N° 3971
Conflit sur renvoi du tribunal administratif de Nice Commune de Falicon c/ M. Pierre-Louis X...
M. Rémy Schwartz Rapporteur
M. Frédéric Desportes Commissaire du gouvernement
Séance du 17 novembre 2014 Lecture du 8 décembre 2014
LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Vu l'expédition du jugement du 1er juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice, saisi d'une demande de la commune de Falicon tendant à ordonner à MM. Pierre-Louis et Antoine X... et à tous occupants de leur chef de libérer le domaine public communal occupé sans titre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de la compétence ;
Vu l'ordonnance du 5 octobre 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice s'est déclaré incompétent pour connaître de ce litige ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été notifiée à MM. Pierre-Louis et Antoine X..., à la commune de Falicon et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié, notamment son article 34 ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques, notamment les articles L. 2111-1, L. 2111-2 et L. 2111-14 ;
Vu le code de la voirie routière, notamment l'article L. 116-1 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Rémy Schwartz, membre du Tribunal, - les conclusions de M. Frédéric Desportes, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la commune de Falicon (Alpes-Maritimes) a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice afin d'obtenir l'expulsion de MM. Pierre-Louis et Antoine X... d'un local qu'ils occupent sans titre, situé dans le mur de soutènement de la place de l'Eglise ; que par ordonnance du 5 octobre 2010, le juge des référés a estimé que ce local relevait du domaine public communal et a, pour ce motif, décliné sa compétence ; que saisi ensuite par la commune de Falicon, le tribunal administratif de Nice a estimé que le local relevait du domaine public routier de la commune, qu'il était donc incompétent pour connaître d'un litige portant sur l'évacuation de ce local et, compte tenu de l'ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Nice, a sursis à statuer et renvoyé au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence, en application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques : "Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public" ; qu'aux termes de l'article L. 2111-2 de ce code : "Font également partie du domaine public les biens des personnes publiques mentionnées à l'article L. 1 qui, concourant à l'utilisation d'un bien appartenant au domaine public, en constituent un accessoire indissociable." ; qu'aux termes de l'article L. 2111-14 : "Le domaine public routier comprend l'ensemble des biens appartenant à une personne publique mentionnée à l'article L. 1 et affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l'exception des voies ferrées" ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 116-1 du code de la voirie routière : "La répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier est poursuivie devant la juridiction judiciaire sous réserve des questions préjudicielles relevant de la compétence de la juridiction administrative" ;
Considérant, d'une part, que la place de l'Eglise de la commune de Falicon, propriété de cette commune, est ouverte à la circulation publique et est pour partie aménagée en parc de stationnement ; qu'elle fait ainsi partie du domaine public routier communal en application de l'article L. 2111-14 du code général de la propriété des personnes publiques ; que le mur de soutènement de cette place, situé sur un terrain communal, en constitue un accessoire indissociable et, par suite, fait partie, en application des dispositions précitées de l'article L. 2111-2 de ce code, du domaine public routier de la commune ; que les locaux aménagés au sein de ce mur de soutènement, dont le local occupé sans titre par MM. Pierre-Louis et Antoine X..., relèvent donc de ce domaine ; que, d'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 116-1 du code de la voirie routière que l'expulsion des occupants sans titre de dépendances du domaine public routier ressortit à la compétence des juridictions judiciaires ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il appartient à la juridiction judiciaire de connaître de la demande de la commune de Falicon tendant à l'expulsion de MM. X... du local qu'ils occupent sans titre dans le mur de soutènement de la place de l'Eglise ;
DE C I D E :
Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la commune de Falicon à MM. Pierre-Louis et Antoine X....
Article 2 : L'ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Nice du 5 octobre 2010 est déclarée nulle et non avenue. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.
Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Nice est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu par ce tribunal le 1er juillet 2014.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Falicon, à MM. Pierre-Louis et Antoine X... et au garde des sceaux, ministre de la justice.