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11/12/2017 | FRANCE | N°C4103

France | France, Tribunal des conflits, 11 décembre 2017, C4103


Vu, enregistrée à son secrétariat le 21 juillet 2017, l'expédition du jugement du 6 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau, saisi d'une requête de la commune de Capbreton, venant aux droits de la société d'aménagement des territoires et d'équipement des Landes (la SATEL) tendant, à la suite de la réalisation de travaux dans le cadre d'une convention d'aménagement conclue avec celle-ci, d'une part, à la condamnation solidaire et conjointe de la société GTM bâtiment Aquitaine, venant aux droits de la société Faure Silva, de la société Colas Sud-Ouest, venant

aux droits de la société Sgreg Sud-Ouest, des sociétés Luc Arsène-...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 21 juillet 2017, l'expédition du jugement du 6 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau, saisi d'une requête de la commune de Capbreton, venant aux droits de la société d'aménagement des territoires et d'équipement des Landes (la SATEL) tendant, à la suite de la réalisation de travaux dans le cadre d'une convention d'aménagement conclue avec celle-ci, d'une part, à la condamnation solidaire et conjointe de la société GTM bâtiment Aquitaine, venant aux droits de la société Faure Silva, de la société Colas Sud-Ouest, venant aux droits de la société Sgreg Sud-Ouest, des sociétés Luc Arsène-Henry et Alain Triaud et Ingerop et du GIE Ceten Apave International, à lui payer la somme de 65 373,66 euros en réparation des préjudices subis sur le fondement des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs du fait de certains désordres et en paiement de frais irrépétibles, d'autre part et à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire et conjointe des sociétés Luc Arsène-Henry et Alain Triaud, et Ingerop au paiement de cette somme en réparation du préjudice subi sur le fondement de leur responsabilité contractuelle du fait de leur manquement à leur obligation de conseil et de frais irrépétibles, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 32 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'ordonnance du 3 octobre 2014, par laquelle le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Dax a décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour statuer sur la demande formée par la société SATEL à l'encontre du cabinet Luc Arsène-Henri et Alain Triaud, de la société GTM Bâtiment Aquitaine, venant aux droits de la société Faure Silva, de la société Colas Sud-Ouest, venant aux droits de la société Sgreg Sud-Ouest, des sociétés Ingerop, BTPS Pays Basque-Adour et Adour Etudes et du GIE Ceten Apave International en paiement de la somme de 65 373,66 euros ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à la commune de Capbreton, aux sociétés GTM bâtiment Aquitaine, Colas Sud-Ouest, Luc Arsène-Henry et Alain Triaud, Ingerop, Adour Etudes, et BTPS Pays basque Adour, au GIE Ceten Apave International et au ministre de la cohésion du territoire qui n'ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Domitille Duval-Arnould, membre du Tribunal,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

Considérant que, le 15 février 2005, la commune de Capbreton a conclu avec la société d'aménagement des territoires et d'équipement des Landes (la SATEL) une convention d'aménagement de son front de mer, comportant, l'acquisition par cette société de terrains situés dans le périmètre de la zone d'aménagement, la réalisation d'infrastructures et d'équipements publics, dont un parc de stationnement souterrain comportant un ouvrage formant brise-lames, et la mise en oeuvre d'un programme immobilier, comprenant notamment une résidence de tourisme, un complexe ludique et de remise en forme et des logements destinés à la vente ou à la location au profit du concessionnaire ; que la SATEL a confié la maîtrise d'oeuvre générale au cabinet Luc Arsène-Henry et Alain Triaud et à M.A..., architectes, ainsi qu'à la société Ingerop ; que le GIE Ceten Apave International a été chargé du contrôle technique de l'opération ; que la société Faure Silva a été chargée de la réalisation des travaux avec les sociétés Sgreg Sud-Ouest, BTPS Pays Basque Adour et Adour Etudes ; que, postérieurement à la réception des travaux, des désordres ont affecté l'ouvrage formant brise-lames du parc de stationnement souterrain ; que la SATEL ayant assigné les constructeurs devant le tribunal de grande instance de Dax afin d'obtenir le paiement d'une somme correspondant au coût des travaux de reprise, le juge de la mise en état de ce tribunal a décliné la compétence de la juridiction judiciaire par une ordonnance du 3 octobre 2004 ; que, saisi par la commune de Capbreton, venant aux droits de la SATEL, d'une demande tendant à la condamnation des constructeurs au versement de la même somme, le tribunal administratif de Pau, estimant que le litige relevait de la compétence de la juridiction judiciaire, a, par un jugement du 6 juillet 2017, sursis à statuer et renvoyé au Tribunal le soin de décider sur la question de compétence en application de l'article 32 du décret du 27 février 2015 ;

