La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/12/2004 | FRANCE | N°C3420

France | France, Tribunal des conflits, 29 décembre 2004, C3420


Vu, enregistrée à son secrétariat le 15 mars 2004, l'expédition du jugement du 24 février 2004, par lequel le tribunal administratif de Nancy, saisi d'une demande de M. X, tendant à la condamnation des communes de Girecourt-sur-Durbion, Laveline-devant-Bruyères, Lépanges-sur-Vologne, Docelles, Cheniménil, Grandvillers et Bruyères au paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'il a subi à raison de son défaut de déclaration par lesdites collectivités territoriales aux services de l'U.R.S.S.A.F. alors qu'il était employé par elles en qualité de vétérinaire

inspecteur d'abattoir, a renvoyé au Tribunal, par application de l'art...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 15 mars 2004, l'expédition du jugement du 24 février 2004, par lequel le tribunal administratif de Nancy, saisi d'une demande de M. X, tendant à la condamnation des communes de Girecourt-sur-Durbion, Laveline-devant-Bruyères, Lépanges-sur-Vologne, Docelles, Cheniménil, Grandvillers et Bruyères au paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'il a subi à raison de son défaut de déclaration par lesdites collectivités territoriales aux services de l'U.R.S.S.A.F. alors qu'il était employé par elles en qualité de vétérinaire inspecteur d'abattoir, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence, en ce qui concerne les conclusions tendant à la condamnation des communes au remboursement des cotisations sociales patronales acquittées par le requérant ;

Vu l'arrêt du 19 novembre 2001, par lequel la cour d'appel de Nancy s'est déclarée incompétente pour connaître de l'ensemble du litige ;

Vu, enregistrée le 15 avril 2004, la lettre de M. X par laquelle l'intéressé déclare s'en rapporter à la décision du Tribunal ;

Vu, enregistré le 29 avril 2004, le mémoire présenté par le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, tendant à ce que la juridiction administrative soit reconnue compétente pour connaître desdites conclusions au motif que l'action vise à mettre en cause la responsabilité de collectivités publiques ;

Vu, enregistré le 14 septembre 2004, le mémoire présenté pour les communes de Girecourt-sur-Durbion, Laveline-devant-Bruyères, Lépanges-sur-Vologne, Docelles, Cheniménil, Grandvillers et Bruyères tendant, à titre principal, par le même motif, à la désignation de la juridiction administrative et, à titre subsidiaire, à l'irrecevabilité de la saisine du Tribunal ; elles demandent également que les frais exposés par elles et non compris dans les dépens soient mis à la charge de M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Ponroy, membre du Tribunal,

- les observations de Me Balat, avocat des communes de Girecourt, Laveline-devant-Bruyères, Lépanges-sur-Vologne, Docelles, Cheniménil, Grandvillers et Bruyères,

- les conclusions de M. Gilles Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, vétérinaire sanitaire du département des Vosges a, en vertu d'arrêtés municipaux, été chargé de l'inspection sanitaire des abattoirs et du contrôle des denrées d'origine animale destinées à l'alimentation humaine dans les communes de Bruyères, Cheniménil, Docelles, Girecourt-sur-Durbion, Grandivillers, Laveline et Lépanges-sur-Vologne en qualité de salarié de 1953 à 1968 ; que, durant cette période, lesdites communes ne l'ont affilié ni au régime obligatoire de la sécurité sociale ni au régime complémentaire en faveur des agents non titulaires de l'Etat ou des collectivités locales, et n'ont en conséquence versé aucune cotisation à ce titre ; que l'intéressé a demandé la condamnation des communes, à raison de leur carence fautive, à lui verser des dommages-intérêts correspondant d'une part, à la perte définitive de soixante-dix mois de pension de retraite et, d'autre part, au montant des cotisations sociales patronales qu'il a dû débourser à la place des communes ;

Considérant que la cour d'appel de Nancy s'est déclarée incompétente pour connaître de l'ensemble du litige ; qu'appelé à se prononcer sur les mêmes conclusions, le tribunal administratif de Nancy, après avoir statué sur l'action en réparation du préjudice résultant de la perte de soixante-dix mois de pension de retraite a estimé que les demandes tendant à obtenir des communes le remboursement de la part patronale des cotisations sociales ne relevaient pas de la compétence administrative ;

Considérant que les articles L. 142-1 à L. 142-3 du code de la sécurité sociale attribuent compétence au tribunal des affaires de sécurité sociale pour connaître des litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'en ce qui concerne les fonctionnaires ou agents de l'Etat et des collectivités publiques, le critère de la compétence des organismes du contentieux de la sécurité sociale est lié, non à la qualité des personnes en cause, mais à la nature même du différend ;

