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09/07/2012 | FRANCE | N°C3861

France | France, Tribunal des conflits, 09 juillet 2012, C3861


Vu, enregistrée à son secrétariat le 1er décembre 2011, l'expédition du jugement du 22 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Grenoble, saisi d'une demande de M. Jean-Claude A...-, Paul Aygat, André Bernard, Bernard Buffet, Daniel Christin, Raymond Christin, Alexandre Depotex, Daniel Depotex, Hervé Depotex, Henri Forestier, Jean-Marie Girard-Berthet, Michel Girard-Berthet, Pascal Girard-Berthet, Sébastien Girard-Berthet, Denis Grivel, Jean-Michel Grivel, Daniel Peillex et Guy Peillex tendant à l'annulation des dispositions du statut et du règlement intérieur de l'asso

ciation communale de chasse agréée d'Abondance (Haute-Savo...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 1er décembre 2011, l'expédition du jugement du 22 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Grenoble, saisi d'une demande de M. Jean-Claude A...-, Paul Aygat, André Bernard, Bernard Buffet, Daniel Christin, Raymond Christin, Alexandre Depotex, Daniel Depotex, Hervé Depotex, Henri Forestier, Jean-Marie Girard-Berthet, Michel Girard-Berthet, Pascal Girard-Berthet, Sébastien Girard-Berthet, Denis Grivel, Jean-Michel Grivel, Daniel Peillex et Guy Peillex tendant à l'annulation des dispositions du statut et du règlement intérieur de l'association communale de chasse agréée d'Abondance (Haute-Savoie) relatives aux cotisations exigées de ses membres, telles qu'issues de son assemblée générale du 4 juillet 2004, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'arrêt du 6 mars 2007 par lequel la cour d'appel de Chambéry a déclaré la juridiction judiciaire incompétente pour connaître du litige ;

Vu, enregistré le 16 janvier 2012, le mémoire présenté pour l'association communale de chasse agréée d'Abondance, qui conclut à la compétence de la juridiction administrative et à ce que soit mise à la charge de MM. A...et autres la somme de 5.000 euros au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ; elle soutient que les associations communales de chasse agréées sont des organismes privés chargés d'un service public ; que leurs statuts et leur règlement intérieur doit comporter les dispositions prévues par la loi, qui sont ainsi d'ordre public ; qu'en adoptant leurs statuts et leur règlement intérieur, les associations communales de chasse agréées se placent dans un régime exorbitant du droit commun et font usage de prérogatives de puissance publique ; que ces statuts et ce règlement intérieur doivent être approuvés par l'autorité administrative ; que le litige relève ainsi de la compétence de la juridiction administrative ;

Vu, enregistré le 13 février 2012, le mémoire présenté par MM. A...et les autres requérants, qui déclarent s'en remettre à la sagesse du Tribunal ;

Vu, enregistré le 22 février 2012, le mémoire présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, qui conclut à la compétence de la juridiction judiciaire ; il soutient que le litige, qui a trait, pour l'essentiel, à la fixation du montant des cotisations exigées par l'association communale de chasse agréée d'Abondance, concerne le fonctionnement interne de cette association et relève ainsi de la compétence de la juridiction judiciaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 91-640 du 10 juillet 1991, notamment son article 75-I ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Edmond Honorat, membre du Tribunal,

- les observations de Maître Ricard pour l'Association communale de chasse agréée d'Abondance,

