La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2024 | FRANCE | N°23/08559

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Jex droit commun, 12 mars 2024, 23/08559


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 12 Mars 2024


DOSSIER N° RG 23/08559 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YL2R
Minute n° 24/ 63


DEMANDEUR

Monsieur [G] [T]
né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 6]
demeurant [Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Maître Carol LAGEYRE, avocat au barreau de BORDEAUX


DEFENDEUR

URSSAF AQUITAINE, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Maître Nicolas ROTHÉ DE

BARRUEL de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX


COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-préside...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 12 Mars 2024

DOSSIER N° RG 23/08559 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YL2R
Minute n° 24/ 63

DEMANDEUR

Monsieur [G] [T]
né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 6]
demeurant [Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Maître Carol LAGEYRE, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEUR

URSSAF AQUITAINE, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Maître Nicolas ROTHÉ DE BARRUEL de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier

A l’audience publique tenue le 16 Janvier 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 12 Mars 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

Le 12 mars 2024
Formules exécutoires aux avocats + dossiers
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties

EXPOSE DU LITIGE

Se prévalant d’une contrainte en date du 18 août 2023, l’URSSAF AQUITAINE a fait diligenter une saisie sur les comptes bancaires de Monsieur [G] [T] par acte en date du 22 septembre 2023, dénoncée par acte du 25 septembre 2023 à hauteur de la somme de 17.391,75 euros.

Par acte de commissaire de justice en date du 13 octobre 2023, Monsieur [T] a fait assigner l’URSSAF AQUITAINE devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin de bénéficier de délais de paiement et subsidiairement de voir annulée la mesure de saisie.

A l’audience du 16 janvier 2024 et dans ses dernières conclusions, Monsieur [T] sollicite, au visa de l’article 1343-5 du Code civil :
- qu’il lui soit accordé un échéancier de 24 mois pour acquitter sa dette auprès de l’URSSAF
- qu’il soit déduit du montant ainsi dû les sommes réclamées au titre des pénalités et des intérêts de retard pour que les délais portent sur une somme de 34.837,83 euros
- que soit prononcée la levée de la saisie pratiquée aux frais exclusifs de l’URSSAF
- à titre infiniment subsidiaire, que soit constatée la nullité de la saisie-attribution.

Au soutien de ses prétentions, Monsieur [T] fait valoir qu’il ne conteste pas sa qualité de débiteur de l’URSSAF mais souligne que les prélèvements réalisés par cet organisme sur son compte bancaire sont erratiques et interrompus sans intervention de sa part, contestant ainsi devoir toute pénalité de retard. Il indique solliciter des délais de paiement vu le montant à acquitter. A titre subsidiaire, il fait valoir que la saisie-attribution a été réalisée sur un compte joint mais n’a pas fait l’objet d’une dénonciation à sa conjointe cotitulaire, impliquant la nullité de cet acte.

A l’audience du 16 janvier 2024 et dans ses dernières écritures, l’URSSAF AQUITAINE conclut à la validation de la saisie-attribution pratiquée et à ce qu’il lui soit donné acte qu’elle accepte des délais de paiement pour le reliquat de la dette. Elle sollicite la condamnation de Monsieur [T] aux dépens et au paiement d’une somme de 960 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’URSSAF AQUITAINE soutient que la saisie-attribution est valide, l’absence de dénonciation au tiers cosaisi n’étant pas sanctionnée par la nullité ou la caducité du procès-verbal de saisie. Elle précise qu’en vertu du principe de l’effet attributif immédiat, les sommes saisies sont d’ores et déjà acquises mais accepte des délais de paiement pour le surplus.

L’affaire a été mise en délibéré au 12 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales

- Sur la recevabilité

Les articles L211-4 et R211-11 du Code des procédures civiles d’exécution relatifs à la saisie-attribution disposent : « Toute contestation relative à la saisie est formée dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat.
En l'absence de contestation, le créancier requiert le paiement de la créance qui lui a été attribuée par l'acte de saisie.
Toutefois, le débiteur saisi qui n'aurait pas élevé de contestation dans le délai prescrit peut agir à ses frais en répétition de l'indu devant le juge du fond compétent. »

« A peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L'auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. Il remet une copie de l'assignation, à peine de caducité de celle-ci, au greffe du juge de l'exécution au plus tard le jour de l'audience. »

L’article R232-7 du Code des procédures civiles d’exécution relatif à la saisie de droits d’associés prévoit quant à lui : « A peine d'irrecevabilité, la contestation est dénoncée le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L'auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. »

Monsieur [T] a contesté la saisie-attribution pratiquée par une assignation délivrée le 13 octobre 2023 alors que le procès-verbal de saisie date du 22 septembre 2023 avec une dénonciation effectuée le 25 septembre 2023. La contestation de la saisie-attribution était donc recevable jusqu’au 25 octobre 2023. Elle est intervenue dans les délais.

