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14/11/2011 | FRANCE | N°T1103821

France | France, Tribunal des conflits, 14 novembre 2011, T1103821


N° 3821

Conflit sur renvoi du tribunal administratif de Rouen

M. Dominique X... c/ Maison de retraite " Résidence Albert Jean "
Séance du 17 octobre 2011 Lecture du 14 novembre 2011

LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Vu l'expédition du jugement du 20 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Rouen, saisi d'une demande de M. X... tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 19 juin 2006 par laquelle la maison de retraite " Résidence Albert Jean " a procédé à son licenciement pour " fin de contrat emploi consolidé " et, d'autre part, à

la condamnation de la maison de retraite " Résidence Albert Jean " au versement de ...

N° 3821

Conflit sur renvoi du tribunal administratif de Rouen

M. Dominique X... c/ Maison de retraite " Résidence Albert Jean "
Séance du 17 octobre 2011 Lecture du 14 novembre 2011

LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Vu l'expédition du jugement du 20 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Rouen, saisi d'une demande de M. X... tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 19 juin 2006 par laquelle la maison de retraite " Résidence Albert Jean " a procédé à son licenciement pour " fin de contrat emploi consolidé " et, d'autre part, à la condamnation de la maison de retraite " Résidence Albert Jean " au versement de diverses indemnités à raison de son licenciement, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de la compétence ;
Vu le jugement en date du 20 septembre 2007 par lequel le conseil de prud'hommes de Dieppe a décidé que le litige opposant M. X... à la maison de retraite « Résidence Albert Jean » ne relevait pas de sa compétence ;
Vu les pièces du dossier dont il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été notifiée à M. X..., à la maison de retraite " Résidence Albert Jean " et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu le code du travail ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christian Vigouroux, membre du Tribunal,- les conclusions de M. Didier Boccon-Gibod, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la maison de retraite " Résidence Albert Jean " a engagé M. X... à compter du 1er avril 2002 par un contrat emploi solidarité pour une durée d'un an, suivi d'un contrat emploi consolidé conclu pour la même durée et renouvelé deux fois jusqu'au 31 mars 2006 ; que M. X... ayant continué d'exercer ses fonctions en avril, mai et juin 2006, la maison de retraite " Résidence Albert Jean " a mis fin à celles-ci et lui a adressé le 19 juin 2006 une attestation destinée à son indemnisation pour perte d'emploi ; que, le 18 septembre 2006, M. X... a saisi le conseil des prud'hommes de Dieppe d'une action tendant à la requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée et à la condamnation de la maison de retraite " Résidence Albert Jean " au paiement de diverses indemnités suite à son licenciement ; que le conseil de prud'hommes a décidé qu'il n'était pas compétent pour connaître du litige opposant M. X... à la maison de retraite " Résidence Albert Jean " ; que, saisi par M. X... d'une demande tendant à l'annulation de la décision de licenciement du 19 juin 2006 et à la condamnation au paiement de diverses indemnités, le tribunal administratif de Rouen, par un jugement en date du 20 avril 2011, s'est à son tour déclaré incompétent pour connaître du litige et a renvoyé la question de compétence au Tribunal en application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 ;
Considérant qu'aux termes des articles L. 322-4-8 et L. 322-4-8-1 du code du travail alors applicables les contrats emploi solidarité et emploi consolidé sont des contrats de droit privé ; qu'en conséquence, les litiges nés à propos de la conclusion, de l'exécution, de la rupture ou de l'échéance de ces contrats relèvent en principe de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, même si l'employeur est une personne publique gérant un service public administratif ;
Considérant toutefois que, d'une part, dans le cas où la contestation met en cause la légalité de la convention passée entre l'Etat et l'employeur, la juridiction administrative est seule compétente pour se prononcer sur la question préjudicielle ainsi soulevée ; que, d'autre part, le juge administratif est également seul compétent pour tirer les conséquences d'une éventuelle requalification d'un contrat, soit lorsque celui-ci n'entre en réalité pas dans le champ des catégories d'emplois, d'employeurs ou de salariés visées aux articles L. 322-4-7, L. 322-4-8 et L. 322-4-8-1 du code du travail soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un autre motif, a pour conséquence non la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat mais la poursuite d'une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif, au-delà du terme du ou des contrats relevant de la compétence du juge judiciaire ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terme du dernier contrat emploi consolidé de M. X... expirait le 31 mars 2006 ; que M. X... a continué d'exercer ses fonctions pour le compte de la maison de retraite " Résidence Albert Jean " pendant les mois d'avril, mai et juin 2006 ; que, pour cette période, la relation de travail établie entre les parties avait cessé d'être régie par les dispositions de [l'article] L. 322-4-8-1 du code du travail ; que le juge administratif est seul compétent pour statuer sur la demande de requalification de la nouvelle relation contractuelle, lorsque celle-ci s'est poursuivie avec la personne morale de droit public au-delà du terme du contrat emploi consolidé ainsi que sur les conséquences de la rupture survenue après cette échéance ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le litige qui oppose M. X... à la maison de retraite " Résidence Albert Jean " relève des juridictions de l'ordre administratif ;
D E C I D E :
Article 1 : La juridiction de l'ordre administratif est compétente pour connaître du litige opposant M. X... à la maison de retraite « Résidence Albert Jean ».
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen en date du 20 avril 2011 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : T1103821
Date de la décision : 14/11/2011