Considérant que le titulaire d'une convention conclue avec une collectivité publique pour la réalisation d'une opération d'aménagement ne saurait être regardé comme un mandataire de cette collectivité ; qu'il ne peut en aller autrement que s'il résulte des stipulations qui définissent la mission du cocontractant de la collectivité publique ou d'un ensemble de conditions particulières prévues pour l'exécution de celle-ci, telles que le maintien de la compétence de la collectivité publique pour décider des actes à prendre pour la réalisation de l'opération ou la substitution de la collectivité publique à son cocontractant pour engager des actions contre les personnes avec lesquelles celui-ci a conclu des contrats, que la convention doit en réalité être regardée, en partie ou en totalité, comme un contrat de mandat, par lequel la collectivité publique demande seulement à son cocontractant d'agir en son nom et pour son compte, notamment pour conclure les contrats nécessaires ;

Considérant que, par la convention conclue le 15 février 2015, la commune de Capbreton a chargé la SATEL, de réaliser l'opération d'aménagement décrite ci-dessus ; que ni la définition des missions confiées à la SATEL, ni les conditions prévues pour leur exécution ne permettent de regarder cette convention comme ayant en réalité pour objet de confier à la SATEL le soin d'agir au nom et pour le compte de la commune ; qu'ainsi, les contrats passés par cette société, pour les opérations de construction au sein de la zone d'aménagement, qu'elles aient ou non le caractère d'opérations de travaux publics, sont des contrats de droit privé ; que les litiges nés de leur exécution relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la commune de Capbreton, venant aux droits de la société d'aménagement des territoires et d'équipement des Landes, aux sociétés GTM bâtiment Aquitaine Colas Sud-Ouest, Luc Arsène-Henry et Alain Triaud, Ingerop, Adour Etudes, et BTPS Pays basque Adour et au GIE Ceten Apave International.

Article 2 : L'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Dax en date du 3 octobre 2014 est déclarée nulle et non avenue. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.

Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Pau est déclarée nulle et non avenue à l'exception du jugement rendu par ce tribunal le 6 juillet 2017.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Capbreton, aux sociétés GTM bâtiment Aquitaine, Colas Sud-Ouest, Luc Arsène-Henry et Alain Triaud, Ingerop, Adour Etudes, BTPS Pays basque Adour, au GIE Ceten Apave International, et au ministre de la cohésion du territoire.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C4103
Date de la décision : 11/12/2017
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - CONTRATS - CONTRATS DE DROIT PRIVÉ - CONTRATS CONCLUS ENTRE PERSONNES PRIVÉES - CONTRATS CONCLUS PAR LE TITULAIRE D'UNE CONVENTION D'AMÉNAGEMENT AVEC D'AUTRES ENTREPRISES - NATURE DE LA CONVENTION D'AMÉNAGEMENT - CONTRAT DE MANDAT - ABSENCE - SAUF STIPULATIONS DÉFINISSANT LA MISSION DU COCONTRACTANT OU ENSEMBLE DE CONDITIONS PARTICULIÈRES DONT IL RÉSULTE QUE LA COLLECTIVITÉ PUBLIQUE DEMANDE À SON COCONTRACTANT D'AGIR EN SON NOM ET POUR SON COMPTE - CONSÉQUENCE - NATURE DES CONTRATS CONCLUS AVEC CES AUTRES ENTREPRISES - CONTRATS DE DROIT PRIVÉ - COMPÉTENCE JUDICIAIRE POUR CONNAÎTRE DES LITIGES NÉS DE LEUR EXÉCUTION [RJ1].

