Vu, enregistrée à son secrétariat le 8 août 2003, la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a transmis au tribunal le dossier de la procédure opposant Mmes X, Y, Z, A, B et MM. C, D, X et E à la commune de Saint-Chamond (Loire) devant le conseil de prud'hommes de Saint-Chamond ;
Vu le déclinatoire présenté le 3 mars 2003 par le préfet de la Loire, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente pour connaître du litige opposant les anciens salariés de l'Ecole de musique de Saint-Chamond à la commune pour les motifs que le litige met en cause la responsabilité de la commune pour ne pas avoir repris, en application de l'article L. 122-12 du code du travail, les contrats de travail de ces salariés employés, jusqu'à leur licenciement pour motif économique, par l'association Ecole de musique de Saint-Chamond ; que si, dans l'hypothèse où il trouve à s'appliquer, l'article L. 122-12 du code du travail prévoit la reprise des contrats de travail, ceux-ci ne peuvent être, lorsque l'activité est transférée à une commune, que des contrats relevant du droit public ; que la juridiction administrative est donc compétente pour connaître du litige ;
Vu le jugement du 23 juin 2003 par lequel le conseil de prud'hommes de Saint-Chamond a rejeté le déclinatoire de compétence ;
Vu l'arrêté du 1er juillet 2003 par lequel le préfet de la Loire a élevé le conflit ;
Vu le jugement du 15 juillet 2003 par lequel le conseil de prud'hommes de Saint-Chamond a sursis à toute procédure ;
Vu, enregistré le 8 août 2003, le mémoire présenté par Mme X et autres, tendant à l'annulation de l'arrêté de conflit par les motifs que la rupture des contrats de travail a eu pour cause le transfert d'activité ; qu'à ce titre, la commune était tenue de respecter les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail ; que l'examen des conditions de cette rupture et donc du respect par la commune des obligations imposées par l'article L. 122-12 du code du travail relève de la compétence du juge judiciaire ;
Vu, enregistrées le 15 septembre 2003, les observations présentées par le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu la directive n° 77/187/CEE du conseil du 14 février 1977 modifiée par les directives 98/50/CEE du 29 juin 1998 et 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;
Vu le code du travail, et notamment son article L. 122-12 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lasserre, membre du Tribunal,
- les conclusions de M. Duplat, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 122-12 du code du travail : S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ;
Considérant que si les dispositions précitées, interprétées au regard de la directive n° 77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977, imposent le maintien des contrats de travail en cours y compris dans le cas où l'entité économique transférée constitue un service public administratif dont la gestion, jusqu'ici assurée par une personne privée, est reprise par une personne morale de droit public normalement liée à son personnel par des rapports de droit public, elles n'ont pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats de travail en cause, qui demeurent des contrats de droit privé tant que le nouvel employeur public n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public ; que le juge judiciaire est, par suite, seul compétent pour statuer sur les litiges nés du refus de l'un ou l'autre des deux employeurs successifs de poursuivre l'exécution de ce contrat de travail, qui ne mettent en cause, jusqu'à la mise en ouvre du régime de droit public évoqué plus haut, que des rapports de droit privé ;
Considérant qu'à la date à laquelle a été prise la décision de licencier Mme X et autres, enseignants à l'Ecole de musique de Saint-Chamond, ces salariés étaient exclusivement régis par le contrat de travail que chacun d'entre eux avait conclu, lors de son recrutement, avec l'association Ecole de musique de Saint-Chamond, qui est une personne de droit privé ; que s'ils font valoir que leur licenciement, prononcé par l'association en cours de liquidation, trouve sa cause réelle dans le transfert de l'activité à la commune de Saint-Chamond qui a repris la gestion de l'école en régie directe et que la commune est donc tenue, solidairement avec l'association, de réparer les conséquences dommageables du licenciement sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 122-12 du code du travail, l'action ainsi engagée contre la commune ne met en cause, faute pour cette dernière d'avoir placé les intéressés dans un régime de droit public, que les rapports de droit privé nés du contrat de travail initialement conclu avec l'association ; que la juridiction de l'ordre judiciaire est, par suite, compétente pour en connaître ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 1er juillet 2003 par le préfet de la Loire est annulé.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.