Considérant toutefois qu'en l'espèce l'action dirigée contre les communes n'est pas fondée sur les droits que M. X estimait tenir de sa qualité d'assuré social, mais sur les carences fautives de ces collectivités territoriales qui ont conduit l'intéressé à débourser des sommes pour le compte de ses employeurs ; qu'un tel litige relève par nature de la compétence des juridictions de l'ordre administratif ;

Sur l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions et de condamner M. X à verser aux communes la somme qu'elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La juridiction de l'ordre administratif est compétente pour connaître des conclusions de M. X tendant à la condamnation des communes de Grandvillers, Lavelines, Bruyères, Docelles, Cheniménil, Girecourt-sur-Durbion et Lépanges-sur-Vologne à lui verser des dommages-intérêts correspondant au montant des cotisations sociales qu'il a dû débourser à la place desdites communes.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 24 février 2004 est déclaré nul et non avenu en tant qu'il a décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de ces conclusions. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.

Article 3 : Les conclusions des communes de Grandvillers, Lavelines, Bruyères, Docelles, Cheniménil, Girecourt-sur-Durbion et Lépanges-sur-Vologne tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3420
Date de la décision : 29/12/2004
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR DES TEXTES SPÉCIAUX - ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - COMPÉTENCE DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES EN MATIÈRE DE PRESTATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE - LIMITES - LITIGE RELATIF NON AUX DROITS QUE LE REQUÉRANT ESTIME TENIR DE SA QUALITÉ D'ASSURÉ SOCIAL MAIS AUX CARENCES FAUTIVES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES QUI L'ONT EMPLOYÉ EN OMETTANT DE L'AFFILIER AUX RÉGIMES OBLIGATOIRE ET COMPLÉMENTAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE - COMPÉTENCE DU JUGE ADMINISTRATIF [RJ1].

17-03-01-02-04 Les articles L. 142-1 à L. 142-3 du code de la sécurité sociale attribuent compétence au tribunal des affaires de sécurité sociale pour connaître des litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale. En ce qui concerne les fonctionnaires ou agents de l'Etat et des collectivités publiques, le critère de la compétence des organismes du contentieux de la sécurité sociale est lié, non à la qualité des personnes en cause, mais à la nature même du différend. Toutefois, en l'espèce, l'action en réparation dirigée contre les communes n'est pas fondée sur les droits que le requérant estimait tenir de sa qualité d'assuré social, mais sur les carences fautives des collectivités territoriales qui l'avaient employé en omettant de l'affilier aux régimes obligatoire et complémentaire de sécurité sociale pour les agents non titulaires de l'Etat et des collectivités territoriales, carences qui ont conduit l'intéressé à débourser des sommes pour le compte de ses employeurs. Un tel litige relève par nature de la compétence des juridictions de l'ordre administratif.

SÉCURITÉ SOCIALE - CONTENTIEUX ET RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - RÈGLES DE COMPÉTENCE - COMPÉTENCE ADMINISTRATIVE - LITIGE RELATIF NON AUX DROITS QUE LE REQUÉRANT ESTIME TENIR DE SA QUALITÉ D'ASSURÉ SOCIAL MAIS AUX CARENCES FAUTIVES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES QUI L'ONT EMPLOYÉ EN OMETTANT DE L'AFFILIER AUX RÉGIMES OBLIGATOIRE ET COMPLÉMENTAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE [RJ1].

62-05-01-01 Les articles L. 142-1 à L. 142-3 du code de la sécurité sociale attribuent compétence au tribunal des affaires de sécurité sociale pour connaître des litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale. En ce qui concerne les fonctionnaires ou agents de l'Etat et des collectivités publiques, le critère de la compétence des organismes du contentieux de la sécurité sociale est lié, non à la qualité des personnes en cause, mais à la nature même du différend. Toutefois, en l'espèce, l'action en réparation dirigée contre les communes n'est pas fondée sur les droits que le requérant estimait tenir de sa qualité d'assuré social, mais sur les carences fautives des collectivités territoriales qui l'avaient employé en omettant de l'affilier aux régimes obligatoire et complémentaire de sécurité sociale pour les agents non titulaires de l'Etat et des collectivités territoriales, carences qui ont conduit l'intéressé à débourser des sommes pour le compte de ses employeurs. Un tel litige relève par nature de la compétence des juridictions de l'ordre administratif.


Références :

[RJ1]

Cf TC, 30 avril 2001, Mme Castellani et Mlle Jupille c/ Fonds de solidarité, T. p. 874 ;

Rappr. CE, 28 juillet 1999, Lassablière, T. p. 700.


Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: Mme Véronique Poisson
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2004:C3420
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award