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18/06/2025 | FRANCE | N°23-10.857

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation de section, 18 juin 2025, 23-10.857


SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 18 juin 2025




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 685 FS-B

Pourvoi n° B 23-10.857


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 JUIN 2025

Le syndicat CFE-CGC Orange, dont le siège est [Adresse 2

], a formé le pourvoi n° B 23-10.857 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à la Féd...

SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 18 juin 2025




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 685 FS-B

Pourvoi n° B 23-10.857


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 JUIN 2025

Le syndicat CFE-CGC Orange, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 23-10.857 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à la Fédération communication conseil culture (F3C) CFDT, dont le siège est [Adresse 6],

2°/ à la Fédération CGT des activités postales et de télécommunications (FAPT), dont le siège est [Adresse 5],

3°/ à la fédération syndicaliste Force ouvrière de la communication (FO COM), dont le siège est [Adresse 7],

4°/ à la société Orange Caraïbes, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

5°/ à la société Orange, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],


6°/ à la fédération des syndicats Solidaires, unitaires et démocratiques des activités postales et de télécommunications SUD PTT, dont le siège est [Adresse 4],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, sept moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat du syndicat CFE-CGC Orange, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la Fédération communication, conseil, culture (F3C) CFDT, de la Fédération CGT des activités postales et de télécommunications et de la fédération syndicaliste Force ouvrière de la communication, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat des sociétés Orange Caraïbes et Orange, les plaidoiries de Mes Hazan et Célice, et l'avis de Mme Canas, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 mai 2025 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen et rapporteur, Mmes Ott, Sommé, Bouvier, Bérard, M. Dieu, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Ollivier, Arsac, conseillers référendaires, Mme Canas, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 novembre 2022), un accord dit « accord sur le dialogue social » a été signé le 13 mai 2019 entre la société Orange et la société Orange Caraïbe, composant l'unité économique et sociale Orange (l'UES) d'une part, et la Fédération des syndicats solidaires unitaires et démocratiques des activités postales et de télécommunications SUD PTT, la Fédération communication conseil culture CFDT, la Fédération syndicaliste force ouvrière de la communication et la Fédération nationale des salariés du secteur des activités postales et de télécommunications CGT d'autre part.

2. Cet accord a pour objet la mise en place des comités sociaux et économiques d'établissement (CSEE), du comité social et économique central (CSEC) ainsi que des représentants de proximité et définit le nouveau cadre du dialogue social au sein de l'UES.


3. Par acte du 11 juillet 2019, le syndicat CFE-CGC Orange, syndicat non signataire de l'accord, a assigné la société Orange, la société Orange Caraïbe et les organisations syndicales signataires de l'accord devant le tribunal judiciaire afin de faire annuler plusieurs articles de l'accord du 13 mai 2019 portant sur le dialogue social au sein de l'UES et d'enjoindre aux parties à cet accord d'entamer des négociations ayant pour objet de substituer aux clauses annulées de nouvelles stipulations conformes aux dispositions du code du travail.

Examen des moyens

Sur le cinquième moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le syndicat CFE-CGC Orange fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'annulation de l'article 8.1.2 de l'accord collectif et d'injonction des parties à l'accord d'entamer des négociations ayant pour objet de substituer à la clause annulée de nouvelles stipulations en conformité avec les dispositions du code du travail, alors « que le comité social et économique d'établissement dispose des mêmes attributions que le comité social et économique dans la limite des pouvoirs qui sont confiés au chef d'établissement et peut notamment recourir à un expert lorsqu'il est compétent ; qu'il s'agit d'un droit auquel il ne peut être dérogé par accord ; qu'en l'espèce, l'article 8.1.1 de l'accord collectif sur le dialogue social de l'UES Orange prévoit que les comités sociaux et économiques d'établissement institués au sein de l'UES sont consultés sur la politique sociale, les conditions de travail et d'emploi au sein de leur établissement mais l'article 8.1.2 les prive de leur droit de recours à un expert lors de cette information-consultation ; qu'en jugeant que la possibilité pour le CSEE de recourir à un expert lorsqu'il est compétent ne revêtait pas un caractère d'ordre public et qu'« il était loisible aux partenaires sociaux de décider que l'expertise serait diligentée seulement au niveau du CSEC », la cour d'appel a violé les articles L. 2312-19, L. 2316-20 et L. 2316-21 du code du travail.»

Réponse de la Cour

6. Aux termes de l'article L. 2316-21 du code du travail, le comité social et économique d'établissement peut faire appel à un expert prévu à la sous-section 10 de la section 3 du chapitre V du présent titre lorsqu'il est compétent conformément aux dispositions du présent code.
7. Selon l'article L. 2312-19, 3°, du même code, un accord d'entreprise peut définir les niveaux auxquels les consultations sont conduites et, le cas échéant, leur articulation.

