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11/03/2024 | FRANCE | N°23/02137

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Ppp contentieux général, 11 mars 2024, 23/02137


Du 11 mars 2024


5AC


SCI/



PPP Contentieux général

N° RG 23/02137 - N° Portalis DBX6-W-B7H-X66R







[V] [X] [K] [U], [J] [W] [B] [D] épouse [U]

C/

[T] [L]












- Expéditions délivrées à


- FE délivrée à


Le 11/03/2024


Avocats : Me Albane DEMPTOS-JOURNU
Me Nahira-marie MOULIETS





TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 2]

- [Localité 4]

JUGEMENT EN DATE DU 11 mars 2024



JUGE : Madame Edith VIDALIE-TAUZIA, Magistrat

GREFFIER : Madame Françoise SAHORES


DEMANDEURS :

Monsieur [V] [X] [K] [U]
né le 07 Avril 1987 à [Localité 9]
[Adresse 1]
[Local...

Du 11 mars 2024

5AC

SCI/

PPP Contentieux général

N° RG 23/02137 - N° Portalis DBX6-W-B7H-X66R

[V] [X] [K] [U], [J] [W] [B] [D] épouse [U]

C/

[T] [L]

- Expéditions délivrées à

- FE délivrée à

Le 11/03/2024

Avocats : Me Albane DEMPTOS-JOURNU
Me Nahira-marie MOULIETS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 2] - [Localité 4]

JUGEMENT EN DATE DU 11 mars 2024

JUGE : Madame Edith VIDALIE-TAUZIA, Magistrat

GREFFIER : Madame Françoise SAHORES

DEMANDEURS :

Monsieur [V] [X] [K] [U]
né le 07 Avril 1987 à [Localité 9]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représenté par Me Albane DEMPTOS-JOURNU (Avocat au barreau de BORDEAUX)

Madame [J] [W] [B] [D] épouse [U]
née le 26 Février 1987 à [Localité 3]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représentée par Me Albane DEMPTOS-JOURNU (Avocat au barreau de BORDEAUX)

DEFENDEUR :

Monsieur [T] [L]
né le 15 Avril 1968 à [Localité 8]
[Adresse 6]
[Localité 5]

Représenté par Me Nahira-Marie MOULIETS (Avocat au barreau de BORDEAUX)

DÉBATS :

Audience publique en date du 15 Janvier 2024

PROCÉDURE :

Articles 480 et suivants du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 17 avril 2014 à effet de la même date, d’une durée de trois ans, Mme [S] [A], représentée par la société Square Habitat 33, a consenti un bail d’habitation à M. [T] [L], portant sur un logement situé [Adresse 6] à [Localité 10], moyennant un loyer mensuel de 562 euros.

Par acte authentique du 9 juillet 2021, M. [V] [U] et Mme [J] [D] ont acquis ce logement.

Par acte de commissaire de Justice du 25 janvier 2022, M. [V] [U] et Mme [J] [D] ont fait délivrer à M. [T] [L] un congé pour motifs sérieux et légitimes.

Par acte introductif d’instance du 25 mai 2023, M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] ont fait assigner M. [T] [L] à l’audience du 27 juin 2023 devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bordeaux, aux visas de l’article 15-1 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et de l’article 1231-1 du code civil, et ont demandé de :
-Dire et juger que le congé pour motifs sérieux et légitimes signifié à M. [T] [L] justifié par la réfection totale du logement, pour la date du 16 avril 2023, est régulier
-Dire et juger que le bail d’habitation en date du 17 avril 2014 est résilié à la date du 17 avril 2023
-Ordonner l’expulsion de M. [T] [L] et de tout occupant de son chef, avec, au besoin, l’assistance de la force publique
-Ordonner l’enlèvement et le dépôt des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux loués en un lieu approprié, aux frais, risques et périls de M. [T] [L]
-Assortir l’obligation de quitter les lieux d’une astreinte de 100 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir et ce jusqu’au jour de la complète libération des lieux et de la remise des clés
-Condamner M. [T] [L] à leur payer une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges contractuels, à compter rétroactivement du 17 avril 2023, date de résiliation, et ce, jusqu’au jour de la libération des lieux et de la restitution des clés de l’appartement
-Condamner M. [T] [L] à leur payer une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive
-Condamner M. [T] [L] à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens
-Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
L’affaire a été appelée à l’audience du 27 juin 2023, puis après quatre renvois à la demande des parties, elle a été débattue à l’audience du 15 janvier 2024.