- les conclusions de M. Didier Boccon-Gibod, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 422-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur, les associations communales et intercommunales de chasse agréées par le préfet, et placées sous sa tutelle, " ont pour but d'assurer une bonne organisation technique de la chasse. Elles favorisent sur leur territoire le développement du gibier et de la faune sauvage dans le respect d'un véritable équilibre agro-sylvo-cynégétique, l'éducation cynégétique de leurs membres, la régulation des animaux nuisibles et veillent au respect des plans de chasse. Elles ont également pour objet d'apporter la contribution des chasseurs à la conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvages (...) " ; qu'en vertu des articles L. 422-8 et L. 422-9 du même code, les propriétaires ou détenteurs de droits de chasse sont tenus de faire apport de leurs terrains aux associations communales de chasse agréées, sous les réserves prévues à l'article L. 422-10 ; qu'aux termes de l'article L. 422-10 : " L'association communale est constituée sur les terrains autres que ceux :/ 1° Situés dans un rayon de 150 mètres autour de toute habitation ;/ 2° Entourés d'une clôture (...) ;/ 3° Ayant fait l'objet de l'opposition des propriétaires ou détenteurs de droits de chasse sur des superficies d'un seul tenant supérieures aux superficies minimales mentionnées à l'article L. 422-13 ;/ 4° Faisant partie du domaine public de l'Etat, des départements et des communes, des forêts domaniales ou des emprises de Réseau ferré de France et de la Société nationale des chemins de fer français ;/ 5° Ayant fait l'objet de l'opposition de propriétaires, de l'unanimité des copropriétaires indivis qui, au nom de convictions personnelles opposées à la pratique de la chasse, interdisent, y compris pour eux-mêmes, l'exercice de la chasse sur leurs biens, sans préjudice des conséquences liées à la responsabilité du propriétaire, notamment pour les dégâts qui pourraient être causés par le gibier provenant de ses fonds " ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les associations communales de chasse agréées sont des organismes de droit privé chargés d'un service public ; que, dès lors, les décisions qu'elles prennent dans le cadre de leur mission de service public et qui manifestent l'exercice de prérogatives de puissance publique constituent des actes administratifs susceptibles d'être déférés à la juridiction administrative ; qu'il en va notamment ainsi des décisions fixant le montant des cotisations dues par leurs adhérents, en raison des apports de droits de chasse imposés à ces derniers, sous les réserves prévues à l'article L. 422-10 du code de l'environnement, et du paiement des cotisations statutaires qui en découle ;

Considérant que le litige qui oppose M. A...- et les autres requérants à l'association communale de chasse agréée d'Abondance (Haute-Savoie) a trait au montant des cotisations dues par les adhérents de cette association à la suite de la modification des statuts et du règlement intérieur de cette association ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'un tel litige relève de la compétence de la juridiction administrative ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de M. A...- et des autres requérants la somme que demande l'association communale de chasse agréée d'Abondance au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La juridiction administrative est compétente pour connaître du litige qui oppose M. Jean-Claude A...- et les autres requérants à l'association communale de chasse agréée d'Abondance.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 22 novembre 2011 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.

Article 3 : La procédure suivie devant la cour d'appel de Chambéry est déclarée nulle et non avenue, à l'exception de l'arrêt rendu le 6 mars 2007.

Article 4 : Les conclusions de l'association communale de chasse agréée d'Abondance tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3861
Date de la décision : 09/07/2012
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - ACTES - ACTES ADMINISTRATIFS - DÉCISIONS PRISES PAR LES ACCA POUR FIXER LE MONTANT DES COTISATIONS DUES PAR LEURS ADHÉRENTS [RJ1].

17-03-02-005-01 Les associations communales de chasse agréées (ACCA) sont des organismes de droit privé chargés d'un service public. Dès lors, les décisions qu'elles prennent dans le cadre de leur mission de service public et qui manifestent l'exercice de prérogatives de puissance publique, notamment les décisions fixant le montant des cotisations dues par leurs adhérents, constituent des actes administratifs susceptibles d'être déférés à la juridiction administrative.

NATURE ET ENVIRONNEMENT - DÉCISIONS FIXANT LE MONTANT DES COTISATIONS DUES PAR LEURS ADHÉRENTS - ACTES ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ÊTRE DÉFÉRÉS À LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - EXISTENCE.

44-046-04 Les ACCA sont des organismes de droit privé chargés d'un service public. Dès lors, les décisions qu'elles prennent dans le cadre de leur mission de service public et qui manifestent l'exercice de prérogatives de puissance publique, notamment les décisions fixant le montant des cotisations dues par leurs adhérents, constituent des actes administratifs susceptibles d'être déférés à la juridiction administrative.


Références :

[RJ1]

Cf. TC, 24 octobre 2001, M. Bouchot-Plainchant c/ Fédération départementale des chasseurs de l'Allier, n° 3190, p. 746.

Rappr. CE, 30 novembre 1977, Association des chasseurs de Noyant-en-Touraine, n° 92276, p. 467 ;

Cass. civ. 1ère, 31 janvier 1995, Bull. civ. I, n° 66. Comp., pour les actes qui n'impliquent pas la mise en oeuvre de prérogatives de puissance publique et relèvent donc, en principe, des juridictions judiciaires, Cass. civ. 1ère, 26 janvier 1982, Bull. civ. I, n° 44.


Composition du Tribunal
Président : M. Gallet
Rapporteur ?: M. Edmond Honorat
Rapporteur public ?: M. Boccon-Gibod

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2012:C3861
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