Vu la requête enregistrée le 28 octobre 1993, sous le n° 932590, et le mémoire complémentaire enregistré le 9 février 1994, par lesquels M. Maurice X..., demeurant ..., conteste le refus du maire de la commune de Fegersheim de lui communiquer la lettre d'observations de la chambre régionale des comptes d'Alsace en date du 22 octobre 1992 ;
Le tribunal a examiné la requête et pris connaissance de l'ensemble des mémoires et pièces produits par les parties ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée, la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 modifiée ;
Vu la loi n° 82-594 du 10 juillet 1982 modifiée ;
Vu la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 d'amélioration de la décentralisation ;
Vu la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Il a entendu à l'audience publique :
- le rapport de Mlle Heers, conseiller,
- les observations de M. Maurice X..., requérant,
- les conclusions de M. Bathie, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par lettre du 6 mars 1993, M. X... a demandé au maire de Fegersheim de pouvoir consulter la lettre d'observations définitives de la chambre régionale des comptes d'Alsace du 22 octobre 1992 ; qu'en l'absence de réponse explicite, le requérant a saisi le 26 mai 1993 la commission d'accès aux documents administratifs, laquelle a émis un avis favorable à la communication de cette lettre en application de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public, modifiée par la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; qu'après une nouvelle demande au maire le 5 juillet, celui-ci a accordé une entrevue à M. X... le 16 septembre 1993 ; que lors de cette entrevue, le maire a fait apercevoir le document à M. X... qui, dès lors, en a sollicité une copie, demande confirmée par lettre du 2 octobre 1993 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 susmentionnée : "Les administrations mentionnées à l'article 2 peuvent refuser de laisser consulter ou de communiquer un document administratif dont la consultation ou la communication porterait atteinte : au secret des délibérations du Gouvernement et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif ; au secret de la défense nationale, de la politique extérieure ; à la monnaie et au crédit public, à la sûreté de l'Etat et à la sécurité publique ; au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente ; au secret de la vie privée, des dossiers personnels et médicaux ; au secret en matière commerciale et industrielle ; à la recherche, par les services compétents, des infractions fiscales et douanières ; ou, de façon générale, aux secrets protégés par la loi" ;
Considérant qu'en vertu de l'article 23-VII de la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 d'amélioration de la décentralisation, modifiant l'article 6 de la loi n° 82-594 du 10 juillet 1982, relative aux chambres régionales des comptes, d'une part, les observations de la chambre régionale des comptes sont couvertes par le secret professionnel que les magistrats sont tenus de respecter en application de l'article 5 de ladite loi, d'autre part, les dispositions du titre premier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ne sont pas applicables à ces documents ; que toutefois, aux termes de l'article 16-II 2ème alinéa de la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques, modifiant l'article 87 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, "Les observations définitives formulées par la chambre régionale des comptes sur la gestion d'une collectivité territoriale ou de l'un des organismes mentionnés à l'alinéa précédent sont communiquées par l'exécutif de la collectivité à son assemblée délibérante, dès sa plus proche réunion" ; qu'il résulte de ces dispositions qu'à compter du moment où les observations définitives formulées par une chambre régionale des comptes sur la gestion d'une collectivité territoriale ont été ou auraient dû être communiquées à l'assemblée délibérante d'une collectivité territoriale, ces observations ne sont plus couvertes par le secret et doivent être communiquées conformément aux règles définies par la loi du 17 juillet 1978 ;
Considérant en premier lieu qu'il résulte des principes sus-rappelés que le maire de Fegersheim ne pouvait, pour refuser à M. X... la communication des observations de la chambre régionale des comptes, se prévaloir du caractère confidentiel de celles-ci, dès lors qu'elles ont été portées à la connaissance du conseil municipal ;
Considérant en deuxième lieu que les observations de la chambre régionale des comptes dont M. X... demande copie ne concernent aucune des matières que les administrations peuvent refuser de communiquer en vertu de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 ;
Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article 4 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 : "L'accès aux documents administratifs s'exerce : a) Par consultation gratuite sur place, sauf si la préservation du document ne le permet pas ou n'en permet pas la reproduction ; b) Sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document, par délivrance de copies en un seul exemplaire, aux frais de la personne qui les sollicite, et sans que ces frais puissent excéder le coût réel des charges de fonctionnement créées par l'application du présent titre. Le service doit délivrer la copie sollicitée ou la notification de refus de communication prévue à l'article 7" ; qu'il résulte de ces dispositions que M. X... était fondé à demander une copie du document dont il souhaitait obtenir communication ; que les services entrant dans le champ d'application de la loi du 17 juillet 1978 doivent prendre les dispositions nécessaires pour permettre la communication des documents administratifs selon les modalités prévues par ladite loi et notamment pour délivrer des copies desdits documents ; que, par suite, le maire de Fegersheim ne pouvait, pour refuser copie de la lettre d'observations sus-évoquée, se prévaloir de l'inexistence d'une "régie de recettes" dans sa commune ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à demander l'annulation du refus du maire de Fegersheim de lui communiquer copie de la lettre d'observations définitives de la chambre régionale des comptes du 22 octobre 1992 ;
Article 1er : Le refus du maire de Fégersheim de communiquer à M. X... copie de la lettre d'observations définitives de la chambre régionale des comptes est annulé.
Article 2 : le présent jugement sera notifié à M. Maurice X... et à la commune de Fegersheim.