Vu, enregistrée à son secrétariat le 8 décembre 1998, l'expédition du jugement du 12 novembre 1998 par lequel le tribunal administratif d'Amiens, saisi d'une demande de Mme Y... et de la COMPAGNIE UNI EUROPE tendant à ce que les Etablissements Gurdebeke et l'Office national des forêts soient déclarés responsables de l'accident dont a été victime M. X... et, qu'en conséquence la S.A. Etablissements Gurdebeke et sa compagnie d'assurance Samda, d'une part, l'Office national des forêts et sa compagnie d'assurances UAP d'autre part, soient condamnés solidairement à rembourser, avec intérêts de droit, les sommes versées à M. X... et à la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais, a renvoyé au tribunal par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;
Vu le jugement en date du 28 décembre 1994 par lequel le tribunal de grande instance de Compiègne s'est déclaré incompétent pour connaître de ce litige ;
Vu, enregistré le 8 mars 1999, le mémoire présenté pour la S.A. Gurdebeke et la Samda par lequel ces sociétés s'en remettent à la sagesse du tribunal ; ils indiquent cependant que la compétence administrative paraît s'imposer dès lors que la route forestière dont il s'agit était également ouverte à la circulation générale ; qu'en effet cette voie, loin d'avoir une utilisation purement domaniale, constitue une desserte routière destinée à permettre à la population de Compiègne de rejoindre directement la forêt à des fins de promenade et de loisirs ; qu'elle reçoit en permanence une circulation automobile dense ; qu'elle joint Compiègne aux villages situés au sud de la forêt ;
Vu, enregistré le 26 mars 1999, le mémoire présenté pour l'Office national des forêts et tendant à ce que l'affaire soit renvoyée devant les tribunaux judiciaires par les motifs que la route dont il s'agit est exclusivement destinée à l'exploitation forestière ; que si elle est ouverte au public, elle n'est pas affectée à la circulation générale ; que les travaux effectués dansle seul but d'accueillir le public en forêt n'ont pas le caractère de travaux publics ;
Vu, enregistré le 21 avril 1999, le mémoire présenté pour Mme Y... et la compagnie Axa courtage venant aux droits d'UNI EUROPE et tendant à ce que l'affaire soit renvoyée devant les tribunaux de l'ordre judiciaire par les motifs que la route dont il s'agit est une route forestière faisant partie du domaine privé ; que si elle était ouverte au public, elle n'était pas affectée à la circulation générale ;
Vu les pièces dont il résulte que la saisine du Tribunal des Conflits a été communiquée à qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu la loi du 29 décembre 1892 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Moreau, membre du Tribunal,
- les observations de Me Odent, avocat de Mme Marcelle Y... et d'UNI EUROPE, de la SCP Vincent, Bouvier-Ohl, avocat de la S.A. Entreprise Gurdebeke et Compagnie Samda et de Me Delvové, avocat de l'Office national des forêts,
- les conclusions de M. de Caigny, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que les travaux effectués par l'entreprise Gurdebeke pour le compte de l'Office national des forêts avaient pour objet l'entretien d'une route forestière destinée à l'exploitation de la forêt ; que si cette route était ouverte à la circulation du public, elle n'était pas affectée à la circulation générale ; que ces travaux, exécutés pour la gestion d'un bien faisant partie du domaine privé de l'Etat, n'ont pas le caractère de travaux publics ; qu'il appartient, dès lors, aux tribunaux judiciaires de se prononcer sur les contestations auxquelles ces travaux peuvent donner lieu ;
Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant Mme Y... et la COMPAGNIE UNI EUROPE, d'une part, à la société Gurdebeke, à l'Office national des forêts et aux compagnies d'assurance Samda et UAP.
Article 2 : Le jugement du tribunal de grande instance de Compiègne en date du 28 décembre 1994 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.
Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif d'Amiens est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu le 12 novembre 1998 par ce tribunal.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice qui est chargé d'en assurer l'exécution.