17-03-02-03-01-01 Le titulaire d'une convention conclue avec une collectivité publique pour la réalisation d'une opération d'aménagement ne saurait être regardé comme un mandataire de cette collectivité. Il ne peut en aller autrement que s'il résulte des stipulations qui définissent la mission du cocontractant de la collectivité publique ou d'un ensemble de conditions particulières prévues pour l'exécution de celle-ci, telles que le maintien de la compétence de la collectivité publique pour décider des actes à prendre pour la réalisation de l'opération ou la substitution de la collectivité publique à son cocontractant pour engager des actions contre les personnes avec lesquelles celui-ci a conclu des contrats, que la convention doit en réalité être regardée, en partie ou en totalité, comme un contrat de mandat, par lequel la collectivité publique demande seulement à son cocontractant d'agir en son nom et pour son compte, notamment pour conclure les contrats nécessaires.,,,Les contrats passés par le titulaire de la convention pour les opérations de construction au sein de la zone d'aménagement, qu'elles aient ou non le caractère d'opérations de travaux publics sont des contrats de droit privé dès lors que ni la définition des missions confiées au titulaire de la convention d'aménagement, ni les conditions prévues pour leur exécution ne permettent de regarder cette convention comme ayant en réalité pour objet de confier à celui-ci le soin d'agir au nom et pour le compte de la collectivité publique. Par suite, compétence du juge judiciaire pour connaître des litiges nés de leur exécution.

MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF - NATURE DU CONTRAT - CONTRATS N'AYANT PAS UN CARACTÈRE ADMINISTRATIF - CONTRATS PASSÉS ENTRE PERSONNES PRIVÉES - CONTRATS CONCLUS PAR LE TITULAIRE D'UNE CONVENTION D'AMÉNAGEMENT AVEC D'AUTRES ENTREPRISES - NATURE DE LA CONVENTION D'AMÉNAGEMENT - CONTRAT DE MANDAT - ABSENCE - SAUF STIPULATIONS DÉFINISSANT LA MISSION DU COCONTRACTANT OU ENSEMBLE DE CONDITIONS PARTICULIÈRES DONT IL RÉSULTE QUE LA COLLECTIVITÉ PUBLIQUE DEMANDE À SON COCONTRACTANT D'AGIR EN SON NOM ET POUR SON COMPTE - CONSÉQUENCE - NATURE DES CONTRATS CONCLUS AVEC CES AUTRES ENTREPRISES - CONTRATS DE DROIT PRIVÉ - COMPÉTENCE JUDICIAIRE POUR CONNAÎTRE DES LITIGES NÉS DE LEUR EXÉCUTION [RJ1].