8. Aux termes de l'article 5 de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne, intitulé « Information et consultation découlant d'un accord », les États membres peuvent confier aux partenaires sociaux au niveau approprié, y compris au niveau de l'entreprise ou de l'établissement, le soin de définir librement et à tout moment par voie d'accord négocié les modalités d'information et de consultation des travailleurs. Ces accords, et les accords existant à la date figurant à l'article 11, ainsi que les éventuelles prorogations ultérieures de ces accords, peuvent prévoir, dans le respect des principes énoncés à l'article 1er et dans des conditions et limites fixées par les États membres, des dispositions différentes de celles visées à l'article 4.

9. Le considérant 23 de la directive indique à cet égard que l'objectif de la présente directive sera atteint en établissant un cadre général reprenant les principes, les définitions et les modalités en matière d'information et de consultation, que les États membres devront respecter et adapter à leurs réalités nationales, en assurant, le cas échéant, aux partenaires sociaux un rôle prépondérant en leur permettant de définir librement, par voie d'accord, les modalités d'information et de consultation des travailleurs qu'ils jugent les plus conformes à leurs besoins et à leurs souhaits.

10. Il en résulte que les signataires d'un accord collectif conclu en application des dispositions de l'article L. 2312-19 du code du travail peuvent réserver au comité social et économique central le droit à expertise portant sur la politique sociale, les conditions de travail et l'emploi, quand bien même l'accord collectif prévoit que l'information - consultation sur certains thèmes de la politique sociale, des conditions de travail et de l'emploi est menée au niveau des comités sociaux et économiques d'établissement.

11. En conséquence, c'est à bon droit que la cour d'appel a rejeté la demande d'annulation de l'article 8.1.2 de l'accord sur le dialogue social au sein de l'UES Orange.

12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

13. Le syndicat CFE-CGC Orange fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'annulation de l'article 18 de l'accord collectif et d'injonction des parties à l'accord d'entamer des négociations ayant pour objet de substituer à la clause annulée de nouvelles stipulations en conformité avec les dispositions du code du travail, alors :

« 1°/ que le comité social et économique est compétent en matière de présentation des réclamations, tant individuelles que collectives, des salariés ; que cette attribution est d'ordre public et qu'il ne peut en être privé par accord ; qu'en l'espèce, l'article 18 de l'accord collectif réserve exclusivement aux représentants de proximité la prise en charge des réclamations individuelles et collectives des salariés ; qu'en jugeant que cette attribution du CSE n'était pas d'ordre public et pouvait être exclue du champ de la négociation, la cour d'appel a violé les articles L. 2312-5, L. 2312-8 et L. 2312-4 du code travail ;

2°/ que subsidiairement sauf exception prévues par la loi, le fait qu'une disposition légale ne soit pas d'ordre public autorise seulement à ce qu'il y soit dérogé par des dispositions conventionnelles plus favorables ; que la disposition d'un accord collectif qui prive le comité social et économique de la possibilité de présenter des réclamations, tant individuelles que collectives, n'est pas plus favorable que les dispositions du code du travail qui prévoient une telle attribution ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 2251-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

14. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2312-5 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, la délégation du personnel au comité social et économique a pour mission de présenter à l'employeur les réclamations individuelles ou collectives relatives aux salaires, à l'application du code du travail et des autres dispositions légales concernant notamment la protection sociale, ainsi que des conventions et accords applicables dans l'entreprise.

15. Selon l'article L. 2312-8, IV, du même code, le comité social et économique mis en place dans les entreprises d'au moins cinquante salariés exerce les attributions prévues notamment à l'article L. 2312-5.

16. Selon l'article L. 2313-7 du même code, l'accord d'entreprise défini à l'article L. 2313-2 peut mettre en place des représentants de proximité et définit également leurs attributions, notamment en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail.

17. En l'absence de disposition législative contraire et eu égard à la finalité de l'institution des représentants de proximité, créée par l'article L. 2313-7 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, éclairée par les travaux parlementaires de la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, lesquels représentants ont vocation à exercer leur mandat de représentation des salariés au niveau du périmètre du site sur lequel ils sont désignés par le comité social et économique selon des modalités définies par l'accord d'entreprise qui les met en place, un accord d'entreprise peut confier aux représentants de proximité la mission de présenter à l'employeur les réclamations individuelles ou collectives des salariés de manière exclusive, les salariés conservant en tout état de cause, en application de l'article L. 2312-7 du code du travail, le droit de présenter eux-mêmes leurs observations à l'employeur ou à ses représentants au sein de chaque établissement.

