Vu l'arrêté en date du 18 juillet 1976 par lequel le Préfet de Paris a élevé le conflit dans l'instance pendante devant la Cour d'appel d'Amiens entre la Société Elido World Corporation et l'Etat ;
Vu le déclinatoire de compétence présenté le 31 octobre 1975 par le Préfet de Paris et tendant à ce que la Cour d'appel d'Amiens, saisie de l'appel d'une ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de grande instance de Paris le 22 mai 1973, sur renvoi ordonné par arrêt de la Cour dé Cassation première chambre civile du 15 janvier 1975, par suite d'un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 10 juillet 1973, se déclare incompétente pour statuer sur les conclusions de la Société Elido World Corporation tendant à ce que soit ordonnée la restitution par l'Etat de pièces d'argenterie appartenant à cette société et retenues par l'Etat à la suite de leur présentation en douane en vue de leur exportation ;
Vu la Constitution ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 ;
Vu le décret du 17 décembre 1965 ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié par le décret du 25 juillet 1960 ;
Vu la loi du 23 juin 1941 relative à l'exportation des oeuvres d'art ;
Vu le décret n° 58-1063 du 7 novembre 1958 modifiant la loi du 23 juin 1941 ;
Considérant que la loi du 23 juin 1941 a soumis l'exportation des "Objets présentant un intérêt national d'histoire ou d'art" à un régime d'autorisation administrative comportant pour l'Etat la possibilité de retenir et de préempter ces objets au prix fixé par l'exportateur ; que la loi a excepté de ce régime, les oeuvres préalablement importées en France et déclarées ; que cette exception a été abrogée par le décret du 7 novembre 1958 pris en vertu de l'article 37 de la Constitution ; que, saisi d'un pourvoi contre un arrêté ministériel pris sur le fondement de ce décret, le Conseil d'Etat, par arrêt du 12 décembre 1969, a constaté que celui-ci était entaché d'illégalité pour être intervenu dans domaine réservé au législateur par l'article 34 de la Constitution ; que, toutefois, ce décret, n'ayant pas fait l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, n'a pas été annulé ; qu'application en ayant été faite quand la Société Elido World Corporation a voulu, en 1973, exporter des pièces d'argenterie qu'elle venait d'importer en France, la Cour d'appel d'Amiens, statuant sur renvoi prononcé par la Cour de Cassation, s'est reconnue compétente sur le terrain de la voie de fait ; que le conflit a été régulièrement élevé ;
Considérant que l'administration a fait en l'espèce usage des pouvoirs que lui confère le décret non annulé du 7 novembre 1958 ; que si les auteurs de ce décret ont méconnu l'article 34 de la Constitution, qui réserve au législateur le droit de déterminer les principes fondamentaux du régime de la propriété, il n'en résulte pas que le gouvernement, en prenant ce décret ait édicté une disposition, manifestement insusceptible de se rattacher à l'existence d'un pouvoir lui appartenant ;
Considérant que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la gravité de l'atteinte portée à la propriété, il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas eu en l'espèce voie de fait et que c'est bon droit que le Préfet a élevé le conflit ;
Article 1er - L'arrêté de conflit susvisé du Préfet de Paris, en date du 13 juillet 1976, est confirmé.
Article 2 - L'arrêté susvisé de la Cour d'appel d'Amiens en date du 5 juillet 1976, est annulé.