priori bien informé des situations particulières locales, de sorte qu’il n’apparaît pas pertinent de retenir un coefficient supposément national de 1 (100%), soit une valeur du fonds de commerce à 176.000€.
- sur les autres indemnités composant l’indemnité d’éviction
Faute pour le bailleur d’argumenter son opposition au chiffrage de l’expert au titre des honoraires et conseils techniques pour 10.000€, cette indemnité sera donc retenue ainsi que les autres non contestées.
La somme de 44.000 € sera retenue.
Soit une indemnité d’éviction fixée à 220.000 €, étant rappelé qu’à cette somme s’ajoute les frais de licenciement du personnel sur justifications.

Sur la demande d’indemnité complémentaire au titre d’une supposée moins value du fonds de commerce causée par le bailleur
Le preneur fait valoir que, à l’issue d’une longue procédure, par arrêt en date du 7 avril 2015, la Cour d'appel de Bordeaux a dit que les travaux prescrits par l'administration sont à la charge des bailleurs et les a condamnés in solidum à les réaliser dans un délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt et qu’ainsi, les travaux de mise en conformité et sécurité se retrouvaient définitivement à la charge du bailleur, lequel se serait montré réticent à réaliser les travaux qui lui incombaient en vertu du bail et que : “Ces travaux ne seront jamais réalisés, ce qui ne va faire qu'aggraver les désordres existants.”
Il dit qu’il se serait retrouvé dans l'impossibilité d'exploiter les locaux conformément au bail, les chambres étant impropres à l'occupation par la clientèle de l'hôtel, en raison des infiltrations et des dégâts consécutifs.

Il affirme que le bailleur n’aurait pas respecté son obligation de délivrance ni les différentes décisions mettant à sa charge des travaux ce qui aurait entraîné une d'évaluation du Fonds de commerce dont il demande réparation par l’allocation d’une indemnité d’éviction complémentaire qu’il fixe de la manière suivante : “l'impact est estimé à la somme de 30% de l'indemnité principale soit la somme de 92.100 € (307.000 x 30%)”.
Réponse du Tribunal :
Il sera rappelé que selon l'article 9 du code de procédure civile :
"Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.”
En l’espèce, la demande se fonde sur le fait que le bailleur, qui avait par décision de justice obligation de procéder à des travaux de mise aux normes ainsi que de remplacement de la chaudière de chauffage, n’aurait pas effectué les dits travaux, soit un manquement causant la dépréciation du fonds de commerce.
Le Tribunal constate que, s’il est exact que par décision de justice définitive le bailleur était tenu de prendre en charge les travaux de mise aux normes ainsi que le remplacement de la chaudière, il convient également de relever que l’arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux du 7/04/2015, rendu sur renvoi après cassation - qui a ordonné aux bailleurs de réaliser dans un délai de six mois les travaux prescrits par l'administration (la commission de sécurité et d'accessibilité de la ville de Bordeaux ayant émis un avis défavorable à l’exploitation) afin d'assurer la mise aux normes de l'hôtel loué ; outre le remplacement de la chaudière - a également à la demande du preneur dit que faute de s’exécuter dans le délai prescrit le preneur était autorisé à faire réaliser (à son initiative) les dits travaux, et dans cette hypothèse, a condamné les bailleurs à payer au preneur le montant des dits travaux.
De sorte que si les travaux n’ont toujours pas été fait c’est aussi en raison de la carence du preneur qui depuis le rejet par la Cour de cassation du pourvoi formé contre cette décision, soit depuis le 6/10/2016 a en main la solution judiciaire à ces difficultés. Il pouvait en cas de carence du bailleur, à son initiative faire réaliser les travaux de mise aux normes et de remplacement du chauffage et faire exécuter la condamnation du bailleur à lui payer la somme de 274.673,86€ fixée par la Cour d’appel, ce par toute voie d’exécution. Or, il ne démontre pas avoir procédé : ni à l’engagement de ces travaux, ni à l’exécution de la condamnation du bailleur à lui payer les sommes correspondantes. De sorte que si dépréciation du fonds de commerce il y a, il n’est pas démontré qu’elle soit directement imputable au bailleur, ce en cause première et exclusive.
Par ailleurs, force est de constater qu’à supposer que le bailleur ait par manquement à ses obligations contribué à une diminution de valeur du fonds de commerce de l’hôtel, le preneur ne justifie en rien le quantum demandé, procédant par simple affirmation et par appréciation forfaitaire ; étant remarqué qu’il ne produit aucune analyse de la valeur virtuelle du fonds - à savoir celle qu’aurait eu le fonds si le bailleur n'avait pas failli - somme dont la différence avec la valeur marchande actuelle constituerait alors le préjudice.
Il sera débouté de cette demande.

