N° F 24-87.225 F-D
N° 00853
ECF
18 JUIN 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 18 JUIN 2025
Le procureur général près la cour d'appel de Reims a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 11 décembre 2024, qui a relaxé M. [C] [F] des chefs de conduite après usage de stupéfiants et infraction à la législation sur les stupéfiants, en récidive.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Tessereau, conseiller, et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Tessereau, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [C] [F] a été contrôlé par des agents de police judiciaire, le 6 janvier 2023, alors qu'il conduisait à vive allure un véhicule dépourvu de vitre arrière. Les policiers ont constaté dans le véhicule la présence d'un sachet qu'ils ont appréhendé, qui s'est avéré contenir de la cocaïne.
3. Les juges du premier degré ont relaxé M. [F] du chef de détention de stupéfiants, mais l'ont condamné pour conduite d'un véhicule en ayant fait usage de produits stupéfiants, en récidive.
4. M. [F] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen est pris de la violation des articles 53 et 78-2-3 du code de procédure pénale.
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a fait droit aux conclusions de nullité présentées par M. [F], annulé le procès-verbal de saisine-interpellation du 6 janvier 2023 et l'ensemble des actes subséquents, et relaxé le prévenu, alors que les agents de police judiciaire ont agi en flagrance puisqu'il existait des indices apparents d'un comportement délictueux.
Réponse de la Cour
Vu les articles 53 et 78-2-3 du code de procédure pénale :
7. Aux termes du second de ces textes, les officiers de police judiciaire assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints, peuvent procéder à la visite des véhicules circulant ou arrêtés sur la voie publique ou dans les lieux accessibles au public lorsqu'il existe à l'égard du conducteur ou d'un passager une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis, comme auteur ou comme complice, un crime ou un délit flagrant.
8. Selon le premier, est qualifié crime ou délit flagrant, celui qui se commet actuellement ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l'action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d'objets, ou présente des traces et indices, laissant penser qu'elle a participé au crime ou au délit.
9. Il s'ensuit que pour que les officiers ou agents de police judiciaire puissent agir en flagrant délit, il suffit qu'ils aient connaissance d'indices apparents d'un comportement délictueux, cette notion se déduisant des circonstances.
10. Pour faire droit au moyen de nullité, selon lequel il n'existait aucun délit flagrant autorisant la visite du véhicule de M. [F], l'arrêt attaqué énonce que les policiers n'ont relevé dans leur procès-verbal aucun indice apparent d'un comportement délictueux préalablement à la visite du véhicule, que la seule présence dans le véhicule d'un « pochon type brunâtre » ne suffisait pas à soupçonner l'existence d'un délit flagrant consommé ou tenté, en l'absence de tout autre élément.
11. Les juges en déduisent que la flagrance n'a été révélée aux policiers que postérieurement à la saisie de l'objet ayant permis de constater la présence de produits stupéfiants dans le véhicule.
12. En statuant ainsi, alors que le procès-verbal mentionnait que M. [F] conduisait à vive allure un véhicule dépourvu de vitre arrière, qu'il paraissait nerveux lors de son interpellation, qu'il n'était en possession ni du certificat d'immatriculation ni d'un permis de conduire, et qu'il a été constaté dans le véhicule la présence d'un sachet brunâtre, dont le prévenu a affirmé ignorer le contenu, ce qui caractérisait l'existence d'indices préalables et apparents d'un comportement délictueux, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés.
13. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Reims, en date du 11 décembre 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Reims et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit juin deux mille vingt-cinq.