39-01-02-02-05 Le titulaire d'une convention conclue avec une collectivité publique pour la réalisation d'une opération d'aménagement ne saurait être regardé comme un mandataire de cette collectivité. Il ne peut en aller autrement que s'il résulte des stipulations qui définissent la mission du cocontractant de la collectivité publique ou d'un ensemble de conditions particulières prévues pour l'exécution de celle-ci, telles que le maintien de la compétence de la collectivité publique pour décider des actes à prendre pour la réalisation de l'opération ou la substitution de la collectivité publique à son cocontractant pour engager des actions contre les personnes avec lesquelles celui-ci a conclu des contrats, que la convention doit en réalité être regardée, en partie ou en totalité, comme un contrat de mandat, par lequel la collectivité publique demande seulement à son cocontractant d'agir en son nom et pour son compte, notamment pour conclure les contrats nécessaires.,,,Les contrats passés par le titulaire de la convention pour les opérations de construction au sein de la zone d'aménagement, qu'elles aient ou non le caractère d'opérations de travaux publics sont des contrats de droit privé dès lors que ni la définition des missions confiées au titulaire de la convention d'aménagement, ni les conditions prévues pour leur exécution ne permettent de regarder cette convention comme ayant en réalité pour objet de confier à celui-ci le soin d'agir au nom et pour le compte de la collectivité publique.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - PROCÉDURES D'INTERVENTION FONCIÈRE - OPÉRATIONS D'AMÉNAGEMENT URBAIN - CARACTÈRE DE MANDAT D'UNE CONVENTION D'AMÉNAGEMENT - ABSENCE - SAUF STIPULATIONS DÉFINISSANT LA MISSION DU COCONTRACTANT OU ENSEMBLE DE CONDITIONS PARTICULIÈRES DONT IL RÉSULTE QUE LA COLLECTIVITÉ DEMANDE À SON COCONTRACTANT D'AGIR EN SON NOM ET POUR SON COMPTE - CONSÉQUENCE - NATURE DES CONTRATS PASSÉS ENTRE L'AMÉNAGEUR ET LE MAÎTRE D'OEUVRE - CONTRATS DE DROIT PRIVÉ [RJ1].

68-02-02 Le titulaire d'une convention conclue avec une collectivité publique pour la réalisation d'une opération d'aménagement ne saurait être regardé comme un mandataire de cette collectivité. Il ne peut en aller autrement que s'il résulte des stipulations qui définissent la mission du cocontractant de la collectivité publique ou d'un ensemble de conditions particulières prévues pour l'exécution de celle-ci, telles que le maintien de la compétence de la collectivité publique pour décider des actes à prendre pour la réalisation de l'opération ou la substitution de la collectivité publique à son cocontractant pour engager des actions contre les personnes avec lesquelles celui-ci a conclu des contrats, que la convention doit en réalité être regardée, en partie ou en totalité, comme un contrat de mandat, par lequel la collectivité publique demande seulement à son cocontractant d'agir en son nom et pour son compte, notamment pour conclure les contrats nécessaires.,,,Les contrats passés par le titulaire de la convention pour les opérations de construction au sein de la zone d'aménagement, qu'elles aient ou non le caractère d'opérations de travaux publics sont des contrats de droit privé dès lors que ni la définition des missions confiées au titulaire de la convention d'aménagement, ni les conditions prévues pour leur exécution ne permettent de regarder cette convention comme ayant en réalité pour objet de confier à celui-ci le soin d'agir au nom et pour le compte de la collectivité publique.


Références :

[RJ1]

Rappr. TC, 9 juillet 2012, Compagnie générale des eaux c/ Min. de l'écologie, du développement durable, n° 3834, T. pp. 653-840 ;

CE, 17 juin 2009, Société anonyme d'économie mixte nationale (SAEMN) Bibracte, n° 297509, T. pp. 667-825 ;

CE, 11 mars 2011, Communauté d'agglomération du Grand Toulouse et SEM de Colomiers, n° 330722, T. pp. 843-1003-1093.

Cf. TC, 15 octobre 2012, SARL Port Croisade c/ SA Seeta, Société Tecs et Société Hydratec, ministère de l'écologie, n° 3853, T. pp. 653-840-1014. Comp. TC, 7 juillet 1975, Commune d'Agde, n° 02013, p. 797 ;

CE, Section, 30 mai 1975, Société d'équipement de la Région Montpelliéraine, n° 86738, p. 326.


Composition du Tribunal
Président : M. Maunand
Rapporteur ?: Mme Domitille Duval-Arnould
Rapporteur public ?: M. Daumas

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2017:C4103
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