COMM.
LC
COUR DE CASSATION
______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 324 F-D
Pourvoi n° C 24-15.117
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
__________ _______________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
La Société générale, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Crédit du Nord, elle-même venant aux droits de la société Marseillaise de Crédit a formé le pourvoi n° C 24-15.117 contre l'arrêt rendu le 8 mars 2024 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant à M. [C] [T], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, Ã l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat de la Société générale, venant aux droits de la société Crédit du Nord, elle-même venant aux droits de la société Marseillaise de Crédit, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de M. [T], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 mars 2024), le 22 mars 2012, la Société marseillaise de crédit (la SMC) a consenti un prêt de 170 000 euros à la société EB Invest, dont M. [T] s'est porté caution à hauteur de 85 000 euros.
2. Le 6 avril 2016, un conciliateur a été désigné avec pour mission de formaliser un accord entre divers créanciers de la société EB Invest, dont les établissements bancaires, pour organiser l'apurement de son passif et fixer les engagements respectifs des parties.
3. Le 18 août 2016, un protocole d'accord a été signé entre les parties et homologué le 5 octobre 2016, prévoyant un différé d'amortissement au 21 mars 2017 de la créance de la société SCM. Le 14 mars 2017, M. [T] s'est porté caution de la société EB Invest dans la limite de 71 095,75 euros pour une durée de 9 ans.
4. Le 14 mars 2018, la société EB Invest a été mise en sauvegarde. Le 17 juillet 2019, elle a été mise en liquidation. La SMC a déclaré sa créance qui a été admise.
5. La SMC, aux droits de laquelle vient la Société générale, elle-même venue aux droits de la société Crédit du Nord, a assigné M. [T] en exécution de son engagement de caution.
Exposé du moyen
6. La Société générale fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors « que si, lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation en raison d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire du débiteur, le créancier recouvre l'intégralité de ses créances et sûretés qui les garantissaient, sans conserver le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l'accord, c'est uniquement lorsque dans le cadre de l'accord la caution a augmenté son risque, tandis que le nouveau cautionnement subsiste lorsque le nouvel accord a augmenté le risque du créancier ; qu'en l'espèce, pour juger que l'ouverture de la procédure de sauvegarde convertie en liquidation judiciaire avait mis fin de plein droit au cautionnement du 14 mars 2017, la cour d'appel a jugé que "la banque n'a donc pas consenti, pour les besoins de l'accord intervenu, une avance donnant naissance à une nouvelle créance mais a accordé des remises et des délais en procédant à une modification des modalités de l'amortissement du prêt litigieux. Le nouveau cautionnement consenti en mars 2017 par M. [C] [T] est la contrepartie des délais accordés par la banque ; la sûreté fait partie intégrante de l'accord devenu caduc dont elle constitue un élément indissociable" ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme le démontrait la Société générale, l'accord n'avait pas augmenté le risque du créancier et non celui de la caution, ce qui imposait que la garantie subsiste à la caducité de l'accord, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 611-12 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
7. L'arrêt constate que la banque n'a pas consenti, pour les besoins de l'accord de conciliation, une avance donnant naissance à une nouvelle créance mais a accordé des remises et des délais en modifiant les modalités de l'amortissement du prêt, le cautionnement consenti en mars 2017 par M. [T] en étant la contrepartie. Il en déduit que, l'ouverture de la procédure de sauvegarde ayant mis fin de plein droit audit accord dans son intégralité, en ce inclus l'engagement de caution, la banque ne peut se prévaloir du cautionnement caduc.
8. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer la recherche inopérante invoquée par le moyen relative à l'augmentation du risque du créancier, a légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Société générale, venant aux droits de la société Crédit du Nord, elle-même venant aux droits de la Société marseillaise de crédit, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Société générale, venant aux droits de la société Crédit du Nord, elle-même venant aux droits de la Société marseillaise de crédit et la condamne à payer à M. [T] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé publiquement le douze juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.