N° H 24-86.191 F-B
N° 00550
ECF
6 MAI 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 6 MAI 2025
Le procureur général près la cour d'appel de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 1re section, en date du 7 octobre 2024, qui, dans l'information suivie contre M. [G] [R] des chefs, notamment, de recel, association de malfaiteurs et infractions à la législation sur les armes, a prononcé sur la demande d'annulation de pièces de la procédure présentée par ce dernier.
Par ordonnance du 9 décembre 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Merloz, conseiller référendaire, et les conclusions de Mme Djemni-Wagner, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Merloz, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 6 mars 2024, M. [G] [R] a fait l'objet d'un contrôle routier au cours duquel les policiers ont constaté, sur le téléphone portable que ce dernier leur avait présenté pour justifier de son identité, une photographie sur laquelle il était en possession d'une arme de poing.
3. Interpellé dans le cadre d'une enquête de flagrance, M. [R] a été placé en garde à vue. Lors de la notification de ses droits, il a indiqué vouloir bénéficier de l'assistance de l'avocat qu'il avait désigné.
4. M. [R] a été mis en examen, le 9 mars 2024, des chefs d'infractions à la législation sur les armes et association de malfaiteurs.
5. Par requête déposée au greffe de la chambre de l'instruction le 11 avril suivant, M. [R] a soulevé la nullité de sa garde à vue et des actes subséquents.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen est pris de la violation des articles 63-3-1, 63-4, 64, D. 15-5-3, 591 et 593 du code de procédure pénale.
7. Il critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé la nullité des actes d'information cotés D 17 à D 273 et constaté que le contrôle judiciaire de M. [R] n'existait plus alors que la personne placée en garde à vue peut désigner un avocat choisi, lequel doit être avisé sans délai de la nature, de la date présumée de l'infraction sur laquelle porte l'enquête, et qu'il doit être établi un procès-verbal mentionnant les informations délivrées, les demandes faites et les suites qui y ont été données, sans qu'il soit exigé qu'à chaque diligence accomplie un tel procès-verbal soit dressé ; que la chambre de l'instruction a ignoré les mentions portées conformément à la loi dans le procès-verbal récapitulatif de garde à vue.
Réponse de la Cour
Vu les articles 64 et D. 15-5-3 du code de procédure pénale :
8. Il résulte de ces textes que l'officier de police judiciaire établit un procès-verbal récapitulatif de fin de garde à vue mentionnant les informations données et les demandes faites en application des articles 63-2 à 63-3-1 du code de procédure pénale et les suites qui leur ont été réservées, sans qu'il soit nécessaire de dresser un procès-verbal pour chacune des diligences accomplies pour l'exercice de ces droits.
9. Pour prononcer la nullité de la garde à vue, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte de la lecture du procès-verbal de notification de celle-ci que M. [R] a, dès le début de la mesure, soit le 6 mars à 14 heures 40, désigné un avocat, dont il a donné les coordonnées.
10. Les juges relèvent que, s'il est exact que cet avocat a été présent lors de chaque audition de l'intéressé, il n'est pas contestable qu'il n'a pas été avisé par les enquêteurs ni au début de la garde à vue ni lors de la prolongation de la mesure alors que M. [R] avait de nouveau fait part de son souhait d'être assisté par lui.
11. Ils observent ainsi que, alors que les dispositions de l'article 63-4 du code de procédure pénale imposent à l'officier de police judiciaire de prendre contact avec l'avocat désigné par tous moyens et sans délai, de manière à ce que l'entretien prévu par ce texte puisse avoir lieu, aucun procès-verbal postérieur à la notification des droits ne fait état des diligences qui auraient été réalisées pour aviser l'avocat ni ne mentionne si un entretien a effectivement eu lieu.
12. Ils en concluent que les droits de la défense ont été violés et qu'il en résulte un grief pour l'intéressé, qui n'a pu notamment mettre au point, avec son conseil, une stratégie de défense, la présence d'un avocat en garde à vue ne se limitant pas à l'assistance de la personne gardée à vue lors des auditions, mais lui permettant également de s'assurer du bon déroulement de la mesure et d'apporter son soutien à la personne qui en fait l'objet.
13. En statuant ainsi, alors qu'il résulte des pièces de la procédure, dont la Cour de cassation a le contrôle, que l'officier de police judiciaire a, dans le procès-verbal récapitulatif de fin de garde à vue, fait état des diligences accomplies à la suite de la demande faite par la personne placée en garde à vue pour s'entretenir avec l'avocat qu'elle avait choisi dès le début de la mesure, et des suites qui y avaient été données, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé.
14. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 7 octobre 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille vingt-cinq.