LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
JL10
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 6 mai 2025
Cassation partielle
M. BARINCOU, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président
Arrêt n° 448 F-D
Pourvoi n° E 23-22.337
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 MAI 2025
La société Cabinet [Z] [C], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 23-22.337 contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2023 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [U] [W], domiciliée [Adresse 2],
2°/ à Pôle emploi Lorraine - Le Médiateur Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3], devenu France travail Lorraine,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Brinet, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Cabinet [Z] [C], de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel, avocat de Mme [W], après débats en l'audience publique du 25 mars 2025 où étaient présents M. Barincou, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Brinet, conseiller rapporteur, M. Carillon, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Thuillier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président
et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 14 septembre 2023), Mme [W] a été engagée en qualité d'assistante de cabinet et de responsable de dossiers, le 2 novembre 2007, par M. [C], expert-comptable et commissaire aux comptes exerçant en son nom propre, aux droits duquel se trouve la société Cabinet [Z] [C].
2. Mise à pied à titre conservatoire le 13 mai 2020, puis licenciée, pour faute grave, le 25 mai 2020, la salariée a saisi la juridiction prud'homale en contestant le caractère réel et sérieux de la cause de son licenciement et en demandant le paiement de diverses sommes à titre d'indemnités et de dommages-intérêts.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à rembourser à Pôle emploi les prestations servies à la salariée dans la limite de six mois, alors « qu'en application de l'article L. 1235-5 du code du travail, ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives au remboursement des indemnités de chômage, prévues à l'article L. 1235-4, en cas de méconnaissance des articles L. 1235-3 et L. 1235-1 ; que dans ses écritures, l'exposant avait démontré, pièces à l'appui, qu'au jour de la rupture du contrat de travail, l'effectif de l'entreprise était inférieur à onze salariés ; qu'en se bornant à affirmer que la condition d'un effectif supérieur à onze salariés était remplie, sans s'expliquer sur les écritures et les pièces non contestées de l'exposant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-5 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1235-5 du code du travail :
5. Il résulte de ce texte que ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives au remboursement des indemnités de chômage, prévues à l'article L. 1235-4, en cas de méconnaissance des articles L. 1235-3 et L. 1235-11.
6. Pour condamner l'employeur à rembourser à Pôle emploi les prestations prévues à l'article L. 1235-4 du code du travail, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que l'obligation de condamner l'employeur au remboursement de ces indemnités s'impose au juge dès lors que les trois conditions suivantes sont réunies : un licenciement sans cause réelle et sérieuse, une entreprise de plus de onze salariés, un salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté et qu'en l'espèce ces trois conditions sont réunies et, par motifs propres, que la décision entreprise est confirmée en ce qu'elle a condamnée l'employeur à rembourser à l'établissement public Pôle emploi le montant des indemnités versées à la salariée dans la limite de six mois d'indemnités.
7. En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'entreprise employait moins de onze salariés au moment du licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Portée et conséquences de la cassation
8. La cassation du chef de dispositif condamnant l'employeur à rembourser à Pôle emploi les prestations servies à la salariée dans la limite de six mois n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt le condamnant aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à son encontre.
9. En application de l'article 625, alinéa 3, du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause Mme [W], dont la présence n'est plus nécessaire devant la cour de renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Cabinet [Z] [C] à rembourser à Pôle emploi les prestations servies à Mme [W] dans la limite de six mois, l'arrêt rendu le 14 septembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Met hors de cause Mme [W] ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;
Condamne la société Cabinet [Z] [C] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Cabinet [Z] [C] et la condamne à payer à Mme [W] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le six mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.