La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/05/2025 | FRANCE | N°23-18.781

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation de section, 28 mai 2025, 23-18.781


CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 28 mai 2025




Cassation partielle


M. BOYER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 263 FS-B

Pourvoi n° Q 23-18.781




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025

1°/ la Société mutuel

le d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ la société Cobeima, société ...

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 28 mai 2025




Cassation partielle


M. BOYER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 263 FS-B

Pourvoi n° Q 23-18.781




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025

1°/ la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ la société Cobeima, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 4],

ont formé le pourvoi n° Q 23-18.781 contre l'arrêt rendu le 24 mai 2023 par la cour d'appel de Rouen (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Bois et matériaux, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la societé Zurich Insurance Public Limited Company, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics et de la société Cobeima, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat des sociétés Bois et matériaux et Zurich Insurance Public Limited Company, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er avril 2025 où étaient présents M. Boyer, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, Mme Abgrall, conseiller faisant fonction de doyen, MM. Pety, Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 24 mai 2023), procédant à la réhabilitation de plusieurs logements, l'OPH Alcéane a confié la réalisation du lot bardage à la société Cobeima, assurée auprès de la SMABTP, qui s'est approvisionnée en chevrons de bois auprès de la société Bois et matériaux, assurée auprès de la société Zurich Insurance Public Limited Company (la société Zurich).

2. Une assurance dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la SMABTP.

3. Constatant, après réception, l'instabilité de plusieurs panneaux de bardage, l'OPH Alcéane a déclaré le sinistre à la SMABTP.

4. Se prévalant du défaut de traitement des chevrons, la société Cobeima et la SMABTP, en sa double qualité, ont assigné, après le dépôt du rapport d'expertise, par actes des 20 et 25 mai 2020, les sociétés Bois et matériaux et Zurich en paiement sur le fondement de la garantie des vices cachés.

5. Le 1er décembre 2021, l'assureur dommages-ouvrage a versé une indemnité à l'OPH Alcéane.

6. Les sociétés Bois et matériaux et Zurich leur ont notamment opposé une fin de non-recevoir tirée de la prescription.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. La SMABTP, assureur de la société Cobeima, fait grief à l'arrêt de déclarer forcloses ses demandes formées contre les sociétés Bois et matériaux et Zurich sur le fondement de la garantie des vices cachés, alors « que le bref délai de l'action récursoire fondée sur la garantie des vices cachés, exercée par l'entrepreneur à l'encontre de son fournisseur, ne court pas à compter du jour de la révélation du vice à l'acquéreur, mais de la date où l'entrepreneur est lui-même assigné ou, en l'absence d'assignation, à la date où le paiement d'une somme d'argent lui est réclamé ; que la cour d'appel a énoncé que le délai de l'article 1648 du code civil court à compter de la découverte du vice, ou de sa connaissance certaine, et que la société Cobeima et la SMABTP avaient eu connaissance de l'origine du vice dès les notes d'analyse du cabinet Steen des 15 juin et 25 juillet 2017, de sorte que le délai de prescription avait commencé à courir le 25 juillet 2017 au plus tard et que, les assignations ayant été délivrées en mai 2020, le recours était « forclos » ; qu'en statuant ainsi, quand, s'agissant du recours de l'assureur subrogé dans les droits d'un entrepreneur contre le vendeur de la chose viciée, et son assureur, le délai de l'action récursoire du premier contre les seconds courait, en l'absence d'assignation de l'entrepreneur par le maître d'ouvrage ou l'assureur dommages-ouvrage qui l'avait indemnisé, à compter de la date à laquelle ces derniers avaient été en mesure de réclamer à l'entrepreneur une somme d'argent en indemnisation du préjudice causé par les vices cachés affectant les matériaux vendus, la cour d'appel a violé l'article 1648 du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

8. Les sociétés Bois et matériaux et Zurich contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent que le moyen est nouveau et incompatible avec la thèse soutenue devant la cour d'appel.

9. Cependant, le moyen est de pur droit et n'est pas incompatible avec la thèse de la SMABTP, assureur de responsabilité de la société Cobeima, qui soutenait, dans ses conclusions d'appel, que le point de départ du délai de l'action fondée sur la garantie des vices cachés devait être fixé, en l'absence d'assignation, à la date de la réclamation d'un paiement à l'entrepreneur.

10. Le moyen est donc recevable.



Bien-fondé du moyen

Vu l'article 1648, alinéa 1er, du code civil :

11. Aux termes de ce texte, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.

12. Il est jugé, en matière d'action récursoire, que la prescription applicable au recours d'une personne assignée en responsabilité contre un tiers qu'il estime coauteur du même dommage a pour point de départ l'assignation qui lui a été délivrée, même en référé, si elle est accompagnée d'une demande de reconnaissance d'un droit (Ch. mixte., 19 juillet 2024, pourvoi n° 22-18.729, publié). Tel est le cas du recours d'un constructeur, assigné en responsabilité par le maître de l'ouvrage, contre un autre constructeur ou son sous-traitant (3e Civ., 14 décembre 2022, pourvoi n° 21-21.305, publié). De même, la prescription biennale de l'action récursoire en garantie des vices cachés court à compter de l'assignation (Ch. mixte, 21 juillet 2023, pourvois n° 20-10.763 ; n° 21-19.936, publiés).

13. L'action en garantie des vices cachés exercée à l'encontre du fournisseur ou de l'assureur de celui-ci par le constructeur ou son assureur, après indemnisation amiable du maître de l'ouvrage ou de l'assureur dommages-ouvrage subrogé dans les droits de ce dernier, tend à faire supporter par les premiers la dette de réparation du constructeur à l'égard du maître de l'ouvrage.

14. Il en résulte que le délai de prescription de cette action ne court pas à compter de la connaissance du vice par le constructeur mais à compter de l'assignation en responsabilité qui lui a été délivrée, ou, à défaut, à compter de l'exécution de son obligation à réparation.

15. Pour déclarer irrecevable la demande de la SMABTP, assureur de responsabilité de la société Cobeima, l'arrêt retient que cet assureur, qui a remboursé en exécution du contrat d'assurance l'indemnité que l'assureur dommages-ouvrage avait versée au maître de l'ouvrage, n'exerce pas une action récursoire après avoir été assigné, de sorte que, le délai biennal de l'article 1648 du code civil courant à compter de la découverte du vice par l'entreprise, soit en l'espèce, le 25 juillet 2017, date des conclusions de l'expert amiable, l'action en garantie des vices cachés introduite en mai 2020 est tardive.

16. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare forcloses les demandes formées par la SMABTP contre les sociétés Bois et matériaux et Zurich Insurance Public Limited Company sur le fondement du vice caché et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 24 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne les sociétés Bois et matériaux et Zurich Insurance Public Limited Company aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-huit mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation de section
Numéro d'arrêt : 23-18.781
Date de la décision : 28/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation de section, 28 mai. 2025, pourvoi n°23-18.781, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.18.781
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award