Sur l’indemnité d’occupation
Le bailleur soutient qu’en application de l'article L. 145-28 du code de commerce, l'expert aurait estimé l'indemnité d'occupation due par le preneur depuis le 1er janvier 2022, en retenant une valeur locative annuelle HT et HC de 28.000 euros, sur laquelle est appliqué un abattement de 10 % pour précarité, conduisant à une somme annuelle HT et HC de 25.200 euros.
Le preneur fait valoir que la valeur locative avait été fixée et retenue en 2013 à 22.000€ ; alors que les conséquences de la crise du covid 19 se feraient encore ressentir et que les manquements du bailleur sus-visés fragiliserait l’exploitation vis à vis de l’administration.
Réponse du Tribunal :
Selon l’article L.145-28:
“Aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue. Jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. Toutefois, l'indemnité d'occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d'appréciation.
(...)”
Comme l’indique le preneur lui même dans ses conclusions et ses dires à l’expert, l’accroissement de l’attraction du centre ville de Bordeaux sur le plan touristique compense - peu ou prou - les éventuelles persistances de conséquences économiques de la crise sanitaire ; alors que la supposée précarité accentuée invoquée par le preneur ne peut, comme déjà jugé plus haut, être imputée au bailleur depuis l’arrêt de rejet du pourvoi (octobre 2016) contre l’arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux ; et alors qu’il n’est pas incohérent que la valeur locative fixée en 2013 soit inférieure à celle déterminée en 2022 par l’expert, neuf années s’étant écoulées entre temps.
Le Tribunal fait sienne l’analyse de l’expert et fixe à 25.200 €, hors taxes et hors charges, par an cette indemnité d’occupation, ce à compter du 1/01/2022.

Sur les autres demandes :
Le bailleur demande au Tribunal qu’il soit ordonné à la Société ERICK AUGIER de libérer les locaux de tous biens et occupants de son chef dans le délai de trois mois suivant la date de versement (ou de séquestration) de l'indemnité d'éviction en application des dispositions prévues par l'article L 145-29 du code de commerce, et qu’il soit également ordonné à l'issue de ce délai, son expulsion et celle de tous biens et occupants de son chef avec le concours de la force publique.
Le preneur ne forme aucune objection à ces demandes.
Ces demandes sont conformes aux textes cités, il y sera fait droit.
- sur les dépens,
Les dépens, ce y compris les frais de l’expertise, seront supportés par la partie qui succombe, ici le preneur, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

- sur la demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie tout ou partie des frais non compris dans les dépens qu’elle a engagé pour faire valoir ses droits et assurer correctement sa défense.

- sur l’exécution provisoire,
L’exécution provisoire de la décision à venir est de droit et il n’y a pas lieu à l’écarter.

PAR CES MOTIFS
Le Tribunal,
- CONDAMNE la SAS GCMT à payer à la Société ERICK AUGIER la somme de 220.000 euros, frais de licenciement du personnel en sus, ce au titre de l'indemnité d'éviction tous préjudices confondus ;
- DÉBOUTE la Société ERICK AUGIER de sa demande d’indemnité pour moins-value du fonds de commerce;
- CONDAMNE la Société ERICK AUGIER au paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant annuel de 25.200 euros, charges et taxe en sus, à compter du 1er janvier 2022 jusqu'à la récupération des locaux et remise des clés, avec indexation le 1er janvier de chaque année, sur la variation de l'indice des loyers commerciaux ;
- ORDONNE à la Société ERICK AUGIER de libérer les locaux de tous biens et occupants de son chef dans le délai de trois mois suivant la date de versement (ou de séquestration) de l'indemnité d'éviction ;
- ORDONNE à l'issue de ce délai, son expulsion et celle de tous biens et occupants de son chef avec le concours de la force publique ;
- CONDAMNE la Société ERICK AUGIER aux entiers dépens en ce compris les frais de l’expertise;
- DIT n’y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- RAPPELLE que le présent jugement est assorti de plein droit de l’exécution provisoire.

Le présent jugement a été signé par madame Marie WALAZYC, Vice-Présidente et par madame Pascale BUSATO, Greffière.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 5ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/08420
Date de la décision : 21/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-21;22.08420 ?
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