18. En conséquence, c'est à bon droit que la cour d'appel a rejeté la demande d'annulation de l'article 18 de l'accord collectif sur le dialogue social.

19. Le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est, dès lors, pas fondé en sa première branche.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

20. Le syndicat CFE-CGC Orange fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'annulation de l'article 11.3.1.1 de l'accord collectif et d'injonction des parties à l'accord d'entamer des négociations ayant pour objet de substituer à la clause annulée de nouvelles stipulations en conformité avec les dispositions du code du travail, alors « que les réunions du comité social et économique prévues en cas d'accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves et en cas d'événement grave lié à l'activité de l'entreprise, ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l'environnement sont d'ordre public ; qu'elles ne peuvent être déléguées conventionnellement à la commission de santé, de sécurité et des conditions de travail ; qu'en l'espèce, l'article 11.3.1.1 de l'accord collectif prévoit une telle disposition ; qu'en jugeant que l'accord collectif pouvait valablement opérer ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 2315-37 du code du travail. »

Réponse de la Cour

21. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 2315-27 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, au moins quatre réunions du comité social et économique portent annuellement en tout ou partie sur les attributions du comité en matière de santé, sécurité et conditions de travail, plus fréquemment en cas de besoin, notamment dans les branches d'activité présentant des risques particuliers. Le comité est en outre réuni à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves, ainsi qu'en cas d'événement grave lié à l'activité de l'entreprise, ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l'environnement ou à la demande motivée de deux de ses membres représentants du personnel, sur les sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail.

22. Aux termes de l'article L. 2315-38 du même code, la commission santé, sécurité et conditions de travail se voit confier, par délégation du comité social et économique, tout ou partie des attributions du comité relatives à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail, à l'exception du recours à un expert prévu à la sous-section 10 et des attributions consultatives du comité.

23. Il résulte de ces textes qu'un accord d'entreprise peut confier à la commission santé, sécurité et conditions de travail la mission de se réunir à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves, ainsi qu'en cas d'événement grave lié à l'activité de l'entreprise, ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l'environnement ou à la demande motivée de deux de ses membres représentants du personnel, sur les sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail.

24. En conséquence, c'est à bon droit que la cour d'appel a rejeté la demande d'annulation de l'article 11.3.1.1 de l'accord collectif sur le dialogue social.

25. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

26. Le syndicat CFE-CGC Orange fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'annulation de l'article 13.1.1.1 de l'accord collectif et d'injonction des parties à l'accord d'entamer des négociations ayant pour objet de substituer à la clause annulée de nouvelles stipulations en conformité avec les dispositions du code du travail, alors :

« 1°/ que le rapport annuel relatif à l'organisation, au fonctionnement et à la gestion financière du service de santé au travail doit être présenté au comité social et économique ; qu'en l'espèce l'article 13.1.1.1 de l'accord collectif prévoit que le rapport ne fait pas l'objet d'une présentation réunion ; qu'en jugeant qu'une mise à disposition du rapport dans la Base de Données Economiques et Sociales (BDES) était suffisante, la cour d'appel a violé l'article D. 4622-54 du code du travail dans sa version en vigueur en l'espèce ;

2°/ que, sauf exception prévues par la loi, le fait qu'une disposition légale ne soit pas d'ordre public autorise seulement à ce qu'il y soit dérogé par des dispositions conventionnelles plus favorables ; qu'en jugeant que la présentation du rapport au comité social et économique n'était pas une disposition d'ordre public pour rejeter la demande du syndicat d'annulation de cette disposition sans caractériser que la disposition de l'accord, qui prévoyait seulement une mise à disposition du rapport dans la BDES, était plus favorable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2251-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

27. Aux termes de l'article D. 4622-54 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause, l'employeur ou le président du service de santé au travail interentreprises établit et présente le rapport annuel relatif à l'organisation, au fonctionnement et à la gestion financière du service de santé au travail soit au comité social et économique, soit au comité interentreprises ou à la commission de contrôle et au conseil d'administration. Cette présentation est faite au plus tard à la fin du quatrième mois qui suit l'année pour laquelle il a été établi. L'instance mentionnée au premier alinéa peut faire toute proposition relative à l'organisation, au fonctionnement, à l'équipement et au budget du service de santé au travail, notamment sur le financement des examens médicaux complémentaires prévus à l'article R. 4624-25.

