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27/05/2025 | FRANCE | N°24-10.866

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation de section, 27 mai 2025, 24-10.866


SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 27 mai 2025




Cassation sans renvoi


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 548 FS-B

Pourvoi n° H 24-10.866


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2025

La société SNCF voyageurs, société anon

yme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 24-10.866 contre le jugement rendu le 31 octobre 2023 par le conseil de prud'hommes de Bobigny (section commerce),...

SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 27 mai 2025




Cassation sans renvoi


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 548 FS-B

Pourvoi n° H 24-10.866


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2025

La société SNCF voyageurs, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 24-10.866 contre le jugement rendu le 31 octobre 2023 par le conseil de prud'hommes de Bobigny (section commerce), dans le litige l'opposant à M. [J] [I], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lacquemant, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de la société SNCF voyageurs, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [I], et l'avis de Mme Roques, avocat général référendaires, après débats en l'audience publique du 28 avril 2025 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lacquemant, conseiller rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Degouys, Nirdé-Dorail, Palle, Ménard, Filliol, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, MM. Chiron, Leperchey, conseillers référendaires, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Bobigny, 31 octobre 2023), M. [I] a été engagé par la société SNCF, aux droits de laquelle vient la société SNCF voyageurs, le 12 mars 2001 et occupe le poste d'attaché opérateur.

2. Le 10 novembre 2022, le salarié a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir le paiement d'une somme au titre de frais professionnels exposés afin d'obtenir la délivrance du passe sanitaire imposé par la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief au jugement de le condamner à payer au salarié une somme au titre des frais professionnels, alors « que seuls les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent lui être remboursés ; que les mesures exigeant des salariés de certains secteurs économiques la présentation d'un passe sanitaire pour travailler n'étaient pas imposées par leur employeur mais instaurées par les pouvoirs publics afin de ralentir la propagation du virus, dans un objectif de santé publique, et que ce passe sanitaire était également indispensable pour exercer certaines activités extra-professionnelles et se rendre dans certains endroits autres que le lieu de travail ; que les dépenses engagées par les salariés qui, ayant choisi de ne pas être vaccinés, devaient pratiquer régulièrement, durant la crise sanitaire, des tests de dépistage de la Covid-19 non remboursés par l'Assurance maladie, faute de prescription médicale, n'étaient donc pas exposées par le salarié dans l'intérêt de leur employeur ; qu'en décidant néanmoins que le coût des tests de dépistage, qui n'étaient rendus obligatoires que par un choix personnel d'absence volontaire de schéma vaccinal, constituait des frais professionnels que l'employeur devait rembourser au salarié, le conseil de prud'hommes a violé par fausse application l'article L. 1221-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

4. Le salarié conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que le moyen est nouveau, voire contraire, à l'argumentation soutenue devant les juges du fond.

5. Cependant, le moyen qui soutient que les dépenses engagées par le salarié ne l'ont pas été dans l'intérêt de l'employeur n'est pas contraire à l'argumentation selon laquelle ces dépenses n'ont pas été engagées dans le seul intérêt de l'employeur. Le moyen n'est pas davantage nouveau.

6. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu la règle selon laquelle les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur :

7. Selon la règle susvisée, les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être remboursés sans qu'il ne puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due.

8. Selon l'article 1er-II A 2° de la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, modifiée par la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 puis par la loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021, à compter du 2 juin 2021 et jusqu'au 31 juillet 2022 inclus, le Premier ministre peut, par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, dans l'intérêt de la santé publique, aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de Covid-19 et si la situation sanitaire le justifie au regard de la circulation virale ou de ses conséquences sur le système de santé, appréciées en tenant compte des indicateurs sanitaires tels que le taux de vaccination, le taux de positivité des tests de dépistage, le taux d'incidence ou le taux de saturation des lits de réanimation, subordonner à la présentation soit du résultat d'un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la Covid-19, soit d'un justificatif de statut vaccinal concernant la Covid-19, soit d'un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la Covid-19 l'accès à certains lieux, établissements, services ou événements où sont exercées notamment les activités suivantes : (...)
e) Les déplacements de longue distance par transports publics interrégionaux au sein de l'un des territoires mentionnés au 1° du présent A, sauf en cas d'urgence faisant obstacle à l'obtention du justificatif requis ; (...)
Cette réglementation est rendue applicable au public et, à compter du 30 août 2021, aux personnes qui interviennent dans ces lieux, établissements, services ou événements lorsque la gravité des risques de contamination en lien avec l'exercice des activités qui y sont pratiquées le justifie, au regard notamment de la densité de population observée ou prévue.

9. Selon l'article 47-1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021, modifié par le décret n° 2021-1059 du 7 août 2021, à défaut de présentation de l'un des documents prévus par les dispositions légales, l'accès aux déplacements de longue distance par transports publics interrégionaux est refusé.

10. Il en résulte que l'obligation de présenter les documents prévus aux textes susvisés n'étant pas inhérente à l'emploi du salarié mais à la nécessité d'accéder à des lieux déterminés par la loi, au nombre desquels figurent les locaux de l'entreprise, dans un objectif de protection de la santé publique afin de limiter les risques de contamination par le virus, les frais de dépistage de la Covid-19 engagés par le salarié n'ont pas été exposés dans l'intérêt de l'employeur et ne constituent pas des frais professionnels.

11. Pour condamner l'employeur à rembourser au salarié, au titre des frais professionnels, le coût des tests de dépistage de la Covid-19 effectués par ce dernier pour obtenir la délivrance du passe sanitaire lui permettant d'accéder à son lieu de travail, le jugement retient que le salarié, qui a fait le choix de ne pas se faire vacciner, a l'obligation de faire des tests pour aller travailler, que ces frais engagés dans l'intérêt de l'employeur pour permettre à l'agent, ayant refusé la vaccination, d'exercer son activité professionnelle, sont exposés dans l'intérêt de la clientèle qui est celui de l'employeur.

12. En statuant ainsi, le conseil de prud'hommes a violé la règle susvisée.

Portée et conséquences de la cassation

13. Tel que suggéré par le demandeur au pourvoi, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

14. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

15. Les dépenses dont le salarié sollicite le remboursement ne constituant pas des frais professionnels, il y a lieu de rejeter la demande formée à ce titre.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 31 octobre 2023, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Bobigny ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déboute M. [I] de ses demandes en paiement de la somme de 371,64 euros au titre des frais professionnels et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [I] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant le conseil de prud'hommes ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le vingt-sept mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation de section
Numéro d'arrêt : 24-10.866
Date de la décision : 27/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Bobigny


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation de section, 27 mai. 2025, pourvoi n°24-10.866, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:24.10.866
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