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Exclusion - Cas - Litige relatif à un contrat administratif - Contrat administratif - Définition - Relation contractuelle poursuivie avec une personne de droit public au-delà du terme d'un contrat emploi-consolidé - Portée

Les litiges nés à propos de la conclusion, de l'exécution, de la rupture ou de l'échéance des contrats emploi solidarité et emploi consolidé relèvent en principe de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, même si l'employeur est une personne publique gérant un service public administratif. Toutefois, le juge administratif est seul compétent pour tirer les conséquences d'une éventuelle requalification d'un contrat, soit lorsque celui-ci n'entre pas dans le champ des catégories d'emplois, d'employeurs ou de salariés visées aux articles L. 322-4-7, L. 322-4-8 et L. 322-4-8-1 du code du travail, soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un autre motif, a pour conséquence non la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat mais la poursuite d'une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif, au-delà du terme du ou des contrats relevant de la compétence du juge judiciaire. Ainsi, pour la période pendant laquelle l'employé d'un établissement public a continué d'exercer ses fonctions pendant trois mois après l'expiration du terme de son dernier contrat emploi consolidé, la relation de travail établie entre les parties a cessé d'être régie par les dispositions de l'article L. 322-4-8-1 du code du travail. Le juge administratif est donc seul compétent pour statuer sur la demande de requalification de la nouvelle relation contractuelle poursuivie avec la personne morale de droit public au-delà du terme du contrat emploi consolidé ainsi que sur les conséquences de la rupture survenue après cette échéance


Références :

loi des 16-24 août 1790

décret du 16 fructidor an III

loi du 24 mai 1872

décret du 26 octobre 1849 modifié

code du travail

Décision attaquée : Tribunal administratif de Rouen, 20 avril 2011

Sur la compétence du juge administratif pour statuer sur la demande de requalification de la relation contractuelle poursuivie avec la personne de droit public au-delà du terme d'un contrat emploi jeune, ainsi que sur les conséquences de la rupture survenue après cette échéance, dans le même sens que :Soc., 13 octobre 2010, pourvoi n° 09-40830, Bull. 2010, V, n° 231 (cassation sans renvoi)


Composition du Tribunal
Président : M. Gallet
Avocat général : M. Boccon-Gibod (commissaire du gouvernement)
Rapporteur ?: M. Vigouroux

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2011:T1103821
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