Lors de cette audience, M. [V] [U] et Mme [J] [D], représentés par avocat, ont confirmé les termes de leur demande initiale, y ajoutant le rejet des demandes de délais formulées par M. [T] [L].
Ils indiquent, au visa de l’article 15-1 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 que les travaux de rénovation envisagés sont d’ampleur, urgents, nécessitent le départ du locataire et constituent un motif légitime et sérieux de validité du congé notifié.
Ils précisent avoir été diligents puisqu’ils ont proposé deux solutions de relogement à M. [T] [L], lui ont offert une indemnité égale à six mois de loyer ainsi que le paiement de son déménagement. Ils font valoir que M. [T] [L] se maintient abusivement dans les lieux alors que le congé qui lui a été délivré est valable et qu’il est sans droit ni titre depuis la date d’effet du congé, le 16 avril 2023.
Ils soutiennent également, au visa de l’article 32-1 du code de procédure civile, que le maintien abusif dans les lieux de M. [T] [L] constitue une résistance abusive qui les a contraints à des frais pour faire valoir leurs droits et que cela doit être sanctionné.
Ils font valoir, aux termes des articles L. 412-2 et L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution, que M. [T] [L] a bénéficié d’un délai de 2 ans pour se reloger, dispose d’un véhicule et d’un travail à temps partiel. Ils sollicitent donc le rejet de sa demande d’octroi de délais.

M. [T] [L], représenté par avocat, soutient que les travaux de rénovation projetés ne sont pas incompatibles avec son occupation des lieux, sont d’une courte durée et ne sont pas suffisamment importants pour considérer que le congé a été délivré avec un motif légitime et sérieux. Par ailleurs, les travaux ne concernent pas l’amélioration du logement mais la réunion de deux maisons en une seule excluant la nécessité d’effectuer des travaux structurels du gros œuvre.
A titre subsidiaire, il sollicite l’octroi de délai au visa de l’article L. 412-2 du code des procédures civiles d’exécution. En effet, il indique être dans une situation financière délicate en raison de sa situation professionnelle peu stable. Il précise qu’en l’absence de quittances de loyer sollicitées, il n’a pas pu être en mesure de constituer un dossier complet dans le cadre de sa demande de logement ni de faire les démarches auprès de la Caisse d’allocation familiale.
Il sollicite également, au visa de l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution, l’octroi d’un délai renouvelable de six mois car il est à jour du paiement de ses loyers, est dans une situation précaire à 54 ans et ne peut pas se reloger dans des conditions normales.
Il fait également valoir que la relation contractuelle le liant à M. et Mme [U] est arrivée à son terme le 17 avril 2023 et sollicite le rejet de leur demande de condamnation à des dommages et intérêts sur le fondement contractuel.
A titre reconventionnel, il sollicite l’indemnisation de son préjudice en raison des travaux réalisés dans la maison mitoyenne ainsi que de la violence et la mauvaise foi de M. et Mme [U].
Il précise également, aux termes de l’article 514 du code de procédure civile, que l’exécution provisoire est incompatible avec la nature de l’affaire et lui donnerait un caractère irrémédiable en raison de l’expulsion et de sa situation financière.

Il demande donc, aux termes de ses dernières conclusions soutenues à l’audience, de :
* A titre principal,
-Débouter M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] de l’ensemble de leurs demandes,
-Déclarer le motif exposé dans le congé délivré par M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] illégitime et non-sérieux,
En conséquence,
-Déclarer le congé délivré par M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] nul ;
En conséquence,
-Condamner M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] à l’indemniser pour le préjudice subi à une somme de 10.000 euros
* A titre subsidiaire,
-Proroger le délai de deux mois suivant le commandement de quitter les lieux d’une durée de trois mois,
-Lui accorder un délai renouvelable de six mois au motif que son relogement ne peut avoir lieu dans des conditions normales,
-Rejeter la demande d’astreinte formulée par M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U],
-Rejeter la demande de dommages et intérêts formulée par M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U],
-Ecarter l’exécution provisoire de droit en ce qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire,
* En tout état de cause,
-Condamner M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

A l’issue de l’audience, l’affaire a été mise en délibéré au 11 mars 2024.

MOTIFS DU JUGEMENT

Sur la validité du congé
L’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 prévoit notamment que lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant. Le délai de préavis applicable au congé est de six mois lorsqu'il émane du bailleur.

Le congé doit être notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, signifié par acte de commissaire de justice ou remis en main propre contre récépissé ou émargement. Ce délai court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée, de la signification de l'acte du commissaire de justice ou de la remise en main propre.

