LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 2 juillet 2025
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, présidente
Arrêt n° 476 FS-B
Pourvoi n° Z 23-16.329
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 JUILLET 2025
1°/ Mme [V] [R], épouse [L], domiciliée [Adresse 5],
2°/ M. [H] [R], domicilié [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° Z 23-16.329 contre l'arrêt rendu le 14 mars 2023 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [O] [R], domicilié [Adresse 2],
2°/ à M. [M] [R],
3°/ à Mme [A] [B], épouse [R],
domiciliés tous deux [Adresse 4],
4°/ à M. [I] [U], domicilié [Adresse 7],
5°/ à M. [G] [U], domicilié [Adresse 6],
6°/ à Mme [Z] [U], épouse [N], domiciliée [Adresse 3] (Suisse),
pris tous trois en qualité d'héritiers de [P] [U],
7°/ à M. [D] [R], domicilié [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseillère, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de Mme [V] [R] et de M. [H] [R], de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de M. [O] [R], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de MM. [I] et [G] [U] et de Mme [Z] [U], et l'avis de Mme Picot-Demarcq, avocate générale référendaire, après débats en l'audience publique du 20 mai 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, Mme Poinseaux, conseillère rapporteure, Mme Auroy, conseillère doyenne, M. Fulchiron, Mmes Dard, Beauvois, Agostini, conseillers, M. Duval, Mme Azar, M. Buat-Ménard, Mmes Lion, Daniel, Marilly, Vanoni-Thiery, conseillers référendaires, Mme Picot-Demarcq, avocate générale référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, de la présidente et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 14 mars 2023), [T] [R] est décédé le 27 novembre 1989, en laissant pour lui succéder son épouse, [J] [C] et leurs enfants, Mme [V] [R], MM. [H] et [O] [R] ainsi que [S] [R], lui-même décédé en 1999 en laissant pour lui succéder son épouse, Mme [B] et leurs enfants, MM. [D] et [M] [R] et [K] [R], décédée en 2003.
2. [J] [C] est décédée le 23 novembre 2001 en laissant pour lui succéder ses enfants survivants et ses petits-enfants précités.
3. Par acte authentique reçu le 25 septembre 1971 par [P] [U], notaire, [T] [R] et [J] [C] avaient consenti à leurs quatre enfants une donation-partage attribuant à Mme [V] [R], M. [H] [R] et [S] [R], chacun, des parcelles de terrain ainsi que le tiers indivis d'une maison à usage d'habitation, et à M. [O] [R] une soulte représentant la valeur du quart des actifs objet de la donation-partage.
4. M. [O] [R] a assigné ses cohéritiers en partage judiciaire en demandant la requalification de la donation-partage en donation simple.
5. Mme [V] [R] et M. [H] [R] ont assigné en garantie MM. [G] et [I] [U] et Mme [Z] [U] (les consorts [U]), héritiers de [P] [U].
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Mme [V] [R] et M. [H] [R] font grief à l'arrêt de requalifier l'acte notarié du 25 septembre 1971 en donation simple soumise au rapport, alors « qu'il n'y a de donation-partage que dans la mesure où l'ascendant effectue une répartition matérielle des biens donnés entre ses descendants ; que si l'acte, quelle qu'en soit la qualification donnée par les parties, qui n'attribue que des droits indivis à certains donataires s'analyse en une donation entre vifs en tant qu'il n'opère pas de partage, tel n'est pas le cas de l'acte qui, outre qu'il attribue des droits indivis à certains indivisaires, les allotit tous privativement par ailleurs ; qu'en retenant que l'acte du 25 septembre 1971 devait être requalifié en donation entre vifs au motif qu'il attribuait à trois des quatre donataires des droits indivis, après avoir pourtant constaté que ces trois donataires étaient par ailleurs allotis privativement de diverses parcelles de terrain, ce dont il résultait que l'acte opérait un partage et devait être qualifié de donation-partage, la cour d'appel a violé l'article 1075 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006. »
Réponse de la Cour
7. Selon l'article 1075 du code civil, toute personne peut faire, entre ses héritiers présomptifs, la distribution et le partage de ses biens et de ses droits sous forme de donation-partage.
8. Il en résulte qu'il n'y a de donation-partage que dans la mesure où l'ascendant effectue une répartition matérielle de ses biens entre ses descendants, lesquels, hors le cas prévu à l'article 1078-4 du code civil, ne peuvent être allotis conjointement entre eux.
9. Après avoir énoncé qu'il ne peut y avoir de donation-partage si les donataires ou même certains d'entre eux ont reçu des droits indivis et retenu que [T] [R] et [J] [C] n'avaient pas procédé à une répartition effective de leurs biens, dès lors qu'il résultait de l'acte du 25 septembre 1971 que Mme [V] [R], M. [H] [R] et [S] [R] étaient chacun donataires, outre de plusieurs parcelles de terrain, du tiers indivis d'une maison, c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit que cet acte devait être requalifié en donation simple soumise au rapport.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [V] [R], M. [H] [R], MM. [G] et [I] [U] et Mme [Z] [U] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [V] [R], M. [H] [R], MM. [G] et [I] [U] et Mme [Z] [U] et les condamne in solidum à payer à M. [O] [R] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le deux juillet deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.