Monsieur [T] justifie du courrier recommandé faisant état de la contestation portée adressé à l’huissier ayant réalisé la saisie-attribution en date du 13 octobre 2023.
Le demandeur doit donc être déclaré recevable en sa contestation de la saisie-attribution.

- Sur les délais de paiement et la nullité de la saisie-attribution

L’article L211-1 du Code des procédures civiles d’exécution dispose :
« Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail. »

La saisie-attribution valide a un effet attributif immédiat qui transfère la propriété des sommes dès sa réalisation.

Par ailleurs, l’article R211-22 du Code des procédures civiles d’exécution fait obligation au commissaire de justice réalisant la saisie-attribution sur un compte joint de dénoncer cet acte au cotitulaire. S’il ignore l’identité de celui-ci, l’établissement bancaire accomplit cette diligence qui n’est pas prescrite à peine de caducité et de nullité.

L’article 1343-5 du Code civil dispose :
« Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment. »

La saisie-attribution contestée a bien été exercée sur un compte multititulaires. Néanmoins, le procès-verbal ne fait pas ressortir l’identité du cotitulaire, le défaut de cette mention et de dénonciation postérieure à cette personne n’étant pas sanctionné, il ne peut en être tiré un motif d’annulation de la mesure de saisie pratiquée.

La saisie-attribution réalisée le 22 septembre 2023 est donc bien valide et a d’ores et déjà attribué les fonds saisis à raison de 17.391,75 euros à l’URSSAF AQUITAINE.

Sur le montant du reliquat, Monsieur [T] sollicite le montant principal visé dans le commandement aux fins de saisie-vente délivré le 13 septembre 2023 et sollicite ainsi de ne pas avoir à régler les frais d’exécution, l’émolument proportionné et le coût du commandement.

Le demandeur justifie de multiples échéanciers communiqués par l’URSSAF et de prélèvements irréguliers réalisés sur son compte bancaire. L’URSSAF quant à elle justifie des échéanciers envoyés et d’un courrier du 9 décembre 2022 dénonçant l’échéancier mis en place en septembre 2022 précisant lapidairement que celui-ci n’a pas été honoré. Elle ne justifie néanmoins d’aucune mise en demeure ni d’aucun refus de prélèvement qui aurait été opposé par l’établissement bancaire de Monsieur [T] alors qu’elle précise elle-même qu’elle prélèvera les échéances sur ce compte bancaire.

Elle ne justifie en définitive pas des conditions l’ayant conduite à la délivrance d’un commandement de payer coûteux, et d’une mesure d’exécution forcée de façon générale alors que le refus d’un paiement volontaire du débiteur n’est pas établi.

Il y a donc lieu de considérer qu’elle conservera à sa charge les frais susvisés.

La dette sera donc fixée à la somme de 17.446,08 euros.

Au regard du montant de cette somme, de la bonne foi de Monsieur [T] et de l’accord de l’URSSAF AQUITAINE, des délais de paiement échelonnés sur deux années seront alloués au demandeur ainsi que cela sera précisé au dispositif.

Sur les autres demandes
Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

Les deux parties voyant leurs demandes partiellement prospérer, chacune conservera la charge de ses dépens. Par ailleurs, l’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.

PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort,
DECLARE la contestation de la saisie-attribution pratiquée par l’URSSAF AQUITAINE par acte du 22 septembre 2023 sur les comptes bancaires de Monsieur [G] [T] recevable ;
VALIDE la saisie-attribution pratiquée par l’URSSAF AQUITAINE par acte du 22 septembre 2023 sur les comptes bancaires de Monsieur [G] [T] ;
FIXE à la somme de 17.446,08 euros le solde de la dette due par Monsieur [G] [T] à l’URSSAF AQUITAINE au titre des cotisations visées par la contrainte du 18 août 2023 signifiée par acte du 22 août 2023 ;
DIT que Monsieur [G] [T] pourra se libérer de sa dette envers son créancier l’URSSAF AQUITAINE en 23 mensualités de 726,92 euros, la 24ème soldant la dette en principal, frais et accessoires ;
DIT que le premier versement interviendra avant le 5 de chaque mois à compter du mois suivant la notification de la présente décision ;
DIT qu’à défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance exacte, la totalité des sommes dues deviendra immédiatement exigible ;
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.

LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Jex droit commun
Numéro d'arrêt : 23/08559
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;23.08559 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award