En application de ces dispositions, est légitime et sérieux le congé donné pour réaliser des travaux utiles et nécessaires à la conservation du bien loué et dont l'exécution est incompatible avec le maintien du locataire dans les lieux.

En l’espèce le bail, conclu pour une durée de trois ans à effet du 17 avril 2014, a été tacitement reconduit le 17 avril 2017, puis le 17 avril 2020 pour une nouvelle durée de trois ans, soit jusqu’au 16 avril 2023.

Un congé pour motif sérieux et légitime a été notifié à M. [T] [L] par acte délivré le 25 janvier 2022, soit au moins six mois avant la date d’expiration du contrat.

Ce congé indique comme motif sérieux et légitime la réalisation d’importants travaux de rénovation et remises aux normes de l’appartement (isolation, modifications et renforcement de la toiture, changement d’huisseries et portes, remplacement des sols, peinture) qui ne permettent pas le maintien du locataire dans les lieux loués.

M. [T] [L] a donc été précisément informé des raisons du congé.

M. [T] [L] ne démontre pas le caractère frauduleux du congé, dont le caractère sérieux et légitime sont, au contraire, établis.
En effet, il ressort des deux devis n°139-2 et 139-3 établis le 13 août 2021 pour un montant total de 197.340,15 euros TTC (dont 117.564,15 + 79.776) et de la facture d’acompte établie le 18 septembre 2021 pour le devis n°139-3 d’un montant de 30.000 euros TTC par la S.A.R.L. AB BATI 33 une liste détaillée des postes de travaux envisagés pour le logement occupé par M. [T] [L] ainsi que pour la maison voisine appartenant à M. et Mme [U].
Parmi ces travaux, ceux concernant le logement occupé par M. [T] [L] sont la dépose de la salle de bain, de la cuisine et du cloisonnement du studio, la création d’une ouverture entre la maison et le studio touchant à un mur porteur, la fourniture et la pose de menuiseries, le traitement de la charpente, le remplacement des réseaux d’évacuation et d’arrivée des eaux de la salle de bain et du séjour et sa rénovation. Les travaux sont donc d’ampleur et nécessitent l'évacuation totale des pièces à rénover afin d'acheminer et stocker les matériaux et vont générer des gravats et d'importantes quantité de poussière.

Par ailleurs, M. [T] [L] verse aux débats deux mail des 15 mai et 2 juin 2022 faisant état de deux dégâts des eaux et de dégradation matérielles dont le détachement d’une plaque de placo du salon, alors que les devis précités prévoient des travaux de plâtrerie et d’étanchéité de toiture. Ces travaux sont donc nécessaires au regard de l’état actuel du logement litigieux.

En outre, M. [T] [L] soutient que les travaux ne sont pas incompatibles avec son occupation des lieux et sont d’une courte durée. Toutefois, il ressort des échanges de mails produits par ce dernier qu’il s’est opposé à la réalisation de travaux dans le logement qu’il occupe suite à des dégâts des eaux et à ses signalements aux bailleurs. De plus, il ne propose aucune solution qui permettrait d'organiser sa cohabitation avec les artisans, dans un espace de vie de 40,21m², tout en leur garantissant un libre accès aux pièces à rénover et en le préservant des nuisances susceptibles de l'exposer à des risques pour sa sécurité et sa santé dont il s’est d’ores et déjà plaint alors que les travaux entrepris ne concernent pas directement le logement qu’il occupe.
Enfin quand bien même les travaux auraient pour objet de réunir les deux immeubles acquis par les demandeurs, ceci renforcerait l’importance des travaux à exécuter, incompatibles avec la présence d’un locataire et légitimerait le non renouvellement du bail pour la mise en oeuvre de ces travaux.

Dès lors, il y a lieu de déclarer que le congé délivré le 25 janvier 2022 est valide conformément aux dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989.

En conséquence, le bail a pris fin le 16 avril 2023 et M. [T] [L] qui s'est maintenu dans les lieux, est occupant sans droit ni titre à compter du 17 avril 2023.

Sur l’expulsion
L’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution indique que « si l'expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7. Toutefois, le juge peut, notamment lorsque les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait ou lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l'article L. 442-4-1 du code de la construction et de l'habitation n'a pas été suivie d'effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce délai. »

L’article L.412-2 du même code prévoit que “Lorsque l'expulsion aurait pour la personne concernée des conséquences d'une exceptionnelle dureté, notamment du fait de la période de l'année considérée ou des circonstances atmosphériques, le délai prévu à l'article L. 412-1 peut être prorogé par le juge pour une durée n'excédant pas trois mois”.

