LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CC
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 7 mai 2025
Cassation
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 303 F-D
Pourvoi n° D 23-17.598
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 7 MAI 2025
La société BPCE Lease Réunion, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 23-17.598 contre l'arrêt rendu le 21 mars 2023 par la cour d'appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [S] [Y],
2°/ à Mme [V] [B], épouse [Y],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de la société BPCE Lease Réunion, et l'avis de Mme Cazaux-Charles, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mars 2025 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France , 21 mars 2023), suivant une offre de location avec promesse de vente acceptée le 24 juin 2017, la société Oceor Lease Réunion a consenti à M. et Mme [Y] (les emprunteurs) un crédit destiné à financer l'achat d'un bateau.
2. A la suite d'incidents de paiement, la société BPCE Lease Réunion a provoqué la déchéance du terme puis a assigné les emprunteurs en paiement du solde du crédit.
Examen du moyen
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. La société BPCE Lease Réunion fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'action engagée par elle et de rejeter toute prétention plus ample ou contraire, alors « que lorsque deux sociétés ont le même numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, il ne peut s'agir que de la même personne morale à qui un numéro d'identité unique est attribué ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté "le caractère identique" du numéro RCS de la société Oceor Lease Réunion, cocontractant des époux [Y], et de la société BPCE Lease Réunion, agissant sur le fondement du contrat conclu avec les époux [Y], ce dont il résultait qu'il ne pouvait que s'agir de la même personne morale ; qu'en retenant toutefois qu'en l'absence d'éléments probants établissant avec certitude la qualité à agir de la société BPCE Lease Réunion sur le fondement d'un contrat conclu par la société Oceor Lease Réunion, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 31 du code de procédure civile, ensemble les articles R. 123-220 et R. 123-224 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 31 du code de procédure civile et l'article R. 123-220 du code de commerce, dans sa rédaction issue du décret n° 2015-731 du 24 juin 2015 :
4. Aux termes du premier de ces textes, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
5. Il résulte du second qu'un numéro unique d'identification est attribué notamment aux personnes morales de droit privé soumises aux obligations fiscales des entreprises.
6. Pour déclarer irrecevable l'action de la société BPCE Lease Réunion, l'arrêt retient que les documents contractuels produits n'établissement aucun lien entre la société Oceor Lease Réunion, bailleur co-contractant, et la société BPCE Lease Réunion, appelante, si ce n'est le caractère identique de leur numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) et de leur siège social, qui ne résulte pas nécessairement d'un simple changement de dénomination sociale.
7. En statuant ainsi, après avoir relevé que les sociétés BPCE Lease Réunion et Oceor Lease Réunion avaient le même numéro RCS, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mars 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France autrement composée ;
Condamne M. et Mme [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BPCE Lease Réunion ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le sept mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.