LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 9 juillet 2025
Cassation partielle
Mme CHAMPALAUNE, présidente
Arrêt n° 505 F-D
Pourvoi n° J 23-19.420
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
1°/ M. [N] [V],
2°/ Mme [K] [H], épouse [V],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° J 23-19.420 contre l'arrêt rendu le 24 mai 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-8), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société Groupe Sofemo, suite à la fusion-absorption ayant effet au 1er octobre 2015,
2°/ à la société Étude Balincourt, dont le siège est [Adresse 3], prise en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Francenergy,
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Peyregne-Wable, conseillère, les observations de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de M. et Mme [V], de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, présidente, Mme Peyregne-Wable, conseillère rapporteure, Mme Guihal, conseillère doyenne, et Mme Vignes, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée de la présidente et conseillères précitées, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 mai 2023), le 25 mars 2016, par deux bons de commande distincts, M. et Mme [V] (les acquéreurs), ont conclu, dans le cadre d'un démarchage à domicile, avec la société Francenergy (le vendeur), un contrat de fourniture d'un onduleur central et de raccordement au réseau ERDF d'une installation existante, ces prestations étant stipulées à titre gratuit, outre la mise à disposition d'une certaine somme quatre-vingt-dix jours après la pose.
2. Les acquéreurs ont convenu en outre avec le vendeur de la fourniture et installation de douze panneaux photovoltaïques, destinés à une autoconsommation de l'électricité produite, moyennant le coût de 29 900 euros, financé par un prêt souscrit auprès de la société Cofidis (la banque).
3. À la suite d'une attestation de livraison et d'installation du 18 mai 2016, la banque a viré les fonds sur le compte du vendeur.
4. Le vendeur a fait l'objet une procédure de redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire le 8 janvier 2021.
5. Le 16 février 2021, après déclaration de leur créance, invoquant des irrégularités du contrat de vente et la mauvaise exécution de ses obligations par le vendeur, les acquéreurs ont assigné le liquidateur judiciaire du vendeur et la banque, aux fins, principalement d'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, subsidiairement de leur résolution judiciaire.
Examen du moyen
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de rejeter leur demande d'annulation des contrats, et de les condamner solidairement à restituer à la banque le capital emprunté déduction faite des échéances déjà prélevées sur leur compte, alors « que la nullité du contrat conclu hors établissement est encourue lorsque l'information relative au point de départ du délai de rétractation prévu par l'article L. 121-17 du code de la consommation est erronée ; que dans leurs conclusions d'appel les acquéreurs soutenaient que le bordereau de rétractation des deux bons de commande conclus le 25 mars 2016 comportait une irrégularité dès lors qu'il ne mentionnait pas que le point de départ du délai de rétractation était fixé à la date de réception du bien par les acheteurs ; que pour rejeter la demande d'annulation des contrats de vente en cause, la cour d'appel se borne toutefois à énoncer que l'article L. 121-21-1 du code de la consommation dispose que, lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies au client dans des conditions conformes, le délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l'expiration du délai initial pour en déduire qu'en l'espèce les acquéreurs pouvaient donc se rétracter jusqu'au 1er juin 2017, mais n'ont jamais entendu exercer cette faculté ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces bons de commande ne mentionnaient pas un point de départ erroné du délai de rétractation lequel courait à compter de la livraison du bien, de sorte que la nullité de ces contrats était encourue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-17 et L. 121-18-1 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 121-17, I, 2°, et L. 121-18-1 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :
7. Il résulte du second de ces textes que, lorsque les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation mentionnées au premier ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement ou sont erronées, la nullité de ce contrat est encourue.
8. Pour rejeter la demande d'annulation des contrats formée par les acquéreurs, l'arrêt retient que l'article L. 121-21-1 du code de la consommation dispose que, lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies au client dans des conditions conformes, le délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l'expiration du délai initial, que les acquéreurs pouvaient se rétracter jusqu'au 1er juin 2017, mais qu'ils n'ont pas entendu exercer cette faculté.
9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les bons de commande ne mentionnaient pas un point de départ erroné du délai de rétractation lequel courait à compter de la livraison du bien, de sorte que la nullité des contrats était également encourue, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
10. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation
des chefs de dispositif de l'arrêt rejetant les demandes d'annulation des contrat de vente et de crédit affecté formées par les acquéreurs, les condamnant solidairement à restituer à la banque le capital emprunté, soit la somme de 29 900 euros, déduction faite des échéances déjà prélevées sur leur compte, entraîne la cassation des chefs de dispositif prononçant la résolution judiciaire des contrat de vente et de crédit affecté aux torts du vendeur qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du premier moyen et du deuxième moyen, subsidiaire, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes d'annulation des contrat de vente et de crédit affecté formées par M. et Mme [V], prononce la résolution judiciaire des contrat de vente et de crédit affecté aux torts de la société Francenergy et condamne solidairement M. et Mme [V] à restituer à la société Cofidis le capital emprunté, soit la somme de 29 900 euros, déduction faite des échéances déjà prélevées sur leur compte, l'arrêt rendu le 24 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Cofidis aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Cofidis et la condamne à payer à M. et Mme [V] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le neuf juillet deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.