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28/05/2025 | FRANCE | N°C2500722

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 mai 2025, C2500722


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° H 24-83.385 F-D


N° 00722




ECF
28 MAI 2025




CASSATION




M. BONNAL président,










R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 28 MAI 2025




M. [L] [B] et la société [1] ont formé des p

ourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa, chambre correctionnelle, en date du 2 avril 2024, qui, pour escroquerie, a condamné, le premier, à six mois d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs CFP...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° H 24-83.385 F-D

N° 00722

ECF
28 MAI 2025

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 28 MAI 2025

M. [L] [B] et la société [1] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa, chambre correctionnelle, en date du 2 avril 2024, qui, pour escroquerie, a condamné, le premier, à six mois d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs CFP d'amende, la seconde, à 4 000 000 de francs CFP d'amende, et pour fausse déclaration ou manoeuvre en Nouvelle-Calédonie ayant pour but ou effet d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits, et solidairement, à une amende douanière et au paiement des droits éludés.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Sur le rapport de Mme Bloch, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de la société [1] et de M. [L] [B], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction générale des douanes et droits indirects et de la direction du service des douanes de la Nouvelle-Calédonie, et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Bloch, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le service régional d'enquête des douanes de Nouméa a procédé au contrôle des opérations d'importation de marchandises réalisées par la société [1], gérée par M. [L] [B], qui a mis en évidence des minorations des valeurs déclarées en douane par cette société.

3. Par jugement du 14 octobre 2022, le tribunal correctionnel a condamné M. [B] à six mois d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs CFP d'amende, la société [1] à 4 000 000 francs CFP d'amende et, solidairement, à 21 025 549 francs CFP d'amende douanière et au paiement des droits éludés.

4. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'intégralité des exceptions de nullité soulevées par les prévenus, a déclaré la société [1] et M. [B] coupables de fausses déclarations ayant pour but d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits et d'escroquerie, et a prononcé sur la peine, la sanction douanière et le paiement des droits, alors « qu'en vertu du principe du secret du délibéré, seuls doivent participer au délibéré les juges devant lesquels l'affaire a été plaidée, à l'exclusion du greffier et du représentant du ministère public ; en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt que Mme Abentin, greffier, était présente « lors des débats, du délibéré », et que le ministère public était « représenté aux débats, au délibéré et au prononcé de l'arrêt par M. Philippe Faisandier, avocat général » ; en l'état de ces mentions, dont il résulte que le ministère public et le greffier ont participé au délibéré et qui, en toute hypothèse, ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction lors du délibéré, la cour d'appel a violé le principe susvisé et l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'Homme, et l'arrêt est nul. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 485, 486 et 512 du code de procédure pénale :

6. Selon ces textes, tout jugement ou arrêt doit établir la régularité de la composition de la juridiction qui l'a rendu.

7. Il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le greffier et le représentant du ministère public étaient présents lors du délibéré.

8. En l'état de ces énonciations, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction.

9. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

Et sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'intégralité des exceptions de nullité soulevées par les prévenus, a déclaré la société [1] et M. [B] coupables de fausses déclarations ayant pour but d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits et d'escroquerie, et a prononcé sur la peine, la sanction douanière et le paiement des droits, alors :

« 1°/ que selon l'article 406 du code de procédure pénale, devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des conseillers, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; la méconnaissance de cette obligation d'information fait nécessairement grief au prévenu ; en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt qu'après que « le président a constaté l'absence des prévenus », M. [L] [B], prévenu, a été entendu « en personne et pour le compte de la Sarl [1] (RCS 521 179) en ses explications » ; ces mentions contradictoires sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience, qui ne peuvent être complétées par les notes d'audience non signées du greffier et du président, ne mettent pas la Cour de cassation en mesure d'établir si le président devait ou non leur notifier leur droit de se taire ; en cet état, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé, outre les droits de la défense, et l'arrêt est nul d'une nullité d'ordre public ;

2°/ que selon l'article 513 du code de procédure pénale, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole en dernier ; cette même contradiction sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience ne permet pas non plus à la Cour de cassation de déterminer si les prévenus devaient avoir la parole en dernier, le récit du déroulement des débats s'achevant par les réquisitions du ministère public ; la cour d'appel a donc également violé l'article 513 du code de procédure pénale et les droits de la défense ;

3°/ que même à supposer que la chambre criminelle se considère en mesure d'affirmer que les prévenus n'étaient pas comparants, les énonciations de l'arrêt, qui ne peuvent être complétées par les notes d'audience non signées par le greffier et le président, n'établissent pas que leur avocat, qui était présent à l'audience, a eu la parole en dernier ; la cour d'appel a donc violé l'article 513 du code de procédure pénale et les droits de la défense. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 406, 512, 513, alinéa 4, et 593 du code de procédure pénale :

11. Selon le premier et le deuxième de ces textes, devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. La méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief.

12. Aux termes du troisième, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole les derniers.

13. Il résulte du dernier que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

14. Il ressort des mentions de l'arrêt attaqué que, d'une part, M. [B] et la société [1], dont il est constaté l'absence à l'audience, sont représentés par leur avocat et le président n'a pas été en mesure de donner au prévenu, absent, l'avertissement prévu par les dispositions de l'article 132-29 du code pénal sur le sursis simple, d'autre part, lors des débats, M. [B] a été entendu en ses explications, enfin, l'avocat des prévenus l'a été en sa plaidoirie avant les réquisitions du ministère public.

15. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.

16. En effet, les mentions de l'arrêt, lesquelles ne peuvent être complétées par les notes d'audiences qui ne sont ni signées par le greffier, ni visées par le président, sont contradictoires sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience, de sorte qu'elles ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer s'ils devaient être informés de leur droit de se taire, et font apparaître que le ministère public a été entendu après que l'avocat des prévenus eut présenté ses moyens de défense.

17. La cassation est donc également encourue de ce chef.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nouméa, en date du 2 avril 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nouméa et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2500722
Date de la décision : 28/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Noumea, 02 avril 2024


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 mai. 2025, pourvoi n°C2500722


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:C2500722
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