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22/05/2025 | FRANCE | N°23-18.395

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 22 mai 2025, 23-18.395


CIV. 3

FC



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 22 mai 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 265 F-D

Pourvoi n° V 23-18.395




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 MAI 2025

La société Sagec Méditerranée, société par actions simplifiée, dont le

siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 23-18.395 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige l'opposant :

1°/...

CIV. 3

FC



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 22 mai 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 265 F-D

Pourvoi n° V 23-18.395




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 MAI 2025

La société Sagec Méditerranée, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 23-18.395 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [S] [B], domicilié [Adresse 1],

2°/ à Mme [X] [U], épouse [O], domiciliée [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grall, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Sagec Méditerranée, de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de Mme [U], épouse [O], après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grall, conseiller rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 juin 2023), bénéficiaire d'une promesse de vente d'un bien immobilier, la société Sagec Méditerranée, envisageant une opération de promotion immobilière nécessitant la libération des lieux par tous les occupants, a conclu, le 13 octobre 2014, un protocole d'accord avec Mme [O], locataire depuis 1989 d'un appartement dépendant de cet immeuble.

2. Aux termes de ce protocole d'accord, la société Sagec Méditerranée s'est notamment engagée à reloger Mme [O] « dans la future opération » et à prendre en charge l'intégralité du loyer de son logement temporaire « pendant toute la durée de l'occupation correspondant à la durée du chantier de la future opération et à la prise de possession du futur logement désigné par Mme [O] », la prise de possession du logement dans la future résidence étant prévue en mars 2017.

3. En exécution de son engagement, la société Sagec Méditerranée a pris à bail, le 15 octobre 2014, un logement appartenant à M. [B] pour y loger Mme [O].

4. Après avoir été acquis par la société Sagec Méditerranée, le bien, objet de l'opération de promotion immobilière, a été vendu en l'état futur d'achèvement à des sociétés tierces les 22 mars 2016 et 2 février 2017.

5. La société Sagec Méditerranée a donné congé à M. [B], à effet du 30 août 2020 et a cessé de régler le loyer. Mme [O] n'a pas libéré les lieux.

6. M. [B] a délivré à la société Sagec Méditerranée, le 6 août 2021, un commandement de payer visant la clause résolutoire, dénoncé à Mme [O], puis les a assignées aux fins d'obtenir la résiliation du bail, la libération des lieux et la condamnation de la société Sagec Méditerranée au paiement d'un arriéré locatif et d'indemnités d'occupation.

7. La société Sagec Méditerranée a sollicité la condamnation de Mme [O] à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui seraient prononcées à son encontre au profit de M. [B], et Mme [O] a sollicité la condamnation de la société Sagec Méditerranée à la reloger, sous astreinte, et subsidiairement, à lui payer une certaine somme pour pouvoir se reloger.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

9. La société Sagec Méditerranée fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à M. [B] une certaine somme au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation ainsi qu'une indemnité d'occupation d'un montant mensuel égal au montant du dernier loyer et charges à compter du mois de novembre 2021, et ce jusqu'à la libération effective des lieux, de dire qu'elle prendra à sa charge les loyers, charges et indemnités d'occupation dus au titre du logement actuellement occupé par Mme [O] à compter du mois de novembre 2020 jusqu'à son départ définitif des lieux, de rejeter sa demande tendant à voir condamner Mme [O] à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations prononcées au profit de M. [B] au titre des loyers et indemnités d'occupation concernant le logement qu'elle occupe et de la condamner à payer à Mme [O] une certaine somme à titre d'indemnité pour pouvoir se reloger, alors :

« 1°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en l'espèce, la société Sagec Méditerranée, par un protocole d'accord en date du 13 avril 2014, s'était engagée "à reloger Mme [X] [O] dans la future opération, dans un appartement de trois pièces d'une superficie minimum de 65 m² avec un parking situé au 1er sous-sol et dont le montant total maximum du loyer sera de 600 euros par mois charges comprises" ; que la cour d'appel a constaté qu' "un appartement répondant aux caractéristiques décrites par le protocole a bien été proposé [au mois d'avril 2018] à Mme [O]" ; qu'en retenant néanmoins que la responsabilité contractuelle de la société Sagec Méditerranée était engagée pour n'avoir pas exécuté son obligation de relogement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 et 1147 du code civil, en leur rédaction applicable au litige ;

