N° J 24-80.029 F-D
N° 00679
SB4
21 MAI 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 MAI 2025
M. [Y] [B] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du 21 septembre 2023, qui, pour remise irrégulière d'objet à un détenu, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis et cinq ans d'interdiction professionnelle.
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de la SAS Zribi et Texier, avocat de M. [Y] [B], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 9 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance du 7 août 2019, le juge d'instruction a renvoyé M. [Y] [B] devant le tribunal correctionnel sous la prévention de remise irrégulière de document à un détenu, par une personne chargée de sa surveillance.
3. Par jugement du 22 mars 2021, le tribunal correctionnel a condamné l'intéressé à six mois d'emprisonnement avec sursis et cinq ans d'interdiction d'exercer la profession de surveillant pénitentiaire.
4. M. [B] a relevé appel de cette décision. Le ministère public a formé appel incident.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et le troisième moyen, pris en ses première et troisième branches
5. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé à l'encontre de M. [B] une peine complémentaire d'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ayant permis la commission de l'infraction pour une durée de cinq ans, en l'espèce la profession de surveillant pénitentiaire, alors :
« 2°/ qu'en tout état de cause, en matière correctionnelle, toute peine complémentaire doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle ; qu'en prononçant à l'encontre de M. [B] une peine d'interdiction d'exercer la profession de surveillant pénitentiaire pendant une durée de 5 ans, aux motifs que « compte tenu du contexte de la commission des faits » il convenait de prononcer une telle peine, sans s'expliquer, au regard des circonstances concrètes, sur l'adéquation de cette peine avec la personnalité et la situation personnelle de M. [B], la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 132-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 485-1 du code de procédure pénale :
7. Selon ce texte, en matière correctionnelle, le choix de la peine doit être motivé au regard des dispositions de l'article 132-1 du code pénal, sauf s'il s'agit d'une peine obligatoire ou de la confiscation du produit ou de l'objet de l'infraction. Il en résulte qu'à l'exception de ces cas, toute peine doit être motivée en tenant compte des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur et de sa situation matérielle, familiale et sociale.
8. Pour le condamner à une interdiction professionnelle, l'arrêt attaqué retient, au titre de la personnalité du prévenu, qu'il n'a jamais été condamné. Il ne relève ni n'expose aucun autre élément relatif à sa situation personnelle, matérielle, familiale et sociale.
9. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé.
10. La cassation est, par conséquent, encourue.
Portée et conséquences de la cassation
11. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives aux peines. Les autres dispositions seront donc maintenues.
12. Il n'y a pas lieu d'examiner le deuxième moyen de cassation proposé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Metz, en date du 21 septembre 2023, mais en ses seules dispositions relatives aux peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Metz et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mai deux mille vingt-cinq.