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07/03/1994 | FRANCE | N°09-42901

France | France, Tribunal des conflits, 07 mars 1994, 09-42901


Vu la lettre par laquelle le ministre d'Etat, Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. Y... aux ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris ;

Vu le déclinatoire présenté le 25 mai 1993 par le Préfet de Police de Paris, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente, par les motifs que l'article 136 du Code de procédure pénale, alinéas 3 et 4, doit être interprété strictement ; que ces alinéas n'attribue

nt pas compétence aux tribunaux judiciaires pour se prononcer sur la légal...

Vu la lettre par laquelle le ministre d'Etat, Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. Y... aux ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris ;

Vu le déclinatoire présenté le 25 mai 1993 par le Préfet de Police de Paris, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente, par les motifs que l'article 136 du Code de procédure pénale, alinéas 3 et 4, doit être interprété strictement ; que ces alinéas n'attribuent pas compétence aux tribunaux judiciaires pour se prononcer sur la légalité d'actes administratifs en dehors du cas de voie de fait ; que tel n'était pas le cas en l'espèce ; que le refus de visa opposé à un étranger ne constitue pas par nature une voie de fait ;

Vu l'ordonnance du juge des référés du 26 mai 1993, déclarant irrecevable le déclinatoire de compétence, mais rejetant la requête de M. X... ;

Vu l'arrêté du 15 juin 1993 par lequel le Préfet de Police de Paris a élevé le conflit ;

Vu l'ordonnance des référés du 18 juin 1993 décidant qu'il sera sursis à l'instance ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;

Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le Code de procédure pénale, et notamment son article 136 ;

Sur la régularité de la procédure :

Considérant qu'il résulte de l'article 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828 que la juridiction judiciaire qui rejette un déclinatoire de compétence opposé par l'autorité administrative doit surseoir à statuer pendant le délai laissé au préfet pour, s'il l'estime opportun, élever le conflit ; qu'il s'ensuit que l'ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris du 26 mai 1993 statuant au fond par la même décision que celle qui écarte le déclinatoire de compétence du 6 mai 1993, doit être déclarée sur ce point nulle et non avenue ;

Sur la compétence :

Considérant que M. Y..., ressortissant irakien, a fait l'objet d'une expulsion du territoire français à l'époque où avait éclaté la guerre entre l'Irak et le Koweït ; que cette décision a été annulée pour insuffisance de motivation par le tribunal administratif de Toulouse, dont le jugement a été confirmé par le Conseil d'Etat le 24 avril 1992 ; que, toutefois, la question de savoir si cette annulation impliquait ou non une nouvelle admission de l'intéressé au séjour, même si son épouse et ses enfants étaient restés en France, relevait exclusivement du juge administratif ; qu'il suit de là que c'est à tort que le président du tribunal de grande instance de Paris, saisi en référé, s'est reconnu compétent en se fondant sur l'article 136 du Code de procédure pénale, selon lequel " dans tous les cas d'atteinte à la liberté individuelle, les tribunaux judiciaires sont toujours exclusivement compétents " ; qu'aucune atteinte à la liberté individuelle, au sens de ce texte, n'était invoquée ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le préfet a élevé le conflit ;

DECIDE :

Article 1er : l'arrêté du conflit du Préfet de Police de Paris pris le 15 juin 1993 est confirmé ;

Article 2 : est déclarée nulle et non avenue la procédure engagée par M. Y... devant le tribunal de grande instance de Paris.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 09-42901
Date de la décision : 07/03/1994

Analyses

1° SEPARATION DES POUVOIRS - Conflit - Arrêté de conflit - Déclinatoire - Rejet - Obligation pour le juge de surseoir à statuer.

1° Il résulte de l'article 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828 que la juridiction judiciaire qui rejette un déclinatoire de compétence opposé par l'autorité administrative doit surseoir à statuer pendant le délai laissé au préfet pour, s'il l'estime opportun, élever le conflit. Il s'ensuit que l'ordonnance du président d'un tribunal de grande instance qui statue au fond par la même décision que celle qui écarte le déclinatoire de compétence soulevé par un préfet doit être déclarée sur ce point nulle et non avenue.

2° SEPARATION DES POUVOIRS - Acte administratif - Acte individuel - Arrêté d'expulsion - Annulation - Appréciation des conséquences - Compétence judiciaire (non).

2° ETRANGER - Arrêt d'expulsion - Annulation - Appréciation des conséquences - Compétence judiciaire (non).

2° En l'état de l'annulation par la juridiction administrative de la décision prononçant l'expulsion d'un étranger du territoire français, la question de savoir si cette annulation impliquait ou non une nouvelle admission de l'étranger au séjour, même si son épouse et ses enfants sont restés en France, relève exclusivement du juge administratif. Le juge de l'ordre judiciaire saisi en référé ne saurait donc se reconnaître compétent pour statuer sur cette question en se fondant sur l'article 136 du Code de procédure pénale alors qu'aucune atteinte à la liberté individuelle au sens de ce texte n'était invoquée.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 26 mai 1993


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Lemontey .
Avocat général : Commissaire du Gouvernement : M. Gaunet
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Rougevin-Baville.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:1994:09.42901
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