L’article L. 412-3 alinéa 1 et 2 du code des procédures civiles d’exécution prévoit quant à lui que « le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. Le juge qui ordonne l'expulsion peut accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions. »
L’article L.412-4 précise quant à lui que “La durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.

En l’espèce, le contrat de bail liant M. [T] [L] et M. et Mme [U] est résilié. M. [T] [L] ne disposant plus de titre d’occupation, M. et Mme [J] [U] sont fondés à voir prononcer son expulsion et celle de tout occupant de son chef. Cette dernière sera en conséquence ordonnée, faute de départ volontaire.

Les circonstances de fait ne justifient pas de priver l’occupant du bénéfice du délai de deux mois à compter du commandement de quitter les lieux. Pour autant M. [T] [L] ne démontre pas que l’expulsion aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle dureté ; il ne peut dès lors bénéficier d’une prorogation du délai prévu par l’article L.412-1 précité.

S’agissant des délais renouvelables, M. [T] [L] ne conteste pas avoir obtenu deux propositions de location par l’intermédiaire de M. et Mme [U] et ne pas y avoir donné de suite favorable en septembre 2021 et décembre 2022. Il n’est pas non plus contesté par M. et Mme [U] avoir remis en retard et après sollicitation réitérée de la part de M. [T] [L] certaines de ses quittances de loyer, dont celles d’avril à décembre 2022, le 19 décembre 2022.

Le congé prenant effet au 16 avril 2023 et M. [U] ayant, par un mail daté du 19 décembre 2022, transmis les quittances des mois de l’année en cours, M. [T] [L] ne démontre pas avoir entrepris des démarches de recherches d’un nouveau logement lorsqu’il était en possession des quittances attestant qu’il était un bon payeur et qu’il était en mesure de s’acquitter d’un loyer mensuel de 562 euros.

M. [T] [L] justifie, au 9 juin 2023, être inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi en catégorie 1 depuis le 17 septembre 2020 et au 13 juillet 2022, être reconnu en qualité de travailleur handicapé. Toutefois, il ne produit aucune pièce attestant de sa situation financière et familiale actuelle.

En conséquence, M. [T] [L] ne démontre pas en quoi son relogement ne peut avoir lieu dans des conditions normales.

Dès lors, aucune circonstance ne justifie d’octroyer à M. [T] [L] des délais renouvelables en application de l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution précité.

Ses demandes tendant à lui accorder un délai de trois mois et un délai renouvelable de six mois seront donc rejetées.

Sur le sort des meubles
Il n’y a pas lieu de se prononcer sur le sort des meubles en cas d’expulsion puisque les articles L.433-1, L.433-2 et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution le déterminent.

Sur l’indemnité d’occupation
En cas de maintien dans les lieux malgré la fin du contrat de bail, il incombe à l’occupant de s’acquitter, jusqu'à libération parfaite des lieux, d’une indemnité d'occupation équivalente au montant du loyer et des charges.

M. [T] [L] est occupant sans droit ni titre depuis le 17 avril 2023.

Dès lors, il sera condamné à payer une indemnité d’occupation équivalente au montant du loyer et des charges courant à compter du 17 avril 2023, et jusqu’à la libération des lieux. Cette condamnation sera prononcée en deniers ou quittances valables puisque le défendeur affirme être à jour, sans que cela soit contesté, mais sans justificatif à l’appui de son affirmation.

Sur l’astreinte pour quitter les lieux
L'expulsion de M. [T] [L] étant autorisée,  et une indemnité d'occupation étant mise à sa charge, il n’est pas justifiée d'ordonner une astreinte en vue de le contraindre à quitter les lieux.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive
Les demandeurs réclament la condamnation de M. [T] [L] au paiement d’une somme de 1.000 euros qu’ils fondent désormais sur l’article 32-1 du code de procédure civile qui prévoit que « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés. »

Il est constant que toute faute dans l'exercice des voies de droit est susceptible d'engager la responsabilité des plaideurs.
Cependant, une défense à une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières qu'il appartient aux demandeurs de justifier, constituer un abus de droit.