2°/ que l'exercice de la faculté de choix stipulée par les parties peut dégénérer en abus s'il est détourné de sa finalité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Mme [O] s'était vu proposer au moins un logement correspondant rigoureusement aux critères retenus par le protocole et situé dans la [Adresse 4], puis plusieurs autres correspondant à ses besoins et à ses capacités situés dans des résidences avoisinantes, qu'elle avait tous refusés ; que pour refuser de mettre à la charge de Mme [O] le paiement du loyer de l'appartement occupé aux
frais de la société Sagec Méditerranée pendant neuf années, la cour d'appel a retenu "qu'il ne [pouvait] lui être reproché d'avoir usé de sa faculté de choix de l'emplacement de son nouveau logement et d'avoir refusé des biens qui ne correspondaient pas aux critères prévus par le protocole" ; qu'en se déterminant ainsi, par voie de simple affirmation, en se bornant à constater que les conditions d'exercice de la faculté de choix et du droit de refuser un logement de remplacement ne respectant pas strictement les caractéristiques contractuelles étaient réunies, sans rechercher, au regard de la situation concrète de Mme [O], si celle-ci n'avait pas détourné de sa finalité sa faculté de choix, en refusant systématiquement, sans même les visiter, tous les logements présentés, aux fins de faire supporter indéfiniment au promoteur le coût du logement temporaire mis à sa disposition, faisant ainsi dégénérer sa faculté de choix en abus, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, en sa rédaction applicable au litige ;

3°/ qu'en retenant qu' "un appartement répondant aux caractéristiques décrites par le protocole a bien été proposé [au mois d'avril 2018] à Mme [O]" mais qu'il ne pouvait lui être reproché d'avoir usé de sa faculté de le refuser discrétionnairement, puis en considérant que l'impossibilité dans laquelle la société Sagec Méditerranée s'était trouvée de proposer d'autres appartements aux caractéristiques similaires établissait l'existence d'une faute contractuelle, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

10. La cour d'appel a, d'abord, relevé que le protocole d'accord prévoyait que Mme [O] pourrait choisir librement son logement dans la future opération immobilière menée par la société Sagec Méditerranée, que ce nouveau logement devrait répondre à certaines caractéristiques et que la prise de possession du logement dans la future résidence était prévue en mars 2017.

11. Elle a, ensuite, constaté qu'un premier appartement présentant les caractéristiques prévues au protocole avait été proposé, mais seulement en avril 2018, à Mme [O], qui l'avait refusé, et que plusieurs logements ne répondant pas à ces critères lui avaient ensuite été proposés par une société tierce.

12. Elle a, enfin, par une interprétation souveraine de la commune intention des parties au protocole d'accord, retenu qu'il ne pouvait être reproché à Mme [O] d'avoir usé de sa faculté de choix de l'emplacement de son nouvel appartement lors du refus de la première proposition de relogement qui lui avait été faite, ni d'avoir par la suite refusé des propositions de relogement portant sur des biens qui ne répondaient pas aux caractéristiques prévues au protocole.

13. Sans être tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, elle a pu en déduire, sans se contredire, que la société Sagec Méditerranée avait manqué à ses obligations en ne permettant pas à Mme [O] d'être relogée dans les conditions contractuellement prévues et devait supporter les conséquences de cette inexécution.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

15. La société Sagec Méditerranée fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en condamnant la société Sagec Méditerranée à verser à Mme [O] une indemnité correspondant à la différence entre le montant du loyer mensuel
de 600 euros contractuellement prévu et celui qu'elle devrait régler pour la location d'un appartement répondant aux critères prévus dans le protocole, dans le secteur privé, estimée à 500 euros mensuels, au regard de son espérance de vie fixée à 12 années au jour où elle statuait, sans prendre en compte le fait qu'elle avait déjà condamné la société Sagec Méditerranée à prendre en charge définitivement, jusqu'au départ effectif de Mme [O], le coût des loyers, charges ou indemnités d'occupation du logement occupé par Mme [O] au jour où elle statuait, la cour d'appel a procédé à une double indemnisation du préjudice de Mme [O] pour toute la période comprise entre le 15 juin 2023 et le départ effectif de Mme [O] du logement temporaire, violant ainsi le principe de la réparation intégrale du préjudice. »

Réponse de la Cour

16. Ayant retenu que l'exécution en nature de l'obligation de relogement mise à la charge de la société Sagec Méditerranée était désormais impossible puisque l'immeuble avait été vendu, c'est sans méconnaître le principe de la réparation intégrale du préjudice que la cour d'appel a alloué à Mme [O] une indemnité, dont elle a souverainement fixé le montant, destinée à lui permettre de pourvoir à son relogement après son départ de l'appartement pris à bail pour assurer son logement temporaire.

17. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Sagec Méditerranée aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Sagec Méditerranée et la condamne à payer à Mme [O] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-deux mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 23-18.395
Date de la décision : 22/05/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix en Provence A1


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 22 mai. 2025, pourvoi n°23-18.395


Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.18.395
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