Vu le jugement en date du 8 juin 1989, enregistré le 26 juin 1989 au secrétariat du Tribunal des Conflits, par lequel le tribunal administratif de Rennes a renvoyé au Tribunal des Conflits la détermination de l'ordre de juridictions compétente pour connaître de la demande d'indemnité formée par M. Patrick X... contre l'Etat à la suite de l'accident dont il a été victime le 27 novembre 1980 en raison du bris d'un carreau d'une porte vitrée dans les locaux du collège Saint-Aubin à Languidic (Morbihan), en raison du risque de conflit négatif résultant de ce que, par jugement en date du 29 janvier 1986 le Tribunal de grande instance de Lorient, statuant d'une part sur une demande de M. Alexandre X..., agissant comme administrateur légal de son fils Patrick, alors mineur, tendant à l'indemnisation par le collège Saint-Aubin du même dommage, d'autre part sur une demande du directeur de ce collège tendant à l'intervention forcée de l'Etat, représenté par le préfet du Morbihan, et enfin sur un déclinatoire de compétence formulé par ce dernier, s'est déclaré incompétent pour connaître de l'ensemble du litige ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié et complété par le décret du 25 juillet 1960 ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu la loi du 5 avril 1937 ;
Vu la loi du 31 décembre 1959, modifiée par les lois du 1er juin 1971 et du 25 novembre 1977 ;
Vu le décret du 22 avril 1960, et notamment ses articles 9 et 10 ;
Après avoir entendu le rapport de M. Rougevin-Baville, membre du Tribunal, les observations de la Me Odent, avocat de M. X... et les conclusions de Mme l'Avocat général Flipo, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. Patrick X..., alors âgé de 13 ans, interne au collège Saint-Aubin à Languidic, établissement d'enseignement privé lié à l'Etat par un contrat d'association, a été blessé à l'oeil le 27 novembre 1980 par un éclat de verre provenant d'une porte vitrée dont un carreau venait d'être brisé par inadvertance par l'un de ses condisciples ; que son père a demandé au Tribunal de grande instance de Lorient de condamner le collège, représenté par son directeur, à l'indemniser des conséquences dommageables de cet accident ; que, le directeur du collège ayant appelé l'Etat en intervention forcée et M. X... ayant alors conclu contre l'Etat, le Préfet du Morbihan a présenté un déclinatoire de compétence ; que le Tribunal de grande instance a fait droit à ce déclinatoire et a cru devoir déclarer la juridiction judiciaire incompétente pour statuer sur l'ensemble du litige par un jugement du 29 janvier 1986, confirmé par un arrêt de la Cour d'appel de Rennes du 6 mai 1986 ;
Considérant qu'à la suite de ces décisions, M. Patrick X..., devenu majeur, a formé devant le Tribunal administratif de Rennes, le 30 novembre 1987, une demande d'indemnité, dirigée contre le seul Etat ; que, par jugement du 8 juin 1989, ce Tribunal, estimant la juridiction administrative incompétente, a renvoyé au Tribunal des Conflits le soin de régler le problème de compétence, par application de l'article 34 ajouté au décret du 26 octobre 1849 par le décret du 25 juillet 1960 ;
Considérant que tout en substituant la responsabilité de l'Etat à celle encourue par les membres de l'enseignement public, la loi du 5 avril 1937 a attribué aux tribunaux de l'ordre judiciaire, par dérogation aux principes généraux qui gouvernent la séparation des compétences, la connaissance des litiges concernant les dommages causés ou subis par les enfants confiés à la garde des agents de l'enseignement public et trouvant leur cause dans une faute de ces agents ; qu'il ressort de l'ensemble des dispositions relatives aux contrats d'association conclus entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés que ce texte leur est également applicable ; qu'en revanche, ladite loi ne trouve pas application et les règles normales de compétence en matière de responsabilité de la puissance publique reprennent leur empire, lorsque le préjudice invoqué doit être regardé comme indépendant du fait de l'un des agents susmentionnés, et, notamment, lorsqu'il a son origine dans un travail public ou trouve sa cause dans un défaut d'organisation du service public de l'enseignement ;
Considérant que M. X... ne s'est prévalu à aucun moment d'une faute d'un enseignant ; que, dans ces conditions, et alors qu'il a dirigé contre l'Etat sa demande de réparation, son action relevait de la compétence de la juridiction administrative ; qu'il suit de là que c'est à tort que le Tribunal administratif de Rennes a renvoyé cette affaire au Tribunal des Conflits ;
Article 1er - Il est déclaré que la juridiction administrative est compétente pour connaître du litige opposant M. X... (Patrick) à l'Etat.
Article 2 - Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 8 juin 1989 est déclaré nul et non avenu en ce qu'il s'est reconnu incompétent pour statuer sur la requête de M. X....
Article 3 - La cause et les parties sont renvoyées devant le tribunal administratif de Rennes.
Article 4 - La présente décision sera notifiée au Garde des Sceaux, ministre de la Justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.