En l’espèce, M. et Mme [U] ne démontrent pas que la défense en justice est abusive ou dilatoire. En effet, M. [T] [L] a indiqué par une lettre recommandée avec accusé de réception datée du 28 novembre 2022 contester le sérieux et la légitimité du congé délivré le 25 janvier 2022 et a précisé qu’il appartenait au juge d’en vérifier la véracité et la légitimité. Ses propos ont également été réitérés par une lettre recommandée avec accusé de réception datée du 20 décembre 2022. Au regard des motifs du congé, que le défendeur avait le droit de contester, cette défense et le maintien dans les lieux de M. [T] [L] ne sont pas constitutifs d’un abus de se défendre en justice et ne peuvent justifier pour les demandeurs une indemnisation au titre de l’abus de droit.

Dès lors, la demande en dommages et intérêts fondée sur l’article 32-1 du code procédure civile formulée par M. et Mme [U] sera rejetée.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts
M. [T] [L] réclame la condamnation des demandeurs au paiement d’une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts leur reprochant d’avoir fourni un motif erroné pour lui donner congé et le priver de son droit de préemption, d’avoir fait exécuter des travaux dans la maison voisine laissés ensuite à l’abandon lui occasionnant des nuisances, leur violence et mauvaise foi.

Néanmoins le congé est déclaré valable et aucun élément n’établit l’intention des propriétaires de le priver d’un droit de préemption.
Il ressort des pièces produites qu’ils ont accompagné dans un premier temps M. [T] [L] dans la recherche d’un nouveau logement, et lui ont fait des propositions financières pour faciliter son déménagement, ce qu’avait d’évidence accepté celui-ci puisque selon courriel du 15 juin 2021, il avait établi une liste de ses attentes et acceptait d’ailleurs un logement à [Localité 7].

Par ailleurs il n’établit pas que les demandeurs auraient ensuite sciemment multiplié les nuisances dans l’objectif de le contraindre à quitter les lieux, son refus de quitter les lieux jusqu’à la décision du juge sur la validité du congé, expliquant à lui seul que les travaux soient mis à l’arrêt.
Aucun élément objectif ne démontre les troubles de jouissance, ou des comportements violents et la mauvaise foi des demandeurs.

En conséquence la demande reconventionnelle en dommages et intérêts sera rejetée.

Sur les demandes accessoires
Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie. En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

En l’espèce, M. [T] [L], partie perdante, supportera la charge des dépens.
Il sera par ailleurs condamné à payer à M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et sa demande sur ce même fondement sera rejetée.

En application de l’article 514 du code de procédure civile, l'exécution provisoire est de droit. Elle n’apparaît pas incompatible avec la nature de l'affaire, et il n’y a donc pas lieu de l’écarter en l’espèce.

PAR CES MOTIFS :

Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

VALIDE le congé pour motif sérieux et légitime délivré le 25 janvier 2022 par M. [V] [U] et Mme [J] [D] ép. [U] à M. [T] [L] ;

CONSTATE que M. [T] [L] est déchu de tout titre d’occupation depuis le 17 avril 2023 ;

CONDAMNE M. [T] [L] à quitter le logement situé [Adresse 6] à [Localité 10] ;

REJETTE la demande de prorogation du délai du commandement de quitter les lieux et la demande de délais renouvelables avant l’expulsion ;

REJETTE la demande de libération des lieux sous astreinte ;

DIT qu'à défaut pour M. [T] [L] de libérer volontairement les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec si nécessaire le concours et l'assistance de la force publique deux mois après la délivrance d’un commandement de quitter les lieux conformément aux dispositions de l’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution ;

RAPPELLE que le sort des meubles en cas d’expulsion est régi par les articles L.433-1, L.433-2 et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

FIXE le montant de l'indemnité d'occupation due à compter du 17 avril 2023 au montant du dernier loyer, de la provision sur charges et de la régularisation au titre des charges ou taxes récupérables sur production de justificatifs et CONDAMNE M. [T] [L], en deniers ou quittances valables, au paiement des indemnités d'occupation courant du 17 avril 2023 jusqu’au jour de la libération des lieux ;

REJETTE la demande de M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] en dommages et intérêts pour résistance abusive ;

REJETTE la demande de M. [T] [L]  en dommages et intérêts ;

REJETTE les demandes autres, plus amples ou contraires ;

CONDAMNE M. [T] [L] aux dépens ;

CONDAMNE M. [T] [L] à payer à M. [V] [U] et Mme [J] [D] épouse [U] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande tendant à écarter l’exécution provisoire de droit du jugement ;

DIT que le présent jugement est exécutoire de plein droit par provision.

Ainsi jugé les jour, mois et an susdits.

LA GREFFIÈRE LAVICE PRÉSIDENTE chargée des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Ppp contentieux général
Numéro d'arrêt : 23/02137
Date de la décision : 11/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-11;23.02137 ?
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