COUR DE CASSATION
Première présidence
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ORad
Pourvoi n° : V 24-19.411
Demandeur : la société Dlf Notaires
Défendeur : Mme [E] et autres
Requête n° : 26/25
Ordonnance n° : 90474 du 5 juin 2025
ORDONNANCE
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ENTRE :
M. [B] [M], ayant la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet pour avocat à la Cour de cassation,
ET :
la société Dlf Notaires, ayant la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret pour avocat à la Cour de cassation,
Dans l'instance concernant en outre :
M. [X] [O] [K], ayant la SCP Piwnica et Molinié pour avocat à la Cour de cassation,
M. [R] [K], ayant la SCP Piwnica et Molinié pour avocat à la Cour de cassation,
Mme [I] [E], ayant la SCP Piwnica et Molinié pour avocat à la Cour de cassation,
Laurent Waguette, conseiller délégué par le premier président de la Cour de cassation, assisté de Vénusia Ismail, greffier lors des débats du 10 avril 2025, a rendu l'ordonnance suivante :
Vu la requête du 9 janvier 2025 par laquelle M. [B] [M] demande, par application de l'article 1009-1 du code de procédure civile, la radiation du pourvoi numéro V 24-19.411 formé le 26 août 2024 par la société Dlf Notaires à l'encontre de l'arrêt rendu le 25 juin 2024 par la cour d'appel de Paris ;
Vu les observations développées au soutien de la requête ;
Vu les observations développées en défense à la requête ;
Vu l'avis de Françoise Pieri-Gauthier, avocat général, recueilli lors des débats ;
Par déclaration du 26 août 2024, la société DLF notaires a formé un pourvoi en cassation à l'encontre d'un arrêt du 25 juin 2024 de la cour d'appel de Paris qui lui fait injonction de communiquer divers actes à M. [M].
M. [M], défendeur au pourvoi, a déposé le 9 janvier 2025 une requête à fin de radiation arguant de ce que la société de notaires n'avait pas exécuté l'obligation de communication des divers documents qui lui était faite par l'arrêt attaqué.
La société de notaires expose qu'elle a formé un pourvoi à l'encontre des chefs de dispositif lui ayant ordonné la communication de documents en invoquant la violation du secret professionnel auquel elle est tenue et qu'ainsi, la communication des actes authentiques que détiendrait le notaire aurait nécessairement des conséquences irréversibles, puisqu'elle priverait le pourvoi de sa substance même. Elle entraînerait une violation du secret professionnel dont les effets seraient irréversibles.
Elle en conclut qu'au regard des conséquences manifestement excessives qu'entraînerait la communication des éléments litigieux, le rejet de la requête en radiation s'impose.
M. [M] fait valoir en réplique que la société de notaires ne subit aucun risque de conséquences manifestement excessives, il n'y a pas de caractère irréversible : en cas de transmission des pièces que le notaire est condamné à remettre à M. [M], elles lui seront simplement restituées si l'arrêt attaqué était cassé.
SUR CE
La communication des pièces telle qu'ordonnée par l'arrêt attaqué ne viderait pas le pourvoi de sa substance.
Les demandeurs au pourvoi citent une jurisprudence qui n'est pas comparable aux données de l'espèce. En effet, dans l'hypothèse citée, le pourvoi était formé à l'encontre d'une décision ordonnant la communication de pièces par une personne qui soutenait cependant qu'elle n'en disposait pas, dès lors il apparaît légitime de ne pas exiger l'exécution préalable de la décision avant l'examen du pourvoi qui critique précisément l'injonction faite alors qu'elle était prétendue impossible puisqu'une telle solution revient à priver le demandeur, dans l'impossibilité d'exécuter, de toute possibilité d'examen de son pourvoi.
Dans la présente espèce, les notaires font grief à l'arrêt de leur ordonner la communication de pièces alors, selon eux, qu'une telle communication n'est pas possible sans violation du secret professionnel. Que les pièces aient été communiquées ou non, le pourvoi n'est pas susceptible d'être vidée de sa substance puisqu'il appartiendra dans tous les cas à la chambre saisie de dire si la cour d'appel pouvait ou non ordonner la communication et à quelles conditions..
Dans l'hypothèse où la décision est exécutée et les pièces communiquées, cette exécution n'emporte pas de conséquences excessives ou irréversibles dès lors que la communication a été ordonnée dans le cadre d'une mesure de l'article 145 du code de procédure civile pour permettre d'obtenir des éléments de preuve nécessaires à l'introduction d'une instance future au fond. Or, si l'arrêt attaqué est cassé, les pièces communiquées devront être restituées ou détruites et, en tout état de cause, ne pourront être valablement produites au soutien d'une quelconque instance.
Enfin, le notaire ne peut craindre de se voir reprocher une violation du secret professionnel en communiquant des documents en vertu d'une décision de justice qui le condamne à ce faire.
Dans ces conditions, il y a lieu de prononcer la radiation du pourvoi.
EN CONSÉQUENCE :
L'affaire enrôlée sous le numéro V 24-19.411 est radiée.
En application de l'article 1009-3 du code de procédure civile, sauf constat de la péremption, l'affaire pourra être réinscrite au rôle de la Cour de cassation sur justification de l'exécution de la décision attaquée.
Fait à Paris, le 5 juin 2025
Le greffier,
Le conseiller délégué,
Vénusia Ismail
Laurent Waguette