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05/04/1993 | FRANCE | N°02842

France | France, Tribunal des conflits, 05 avril 1993, 02842


Vu, enregistrée à son secrétariat le 25 septembre 1992, l'expédition du jugement du 17 septembre 1992 par lequel le tribunal de grande instance de Limoges, saisi d'une action en responsabilité et en paiement de dommages-intérêts de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Haute-Vienne et des époux A..., contre l'Etat (Ministre de la justice), pris en la personne de l'agent judiciaire du Trésor, et contre le département du Val-de-Marne, à raison du préjudice résultant de l'incendie, le 7 décembre 1986, par le mineur Christophe X..., du château d'Eylias, a renvoyé

au Tribunal des conflits, par application de l'article 34 du dé...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 25 septembre 1992, l'expédition du jugement du 17 septembre 1992 par lequel le tribunal de grande instance de Limoges, saisi d'une action en responsabilité et en paiement de dommages-intérêts de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Haute-Vienne et des époux A..., contre l'Etat (Ministre de la justice), pris en la personne de l'agent judiciaire du Trésor, et contre le département du Val-de-Marne, à raison du préjudice résultant de l'incendie, le 7 décembre 1986, par le mineur Christophe X..., du château d'Eylias, a renvoyé au Tribunal des conflits, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de la compétence ;
Vu le jugement du 27 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Limoges s'est déclaré incompétent pour connaître de ce litige ;
Vu, enregistré le 8 février 1993, le mémoire présenté pour les époux Z... et la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Haute-Vienne, tendant à la compétence de juridiction administrative et à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Limoges ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu les articles 375-2 et 375-4 du code civil ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Y..., membre du Tribunal,
- les observations de Me Vincent, avocat des époux Z..., de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Haute-Vienne et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du département du Val-de-Marne,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que, le 25 septembre 1986, le juge des enfants de Créteil a pris, au titre de l'assistance éducative, à l'égard du mineur Christophe X..., alors âgé de 14 ans, une mesure d'observation en milieu ouvert à exercer par la consultation d'orientation éducative de Nogent-sur-Marne, dépendant du ministère de la Justice ;
Considérant que le 5 décembre 1986, les éducateurs de cette consultation conduisaient le jeune X... chez les époux Z... au Château d'Eylias, "structure d'accueil non traditionnelle" recevant notamment des mineurs confiés par le service d'aide sociale à l'Enfance du Val-de-Marne en vertu d'une convention comportant une assurance de responsabilité civile ; que le 7 décembre 1986 au matin, le jeune X... mettait le feu à son matelas et provoquait un incendie qui détruisait une partie du château ;

Sur la régularité de la saisine ;
Considérant que le tribunal administratif ayant mis hors de cause le service d'aide sociale à l'enfance du département du Val-de-Marne comme n'ayant pris aucune part dans la survenance des événements et, notamment, dans la décision de placer le mineur chez les époux Z..., il n'existait pas de risque de conflit négatif de compétence en ce qui concerne l'action dirigée contre le département ; qu'il en résulte qu'à la date à laquelle le tribunal de grande instance a statué, les conditions fixées par l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 n'étaient pas remplies sur ce point ;
Sur la compétence à l'égard de l'Etat :
Considérant qu'au moment de l'incendie, Christophe X... se trouvait en l'absence de décision prise sur sa garde, placé à l'amiable chez les époux Z... par les techniciens de la consultation d'orientation éducative ; que ceux-ci, agents de l'Education Surveillée, soumis, dans l'exercice de la mesure d'observation en milieu ouvert, au seul contrôle du juge des enfants, conformément aux dispositions de l'article 375-2 du code civil, agissaient dans le cadre du fonctionnement du service public judiciaire ; que, dès lors, l'action tendant à mettre en cause la responsabilité de l'Etat en raison des fautes qui auraient été commises dans l'exécution de cette mission relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;
Article 1er : Le jugement du tribunal de grande instance de Limoges en date du 17 septembre 1992 est déclaré nul et non avenu en ce qu'il renvoie au Tribunal des conflits le soin de se prononcer sur la question de compétence posée par l'action des demandeurs à l'égard du département du Val-de-Marne, et en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur leur action envers l'Etat.
Article 2 : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Haute-Vienne et les époux Z... à l'Etat.
Article 3 : La cause et les parties sont renvoyées devant le tribunal de grande instance de Limoges.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice, chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 02842
Date de la décision : 05/04/1993
Sens de l'arrêt : Déclaration de compétence judiciaire
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Conflit sur renvoi juridictionnel

Analyses

- RJ1 COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - AUTORITE JUDICIAIRE GARDIENNE DE LA LIBERTE INDIVIDUELLE - DE LA PROPRIETE PRIVEE ET DE L'ETAT DES PERSONNES - ETAT DES PERSONNES - Assistance éducative - Mineur ayant fait l'objet d'une mesure d'observation en milieu ouvert - ordonnée par un juge des enfants - Incendie provoqué par le mineur - Responsabilité de l'Etat (1).

17-03-02-08-03, 37-02-01-02, 60-02-09 Action en responsabilité exercée par des particuliers en réparation du préjudice subi du fait de l'incendie d'une partie de leurs bâtiments provoqué par un mineur séjournant chez eux à la demande d'une consultation d'orientation éducative dépendant du ministère de la justice et chargée par le juge des enfants d'une mesure d'observation en milieu ouvert ordonnée dans le cadre d'une procédure d'assistance éducative. Au moment de l'incendie, le mineur se trouvait, en l'absence de décision prise sur sa garde, placé à l'amiable chez les intéressés par les techniciens de la consultation d'orientation éducative. Ceux-ci, agents de l'Education surveillée, soumis, dans l'exercice de la mesure d'observation en milieu ouvert, au seul contrôle du juge des enfants conformément aux dispositions de l'article 375-2 du code civil, agissaient dans le cadre du fonctionnement du service public judiciaire. Dès lors, l'action tendant à mettre en cause la responsabilité de l'Etat en raison des fautes qui auraient été commises dans l'exécution de cette mission relève de la compétence de la juridiction judiciaire.

- RJ1 JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - SERVICE PUBLIC DE LA JUSTICE - JURIDICITIONS JUDICIAIRES - FONCTIONNEMENT - Mesures relevant de la compétence du juge judiciaire - Mesure d'observation en milieu ouvert d'un mineur ordonnée par un juge des enfants au titre de l'assistance éducative - Action en responsabilité dirigée contre l'Etat par des particuliers accueillant le mineur en réparation du préjudice subi du fait de l'incendie provoqué par celui-ci (1).

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE DE LA JUSTICE - Mineurs ayant faits l'objet de mesures au titre de l'assistance éducative - Action en responsabilité exercée par des particuliers en réparation du préjudice subi du fait de l'incendie d'une partie de leurs bâtiments provoqué par le mineur placé chez eux sous ce régime - Action mettant en cause la responsabilité de l'Etat en raison des fautes commises dans l'exécution de la mission éducative (1).


Références :

Code civil 375-2

1.

Rappr. 1975-01-31, Consorts Fichon-Lavaud, p. 78, et 1985-12-20, Garde des sceaux, ministre de la justice c/ Epoux Pierru, p. 385


Composition du Tribunal
Président : M. Lemontey
Rapporteur ?: M. Culié
Rapporteur public ?: M. Abraham

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:1993:02842
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