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15/12/2008 | FRANCE | N°T0803673

France | France, Tribunal des conflits, 15 décembre 2008, T0803673


N° 3673
Conflit positif M. X... c / Préfet du Val-de-Marne

LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Vu la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. X... au ministre de l'intérieur, de l'Outre-mer et des collectivités territoriales devant le tribunal d'instance de Saint-Maur-des-Fossés ;
Vu le déclinatoire, présenté le 29 novembre 2006 par le préfet du Val-de-Marne, tendant à voir déclarer la juridiction judiciaire incompétente par les motifs que la voie de fait administrative ne peut résulter

que d'une décision ou d'une action portant atteinte à la liberté individuel...

N° 3673
Conflit positif M. X... c / Préfet du Val-de-Marne

LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Vu la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. X... au ministre de l'intérieur, de l'Outre-mer et des collectivités territoriales devant le tribunal d'instance de Saint-Maur-des-Fossés ;
Vu le déclinatoire, présenté le 29 novembre 2006 par le préfet du Val-de-Marne, tendant à voir déclarer la juridiction judiciaire incompétente par les motifs que la voie de fait administrative ne peut résulter que d'une décision ou d'une action portant atteinte à la liberté individuelle ou à la propriété privée, manifestement insusceptible de se rattacher à l'exercice d'un pouvoir appartenant à l'administration ; que la décision de détruire le véhicule de M. X... n'est pas constitutive d'une voie de fait dès lors qu'elle n'est que la conséquence de l'application stricte des dispositions du code de la route et notamment de ses articles L. 325-7 et R. 325-32 ; que l'action relève de la compétence du juge administratif lorsqu'elle tend à la réparation des dommages imputés au fait de l'autorité administrative à qui le véhicule a été remis en exécution d'une décision de l'officier de police judiciaire ; que le juge administratif est compétent pour connaître d'une action en responsabilité introduite pour obtenir l'indemnisation du préjudice causé par sa destruction en application du dernier alinéa de l'article L. 325-7 du code de la route ; qu'en tout état de cause, à la supposer établie, l'illégalité d'une décision administrative ne suffit pas à faire assimiler cette décision à une voie de fait ;
Vu le jugement du 30 avril 2007 par lequel le tribunal d'instance de Saint-Maur-des-Fossés a rejeté le déclinatoire de compétence du préfet du Val-de-Marne et a sursis à statuer sur le fond ;
Vu l'arrêté du 21 mai 2007 par lequel le préfet du Val-de-Marne a élevé le conflit ;
Vu les observations présentées par M. X... tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire compétente par les motifs que l'arrêté de conflit n'a pas été déposé au greffe du tribunal d'instance dans le délai de quinzaine ; que la destruction de son véhicule constitue une voie de fait dès lors qu'elle s'analyse comme l'exécution forcée irrégulière, faute de notification à la bonne adresse, d'une décision même régulière ;
Vu le mémoire présenté par le ministre de l'intérieur, de l'Outre-mer et des collectivités territoriales tendant à la confirmation de l'arrêté de conflit par les motifs qu'en vertu d'une jurisprudence constante, les actions en responsabilité relatives aux opérations de fourrière relèvent de la juridiction administrative lorsqu'elles tendent à la réparation de dommages imputés au fait de l'autorité administrative à qui le véhicule a été remis en exécution de la décision de l'officier de police judiciaire ; qu'en l'espèce, le présent litige ne porte pas sur les conditions dans lesquelles le véhicule de M. X... a été mis en fourrière, question dont aurait eu à connaître le juge judiciaire, mais sur les conditions dans lesquelles s'est déroulée la destruction de ce véhicule ; que contrairement à ce que soutient le requérant, la destruction de son véhicule par les services de police n'est pas constitutive d'une voie de fait ; qu'il ressort en effet des pièces du dossier que M. X... n'est pas allé récupérer son véhicule dans le délai prévu à l'article L. 325-7 du code de la route au terme duquel les véhicules mis en fourrière sont réputés abandonnés par leur propriétaire et livrés à la destruction ; que si M. X... soutient que le courrier qui lui a été adressé pour lui notifier cette mise en fourrière a été envoyé à une mauvaise adresse, le fait que son beau-frère ait contacté le service de police verbalisateur et se soit ensuite rendu à la fourrière dans le délai au cours duquel son véhicule pouvait lui être restitué atteste que l'intéressé a bien été informé du lieu où se trouvait son véhicule et des conditions dans lesquelles il pouvait le récupérer ; que c'est faute d'avoir effectué personnellement les diligences nécessaires auprès du service de fourrière que M. X... n'a pu obtenir restitution de son véhicule, son beau-frère ne justifiant pas pour sa part être l'un des conducteurs déclarés du véhicule ; qu'en l'absence de voie de fait, le litige ressortit à la compétence du juge administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu le code de la route et notamment ses articles L. 325-1, L. 325-2, L. 325-3, L. 325-7, R. 325-31 et R. 325-32 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Serge Daël, membre du Tribunal,- les observations de Maître Blanc, avocat de M.
X...
,- les conclusions de M. André Gariazzo, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure de conflit :
Considérant que la circonstance que l'arrêté de conflit, dont il n'est pas contesté qu'il est parvenu au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Créteil dans le délai de quinze jours prévu à l'article 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828, ne soit parvenu au greffe du tribunal d'instance de Saint-Maur-des-Fossés qu'après ce délai n'est pas de nature à l'entacher d'irrégularité ;
Sur la compétence :
Considérant qu'il ressort des dispositions des articles L. 325-1 et L. 325-7 du code de la route, dans leur rédaction applicable, que le législateur a attribué à l'administration le pouvoir de procéder à la destruction des véhicules réputés abandonnés parce qu'ils n'ont pas été retirés de la fourrière par leur propriétaire dans le délai de quarante cinq jours après la notification à ce dernier d'une mise en demeure d'avoir à les retirer ; que, par suite, la destruction du véhicule de M. X..., dont la mise en fourrière avait été ordonnée par l'officier de police judiciaire pour avoir été laissé en stationnement dans un parc public durant plus de sept jours, en violation des dispositions de l'article R. 417-2 du code de la route, n'était pas manifestement insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'administration, alors même que la notification prescrite par les articles L. 325-7, R. 325-31 et R. 325-32 du même code aurait été effectuée à une mauvaise adresse ; que cet acte ne saurait, dès lors, être regardé comme constitutif d'une voie de fait ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'appartenait qu'aux juridictions de l'ordre administratif de connaître du litige soulevé devant le tribunal d'instance de Saint-Maur-des-Fossés et que le conflit a été élevé à bon droit par le préfet du Val-de-Marne ;
D E C I D E :
Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 21 mai 2007 par le préfet du Val-de-Marne est confirmé.
Article 2 : Sont déclarés nuls et non avenus la procédure engagée devant le tribunal d'instance de Saint-Maur-des-Fossés par M. X... contre le préfet du Val-de-Marne et le jugement de cette juridiction en date du 30 avril 2007.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.



Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Domaine d'application - Contentieux de la voie de fait - Voie de fait - Définition - Acte manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'administration - Exclusion - Cas

Ne constitue pas une voie de fait administrative relevant de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire la destruction d'un véhicule dont la mise en fourrière a été ordonnée par un officier de police judiciaire pour avoir été laissé en stationnement dans un parc public durant plus de sept jours, en violation des dispositions de l'article R. 417-2 du code de la route, dès lors que cette décision n'est pas manifestement insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'administration et alors même que la notification prescrite par les articles L. 325-7, R. 325-31 et R. 325-32 du même code a été effectuée à une mauvaise adresse


Références :

loi des 16-24 août 1790

décret du 16 fructidor an III

décret du 26 octobre 1849 modifié

loi du 24 mai 1872

ordonnance du 1er juin 1828 modifiée

ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée

articles L. 325-1, L. 325-2, L. 325-3, L. 325-7, R. 325-31 e
t R. 325-32 du code de la route

Décision attaquée : Conflit positif : arrêté de conflit du 21 mai 2007 du préfet du Val-de-Marne ; jugement du tribunal d'instance de Saint-Maur-des-Fossés en date du, 30 avril 2007


Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Avocat général : M. Gariazzo (commissaire du gouvernement)
Rapporteur ?: M. Daël
Avocat(s) : Me Blanc

Origine de la décision
Date de la décision : 15/12/2008
Date de l'import : 14/10/2011

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : T0803673
Numéro NOR : JURITEXT000020307775 ?
Numéro d'affaire : 08-03673
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.conflits;arret;2008-12-15;t0803673 ?
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