Vu, enregistrée à son secrétariat le 10 mai 2010, l'expédition du jugement du 7 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, saisi d'une demande de la société " Mona Parfums Holding " tendant à la condamnation de la société " Centre départemental de télésurveillance sécurité " (CDT Sécurité) à lui verser la somme de 77.495 euros en réparation du préjudice que lui a causé la défaillance du service de télésurveillance assuré par cette société pour le compte de la commune de Perpignan (Pyrénées-Orientales) dans la nuit du 4 au 5 février 2007, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de la compétence ;
Vu le jugement du 24 mars 2009 par lequel le tribunal de commerce de Perpignan a déclaré la juridiction judiciaire incompétente pour connaître du litige ;
Vu, enregistré le 19 juillet 2010, le mémoire présenté pour la commune de Perpignan, qui conclut à la compétence de la juridiction judiciaire et à ce que soit mis à la charge de la société " Mona Parfums Holding " le versement de la somme de 2.500 euros en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, au motif que le litige introduit par la société " Mona Parfums Holding " se rapporte à la situation d'un usager d'un service public industriel et commercial et relève, par conséquent, de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, conformément à la jurisprudence constante du Tribunal ; que le litige opposant la société CDT-Sécurité, titulaire du marché public passé par la commune, à son sous-traitant, la société " Patrouille privée 66 ", relève également de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;
Vu les pièces dont il résulte que la saisine du Tribunal a été communiquée à la société " Mona Parfums Holding ", à la société " Centre départemental de télésurveillance sécurité " (CDT-Sécurité), à Me Pierre-Jean A, en sa qualité de liquidateur de la société " Patrouille privée 66 ", et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, qui n'ont pas produit d'observations ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Edmond Honorat, membre du Tribunal,
- les observations de la SCP Delaporte-Briard-Trichet, pour la commune de Perpignan,
- les conclusions de M. Jean-Dominique Sarcelet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société " Mona Parfums Holding " a souscrit auprès de la commune de Perpignan, à compter du 1er octobre 2000, un contrat d'abonnement au système de télésurveillance d'habitations et de commerces mis en place par la commune sur son territoire ; que, par un marché public notifié le 2 août 2006, la commune de Perpignan a confié à la société " Centre départemental de télésurveillance sécurité " (CDT-Sécurité) le soin d'assurer, à compter du 1er octobre 2006, ce service en ce qui concerne une partie des nuits et le dimanche ; que la société " Mona Parfums Holding " a recherché devant le tribunal de commerce de Perpignan la responsabilité de la société CDT-Sécurité du fait de négligences commises dans l'accomplissement de sa mission de surveillance lors du déclenchement de l'alarme survenu le 5 février 2007 dans des locaux appartenant à Mona Parfums Holding et couverts par le contrat d'abonnement ; que la société CDT-Sécurité a appelé en garantie Me A, liquidateur de la société à laquelle elle avait sous-traité les prestations de surveillance en cause ; que, par un jugement du 24 mars 2009, devenu définitif, le tribunal de commerce de Perpignan a décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de ce litige ; que, saisi à son tour de ces conclusions, le tribunal administratif de Montpellier, par un jugement du 7 mai 2010, a décliné la compétence de la juridiction administrative et saisi le Tribunal en application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 ;
Considérant, d'une part, que le service de télésurveillance et de téléassistance exploité par la commune de Perpignan, qui a pour objet la retransmission d'informations dans le but d'assurer la sécurité de locaux privés, constitue un service public industriel et commercial ; que les liens existant entre les services publics industriels et commerciaux et leurs usagers étant de droit privé, les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour connaître des dommages causés à un usager du service par une personne privée participant, en qualité de titulaire d'un marché public de services, à l'exécution de ce service ;
Considérant, d'autre part, que l'action en garantie formée par l'entreprise titulaire d'un marché public contre son sous-traitant, qui trouve son origine dans le contrat de droit privé liant ces deux parties, relève aussi de la compétence de la juridiction judiciaire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la juridiction judiciaire est seule compétente pour connaître du litige qui oppose la société " Mona Parfums Holding " à la société CDT-Sécurité et celle-ci à Me A, en sa qualité de liquidateur de la société " Patrouille privée 66 " ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Perpignan sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
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Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la société " Mona Parfums Holding " à la société CDT Sécurité et celle-ci à Me A, en sa qualité de liquidateur de la société " Patrouille privée 66 ".
Article 2 : Le jugement du tribunal de commerce de Perpignan en date du 24 mars 2009 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.
Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Montpellier est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement du 7 mai 2010.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Perpignan tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui est chargé d'en assurer l'exécution.