N° 4060 __________
Conflit sur renvoi du tribunal administratif de Melun
Agence Pena et Pena c/ M. A. et Mme B. __________
M. Alain Ménéménis Rapporteur __________
M. Michel Girard Rapporteur public __________
Séance du 4 juillet 2016 Lecture du 4 juillet 2016 __________
LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Vu l'expédition du jugement du 29 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Melun, saisi d'une demande de l'agence Pena et Pena tendant à la fixation d'une nouvelle répartition des honoraires au sein du groupement conjoint qu'elle a formé avec l'agence A.-B. pour l'exécution d'un marché public de maîtrise d'oeuvre conclu avec la commune de Vincennes, à la condamnation solidaire de M. Bernard A. et Mme Annick B. au paiement de la somme de 246 479,70 euros au titre des honoraires qui lui sont dus et de la somme de 5 195,14 euros au titre des frais d'expertise, ainsi qu'à ce que soit mise à leur charge la somme de 10 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 32 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;
Vu l'ordonnance du 24 avril 2013 par lequel le tribunal de grande instance de Paris s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande de désignation d'un expert ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été notifiée à M. A., à Mme B., à l'agence Pena et Pena, au ministre de l'intérieur ainsi qu'au ministre des finances et des comptes publics, qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alain Ménéménis, membre du Tribunal, - les conclusions de M. Michel Girard, rapporteur public ;
Considérant que la commune de Vincennes a conclu, le 29 mai 2009, pour la réalisation d'un projet d'aménagement urbain, un marché public de maîtrise d'¿uvre, notamment avec l'agence A.-B. et l'agence Pena et Pena, qui avaient formé un groupement conjoint dont la première était le mandataire ; que l'acte d'engagement répartit les éléments de mission et les honoraires entre les deux agences ; qu'après que le programme prévisionnel des travaux a été modifié, ce contrat a fait l'objet d'un avenant le 8 mars 2011, qui fixe le montant définitif de la rémunération globale et définit une nouvelle répartition des tâches et des honoraires ; qu'estimant que le montant de ses honoraires ne correspondait ni à la réalité des tâches accomplies par elle ni à l'engagement qu'avaient pris les deux agences, lors de la signature de la convention de groupement conjoint, de se répartir équitablement les honoraires, l'agence Pena et Pena a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris d'une demande d'expertise ; que, par une ordonnance du 24 avril 2013, ce juge a décliné sa compétence ; que, par une ordonnance du 3 septembre 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a ordonné l'expertise sollicitée et désigné un expert, qui a remis son rapport le 9 janvier 2015 ; que l'agence Pena et Pena a alors demandé au tribunal administratif de Melun de fixer une nouvelle répartition des honoraires entre les deux agences et de condamner solidairement M. A. et Mme B. à lui verser une somme d'environ 250 000 euros ainsi que les frais d'expertise ; que, par un jugement du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Melun s'est déclaré incompétent et a saisi le Tribunal de la question de compétence en application de l'article 32 du décret du 27 février 2015 ;
Considérant que, par l'ordonnance devenue définitive du 24 avril 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris doit être regardé comme ayant décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître du litige qui oppose les agences A.-B. et Pena et Pena pour la détermination de leurs rémunérations respectives ; qu'ainsi, la saisine du Tribunal est régulière, dès lors qu'il y a identité de litige, alors même que la juridiction d'un ordre a statué en référé et que la juridiction de l'autre ordre s'est prononcée, par le jugement du 29 mars 2016, au principal ;
Considérant que le litige engagé par l'agence Pena et Pena n'est pas dirigé contre la commune et n'a pas pour objet l'indemnisation d'un dommage lié à l'opération de travaux publics elle-même ; qu'ainsi qu'il a été dit, il tend seulement à ce que M. A. et Mme B. lui reversent une partie des honoraires qui leur ont été payés en application des clauses du marché, conformément à ce qu'a été, selon elle, le partage effectif des tâches et à l'engagement pris l'une envers l'autre par les deux agences sur la répartition des honoraires ; qu'un tel litige ne met en cause que des relations de droit privé ; qu'il appartient, dès lors, à la juridiction judiciaire d'en connaître ;
D E C I D E :
Article 1er : La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant l'agence Pena et Pena à M. A. et Mme B.
Article 2 : L'ordonnance du 3 septembre 2013 par laquelle le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a décliné la compétence de la juridiction judiciaire est déclarée nul et non avenue.
Article 3 : La cause et les parties sont renvoyées devant le tribunal de grande instance de Paris.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'agence Pena et Pena, à M. Bernard A., à Mme Annick B. et au ministre des finances et des comptes publics.