Vu, enregistrée à son secrétariat le 8 octobre 2019, la lettre par laquelle le greffe de la cour d'appel de Grenoble a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. A... à la commune de Saint-Hilaire du Touvet, aux droits de laquelle vient la commune du Plateau-des-petites-roches, devant la juridiction judiciaire ;
Vu l'ordonnance du 16 mai 2018, par laquelle le conseil des prud'hommes de Grenoble, statuant en référé, a déclaré la juridiction judiciaire compétente pour connaître du litige et statué au fond ;
Vu le déclinatoire présenté le 29 mars 2019 par le préfet de l'Isère tendant à voir déclarer la juridiction judiciaire incompétente, par le motif que M. A... exerçait les fonctions de directeur de la régie municipale des remontées mécaniques de Saint-Hilaire du Touvet, qui constitue un service public industriel et commercial ;
Vu l'arrêt du 3 septembre 2019 par lequel la cour d'appel de Grenoble, statuant en référé, a rejeté le déclinatoire de compétence et confirmé l'ordonnance du 16 mai 2018 ;
Vu l'arrêté du 18 septembre 2019 par lequel le préfet de l'Isère a élevé le conflit ;
Vu, enregistré le 29 octobre 2019, le mémoire présenté pour la commune du Plateau-des-petites roches, tendant à la confirmation de l'arrêté de conflit, par le motif que le directeur d'un service d'exploitation des remontées mécaniques et pistes de ski, qui constitue un service public industriel et commercial, est nécessairement un agent public, que M. A... a été recruté sur un poste de direction, que ni les termes du contrat de travail rédigé comme un contrat de droit privé renvoyant à une convention collective, ni les énonciations des fiches de paie, ni la référence aux fonctions de chef d'exploitation ne peuvent affecter par eux-mêmes la qualification du contrat, qui n'est pas à la disposition des parties, et que M. A... exerçait effectivement les fonctions de directeur de la régie ;
Vu, enregistré le 22 novembre 2019, le mémoire présenté pour M. A... tendant à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente et à ce que la commune lui verse la somme de 4 000 euros au titre de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991, par le motif qu'il n'a exercé que les fonctions de chef d'exploitation et non celles de directeur de la régie, qu'il n'a pas été nommé sur proposition du maire, qu'il n'avait pas de délégation de signature de la part du maire pour toutes les matières intéressant le fonctionnement de la régie, qu'il n'assumait pas la préparation du budget, que sa rémunération n'était pas fixée par le conseil municipal, qu'il n'avait pas le pouvoir de nommer ni de révoquer les agents et employés de la régie, que la directrice générale des services occupait une position hiérarchique supérieure à la sienne, que les missions qui lui étaient confiées étaient des missions d'exécution, que sa rémunération était inférieure à celle des emplois de directeur, qu'il aurait dû avoir une voie consultative aux réunions du conseil d'exploitation et pas seulement le statut d'invité et que la relation contractuelle était régie par le droit social privé ;
Vu, enregistré le 18 décembre 2019, le mémoire présenté par le ministre de l'intérieur tendant à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente par le motif que M. A... n'exerçait plus, à la date de départ à la retraite de son prédécesseur, les fonctions de chef d'exploitation mais celles de directeur du service public industriel et commercial, qu'il était identifié par lui-même et par ses interlocuteurs comme le directeur de la régie, qu'il nommait et révoquait les agents et employés de la régie conformément à l'article R. 2221-74 du code général des collectivités territoriales, qu'il participait à la préparation du budget et qu'il supervisait les ventes et achats courants ;
Vu, enregistrées le 8 janvier 2020, les observations complémentaires présentées pour M. A... tendant à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente, par les mêmes motifs que ceux qu'il a développés dans son précédent mémoire ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été communiquée au ministre de la justice qui n'a pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;
Vu la loi 91-647 du 10 juillet 1991, notamment son article 75 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code du tourisme ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B..., membre du Tribunal,
- les observations de la SCP Zribi, Texier pour M. A... ;
- les observations de la SCP Gaschignard pour la commune du Plateau-des- petites roches ;
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;