28. Selon l'article L. 2312-19 du même code, un accord d'entreprise, conclu dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 2232-12 ou, en l'absence de délégué syndical, un accord entre l'employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, peut définir le contenu, la périodicité et les modalités des consultations récurrentes du comité social et économique mentionnées à l'article L. 2312-17 ainsi que la liste et le contenu des informations nécessaires à ces consultations.

29. Selon l'article L. 2312-21 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause, un accord d'entreprise conclu dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 2232-12 ou, en l'absence de délégué syndical, un accord entre l'employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, définit l'organisation, l'architecture et le contenu de la base de données économiques et sociales.

30. Il en résulte que l'accord collectif conclu dans les conditions précitées peut prévoir que la présentation du rapport annuel relatif à l'organisation, au fonctionnement et à la gestion financière du service de santé au travail au comité social et économique sera effectuée par la mise à disposition du comité social et économique de ce rapport dans la base de données économiques et sociales.

31. L'arrêt constate qu'aux termes de l'article 13.1.1.1. de l'accord collectif du 13 mai 2019 les parties conviennent que le rapport administratif et financier du service de santé au travail est mis à la disposition des élus dans la base de données économiques et sociales et que ce rapport ne fait pas l'objet d'une présentation en réunion.

32. En conséquence, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que l'article 13.1.1.1. de l'accord collectif sur le dialogue social pouvait prévoir cette modalité de présentation du rapport annuel au comité social et économique et que la demande en annulation de cette disposition devait être rejetée.

33. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le sixième moyen

Enoncé du moyen

34. Le syndicat CFE-CGC Orange fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'annulation des articles 21.3.6.1, 21.3.6.2, 21.3.6.3 et 21.4 de l'accord collectif et d'injonction des parties à l'accord d'entamer des négociations ayant pour objet de substituer aux clauses annulées de nouvelles stipulations en conformité avec les dispositions du code du travail, alors « qu'en application du principe d'égalité, un accord collectif ne peut pas prévoir une différence de traitement entre des organisations syndicales représentatives et des organisations syndicales non représentatives en ce qui concerne les droits qui se rattachent à l'exercice de prérogatives syndicales non subordonnées à une condition de représentativité ; que tous les syndicats bénéficient de la liberté de déplacement dans l'entreprise et que ce droit ne peut être facilité au seul bénéfice des syndicats représentatifs ; qu'en l'espèce, l'accord prévoit à ses articles 21.3.6.1, 21.3.6.2, 21.3.6.3 et 21.4 que les délégués syndicaux de l'entreprise bénéficient, en dehors des déplacements réalisés dans le cadre d'une invitation de l'employeur, de la prise en charge de leurs frais de déplacement et d'hébergement dans certaines limites, quand les représentants de section syndicale ne bénéficient d'aucune prise en charge de leur déplacements, sauf pour les réunions convoquées par l'entreprise ; qu'en jugeant que cette différence de traitement était permise du seul fait d'une différence d'influence entre les syndicats, la cour d'appel a violé le principe précité, ensemble l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. »

Réponse de la Cour

35. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 2142-1-1 du code du travail, figurant dans le chapitre II Section syndicale, chaque syndicat qui constitue, conformément à l'article L. 2142-1, une section syndicale au sein de l'entreprise ou de l'établissement d'au moins cinquante salariés peut, s'il n'est pas représentatif dans l'entreprise ou l'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise ou de l'établissement. Le représentant de la section syndicale exerce ses fonctions dans le cadre des dispositions du présent chapitre. Il bénéficie des mêmes prérogatives que le délégué syndical, à l'exception du pouvoir de négocier des accords collectifs.

36. Aux termes de l'article L. 2142-1-2 du même code, les dispositions des articles L. 2143-1 et L. 2143-2 relatives aux conditions de désignation du délégué syndical, celles des articles L. 2143-7 à L. 2143-10 et des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 2143-11 relatives à la publicité, à la contestation, à l'exercice et à la suppression de son mandat et celles du livre IV de la présente partie relatives à la protection des délégués syndicaux sont applicables au représentant de la section syndicale.

37. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation (Soc., 13 fév. 2013, pourvoi n° 12-19.662, Bull. V n° 43 ; Soc., 10 juillet 2024, pourvoi n° 23-12.823), en vertu de l'article L. 2142-1-1 du code du travail, la désignation d'un représentant de section syndicale est effectuée en vue de permettre au syndicat désignataire de préparer les élections.

38. Il en résulte que, si le représentant de section syndicale a le droit de circuler librement dans l'entreprise, un accord collectif peut réserver le remboursement par l'employeur, selon certaines modalités, des frais de déplacement aux seuls délégués syndicaux.

39. L'arrêt constate, par motifs propres et adoptés, que les articles 21.3.6.1 et 21.4 de l'accord collectif du 13 mai 2019 prévoient que les frais de déplacement des délégués syndicaux sont pris en charge dans la limite de douze déplacements par trimestre par délégué syndical au niveau de l'établissement distinct tandis que les représentants de section syndicale ne bénéficient pas de la prise en charge de leurs déplacements, sauf pour une réunion convoquée par l'entreprise.

40. Ayant relevé que les avantages supplémentaires attribués par l'accord collectif aux délégués syndicaux ne privaient pas les représentants de section syndicale de l'exercice de leurs prérogatives légales et que ces avantages étaient afférents à des déplacements non obligatoires ne résultant pas de réunions convoquées par l'entreprise, la cour d'appel en a déduit à bon droit que l'action en annulation des dispositions précitées de l'accord collectif sur le dialogue social devait être rejetée.

41. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.




Sur le septième moyen

Enoncé du moyen

42. Le syndicat CFE-CGC Orange fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'annulation de l'article 38 de l'accord collectif et d'injonction des parties à l'accord d'entamer des négociations ayant pour objet de substituer à la clause annulée de nouvelles stipulations en conformité avec les dispositions du code du travail, alors :

« 1°/ qu'en application du principe de loyauté de la négociation collective, l'accès à une commission de suivi d'un accord qui a pour mission d'identifier des éléments pouvant justifier la renégociation de l'accord sur certains points ne peut être réservé aux seuls signataires de l'accord ; qu'en l'espèce, c'est ce que prévoit l'article 38 de l'accord collectif ; qu'en jugeant que le syndicat CFE-CGC devrait être débouté de sa demande d'annulation de cet article au motif qu'en cas de demande de révision de l'accord postérieure, la négociation de l'accord serait ouverte à l'ensemble des organisations syndicales représentatives, la cour d'appel a violé le principe précité, ensemble l'article 1112 du code civil et l'article L. 2232-16 du code du travail ;

2°/ que le principe de loyauté de la négociation collective est d'ordre public et ne peut faire l'objet de dérogations conventionnelles; qu'en jugeant que le syndicat CFE-CGC devrait être débouté de sa demande d'annulation de cet article au motif que les dispositions relatives à la commission de suivi ne relèveraient pas de l'ordre public absolu, la cour d'appel a violé derechef le principe précité, ensemble l'article 1112 du code civil et l'article L. 2232-16 du code du travail ;

3°/ que subsidiairement, sauf exceptions prévues par la loi, le fait qu'une disposition légale ne soit pas d'ordre public autorise seulement à ce qu'il y soit dérogé par des dispositions conventionnelles plus favorables ; qu'en jugeant que le syndicat CFE-CGC devrait être débouté de sa demande d'annulation de cet article au motif que les dispositions relatives à la commission de suivi ne relèveraient pas de l'ordre public absolu, sans constater que les dispositions de cet article seraient plus favorables que les dispositions légales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2251-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

43. Aux termes de l'article L. 2222-5-1 du code du travail, la convention ou l'accord définit ses conditions de suivi et comporte des clauses de rendez-vous. L'absence ou la méconnaissance des conditions ou des clauses mentionnées au premier alinéa n'est pas de nature à entraîner la nullité de la convention ou de l'accord.

44. Aux termes de l'article L. 2261-7-1, I, du même code, sont habilitées à engager la procédure de révision d'une convention ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement :
1° Jusqu'à la fin du cycle électoral au cours duquel cette convention ou cet accord a été conclu, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord et signataires ou adhérentes de cette convention ou de cet accord ;
2° A l'issue de cette période, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord.

45. Il en résulte qu'un accord collectif peut réserver aux organisations syndicales signataires de l'accord le droit d'être membre de la commission de suivi de cet accord, dès lors que celle-ci n'a pas pour mission d'engager des négociations en vue de la révision de l'accord collectif.

46. Ayant retenu que, si l'article 38 de l'accord collectif sur le dialogue social précise que la commission de suivi « aura également pour attribution d'identifier, le cas échéant, les éléments pouvant justifier un avenant correctif à l'accord », l'article 39 de l'accord prévoit qu'en cas de demande de révision de l'accord, les négociations seront ouvertes avec l'ensemble des organisations syndicales représentatives, la cour d'appel en a déduit exactement que la demande d'annulation de l'article 38 de l'accord devait être rejetée.

47. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le syndicat CFE-CGC Orange aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le dix-huit juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation de section
Numéro d'arrêt : 23-10.857
Date de la décision : 18/06/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris K2


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation de section, 18 jui. 2025, pourvoi n°23-10.857, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.10.857
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