Considérant que, par un contrat de travail à durée indéterminée, M. A... a été embauché par la commune de Saint-Hilaire du Touvet, aux droits de laquelle vient la commune du Plateau-des-petites roches à compter du 1er octobre 2008, en qualité de chef d'exploitation de la régie municipale des remontées mécaniques ; que, par des arrêtés des 5 janvier et 20 novembre 2009, il a été nommé régisseur de recettes pour la régie ; que, par lettre du 22 décembre 2017, la commune lui a notifié son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; que, le 4 avril 2018, M. A... a saisi, en référé, le conseil de prud'hommes de Grenoble d'une demande de condamnation de la commune au paiement d'indemnités provisionnelles consécutives à son licenciement et de remise sous astreinte de certaines pièces ; que la commune a opposé l'incompétence de la juridiction judiciaire ; que, par une ordonnance du 16 mai 2018, le conseil des prud'hommes a déclaré la juridiction judiciaire compétente pour connaître du litige et accueilli la demande de M. A... ;
Considérant que, le 29 mars 2019, le préfet de l'Isère a déposé un déclinatoire de compétence ; que, par un arrêt du 3 septembre 2019, la cour d'appel de Grenoble, statuant en référé, a rejeté le déclinatoire de compétence et confirmé l'ordonnance du 16 mai 2018 ; que, par un arrêté du 18 septembre 2019, le préfet a élevé le conflit ;
Sur la régularité de l'arrêt du 3 septembre 2019 :
Considérant qu'il résulte de l'article 22 du décret du 27 février 2015 que la juridiction qui rejette le déclinatoire de compétence ne peut statuer sur le litige avant l'expiration du délai de quinze jours laissé au préfet pour, s'il l'estime opportun, élever le conflit ; qu'il s'ensuit que l'arrêt du 3 septembre 2019 doit, en toute hypothèse, être déclaré nul et non avenu en tant qu'il confirme l'ordonnance du 16 mai 2018 en ce qu'elle a condamné la commune de Saint-Hilaire du Touvet à payer à M. A... différentes indemnités provisionnelles et ordonné la remise de différentes pièces ;
Sur la compétence
Considérant que, selon l'article L. 342-13 du code du tourisme, " l'exécution du service des remontées mécaniques et pistes de ski est assurée soit en régie directe, soit en régie par une personne publique sous forme d'un service public industriel et commercial, soit par une entreprise ayant passé à cet effet une convention à durée déterminée avec l'autorité compétente " ; que, eu égard à la nature juridique du service assuré par la régie en cause, les litiges individuels concernant ses agents, à l'exception de l'agent chargé de la direction du service public et de l'agent ayant la qualité de comptable public, relèvent de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire ; que, selon l'article R. 2221-68 du code général des collectivités territoriales : " le directeur assure le fonctionnement des services de la régie. A cet effet : 1° Il prépare le budget ; 2° Il procède, sous l'autorité du maire, aux ventes et aux achats courants, dans les conditions fixées par les statuts ; 3° Il est remplacé, en cas d'absence ou d'empêchement, par un des fonctionnaires ou employés du service, désigné par le maire après avis du conseil d'exploitation " ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats que M. A... a été recruté en qualité de chef d'exploitation, en vue de succéder à compter de février 2009 au directeur de la régie, que le règlement intérieur de la régie prévoyait la nomination de son directeur comme régisseur de recettes, que l'intéressé s'est lui-même prévalu de sa qualité de directeur dans différents documents, qu'il en a exercé les attributions et qu'aucun autre agent n'a été nommé en qualité de directeur de la régie ; qu'il doit ainsi être regardé comme ayant assumé les fonctions de directeur de la régie, sans qu'aient d'incidence les circonstances que son contrat de travail n'ait pas été modifié et fasse, comme ses bulletins de salaire, référence à une convention collective et que la commune ait suivi la procédure de licenciement prévue par le code du travail ; qu'il s'ensuit que M. A... ayant la qualité d'agent public, le litige relève de la compétence de la juridiction administrative ; que c'est dès lors à bon droit que le préfet de l'Isère a élevé le conflit ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... au titre des dispositions de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 18 septembre 2019 par le préfet de l'Isère est confirmé.
Article 2 : Sont déclarées nuls et non avenus la procédure engagée par M. A... contre la commune de Saint-Hilaire du Touvet, aux droits de laquelle vient la commune du Plateau-des-petites-roches, et l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 3 septembre 2019.
Article 3 : La demande présentée par M. A... au titre de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A..., à la commune du Plateau-des-petites-roches, au préfet de l'Isère et au ministre de l'intérieur.