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30/04/2025 | FRANCE | N°24-80.795

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle - formation restreinte hors rnsm/na, 30 avril 2025, 24-80.795


N° S 24-80.795 F-D

N° 00532


RB5
30 AVRIL 2025


REJET


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 30 AVRIL 2025



M. [U] [M] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Pau, chambre correctionnelle, en date du 7 décembre 2023, qui, sur renvoi après cassation (

Crim., 30 juin 2021, pourvoi n° 20-83.222), a prononcé sur sa requête en incident contentieux d'exécution.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme...

N° S 24-80.795 F-D

N° 00532


RB5
30 AVRIL 2025


REJET


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 30 AVRIL 2025



M. [U] [M] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Pau, chambre correctionnelle, en date du 7 décembre 2023, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 30 juin 2021, pourvoi n° 20-83.222), a prononcé sur sa requête en incident contentieux d'exécution.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Piazza, conseiller, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de M. [U] [M], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Piazza, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par jugement définitif du 30 juin 2015, le tribunal correctionnel a déclaré M. [U] [M] coupable de fraude fiscale, passation d'écritures comptables inexactes ou fictives en comptabilité, abus de biens sociaux, faux et usage, et a ordonné la confiscation du terrain sis à [Localité 2] cadastré D n° [Cadastre 1] lui appartenant.

3. Le 21 septembre 2017, M. [M] a déposé une requête en difficulté d'exécution sur le fondement des articles 710 et 711 du code de procédure pénale, en faisant valoir que la confiscation du terrain était impossible car il supportait désormais le logement familial.

4. Par jugement du 18 septembre 2018, le tribunal correctionnel a déclaré
cette requête irrecevable.

5. M. [M] a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit que la confiscation ordonnée par le tribunal correctionnel de Bayonne, dans son jugement du 30 juin 2015, portait sur la totalité de l'immeuble situé sur la commune de [Localité 2], cadastré section D n° [Cadastre 1], appartenant à M. [M] et a, par conséquent, rejeté la requête en ce qu'elle tendait à ce que la confiscation prononcée soit limitée au seul terrain et ne soit pas prononcée en nature mais en valeur, alors :

« 1°/ que si la saisie pénale rend indisponible le bien et affecte sa libre disposition, elle n'atteint pas les pouvoirs d'usus et de fructus du propriétaire, de telle sorte qu'elle n'interdit pas la poursuite d'une opération de construction sur le terrain saisi ; qu'en retenant que la saisie pénale immobilière autorisée par le juge des libertés et de la détention le 30 octobre 2012 interdisait toute poursuite de la construction (arrêt p.7, §6) cependant qu'en cas de saisie pénale, seuls les actes de disposition sont prohibés, la cour d'appel a violé l'article 706-145 du code de procédure pénale ;

2°/ que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 30 octobre 2012 mentionnait que « conformément à l'article 706-143 le propriétaire ou à défaut, le détenteur du bien est responsable de son entretien, et de sa conservation, qu'il en supporte la charge, … et que tout acte ayant pour conséquence de transformer, modifier substantiellement le bien ou d'en réduire la valeur est soumis à l'autorisation préalable du magistrat qui en a ordonné la saisie… »; qu'en affirmant que la saisie prononcée par l'ordonnance du 30 octobre 2012 interdisait toute poursuite de la construction (arrêt p.7, § 6), la cour d'appel a dénaturé ladite ordonnance et, ce faisant, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 706-143 du code de procédure pénale ;

3°/ que monsieur [M] faisait valoir que la saisie pénale rendait indisponible le bien mais que rien ne lui interdisait de poursuivre une opération de construction déjà commencée sur le terrain saisi, que, tant dans l'esprit du juge des libertés et de la détention que dans celui du juge pénal, c'était uniquement le terrain valorisé pour 23.871,57 euros qui était saisi, et non pas un ensemble immobilier, composé d'une maison de 170 m² de plain-pied, avec un jardin, une terrasse, une piscine, un bureau, et des garages pour une valeur estimée à 700.000 euros environ, qu'il y avait donc une distorsion majeure entre la sanction pénale prononcée par le juge pénal, et l'exécution de cette mesure en un temps où la situation factuelle n'était plus la même, que soutenir qu'il avait construit à ses risques et périls revenait en réalité à nier le principe de la présomption d'innocence, et à considérer qu'il aurait dû se comporter comme un condamné, et non pas comme un prévenu, que c'était bien parce qu'il était libre, présumé innocent et encore non jugé, qu'il était en droit de réaliser un projet de construction sur son terrain et que si la confiscation était ainsi devenue définitive du fait de l'absence d'appel du jugement du 30 juin 2015 ayant ordonné cette confiscation, cela ne signifiait pas pour autant qu'elle devait aboutir à un résultat disproportionné ; il en déduisait que pour respecter les termes du jugement du tribunal correctionnel, il ne pouvait être tenu, au titre de la confiscation, qu'à payer la valeur du terrain au jour où avait été prononcée la sanction pénale, soit une somme de l'ordre de 35.000 euros et que la confiscation de l'ensemble immobilier, c'est-à-dire de la maison en sus du terrain, méconnaissait les dispositions de l'article 132-17 du code pénal (conclusions p.9 et 10) ; qu'en se bornant à affirmer, pour retenir que la discussion relative à la disproportion de la peine était sans emport sur le litige, que la saisie prononcée interdisait toute poursuite de la construction, que monsieur [M] savait qu'il était dans l'illégalité en poursuivant la construction de sa maison et qu'il avait agi à ses risques et périls (arrêt p.7, § 5 à 7 et p.8, 1er §), sans s'expliquer davantage, bien qu'elle y fût expressément invitée par monsieur [M], sur les raisons pour lesquelles la saisie pénale interdisait la poursuite de la construction, ni préciser sur quel élément de preuve elle se fondait pour affirmer péremptoirement que monsieur [M] savait qu'il était dans « l'illégalité la plus complète » lorsqu'il avait poursuivi sa construction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 706-141 et 706-145 du code de procédure pénale, ensemble les articles 131-21, 132-1 et 132-17 du code pénal. »

Réponse de la Cour

7. Pour rejeter la requête en difficulté d'exécution, l'arrêt attaqué énonce notamment que par jugement définitif du tribunal correctionnel en date du 30 juin 2015, la confiscation du terrain sis à [Localité 2] appartenant au prévenu a été ordonnée.

8. Les juges relèvent que ce terrain a été acquis le 4 octobre 2007 au prix de 23 971 euros, payés comptant, qu'une demande de permis de construire a été déposée le 7 mars 2011 à laquelle il a été fait droit le 26 juillet 2011, que l'enquête pénale pour fraude fiscale a été diligentée fin 2011 et qu'un procès-verbal du 19 septembre 2012 constate l'existence d'une construction en cours sur le terrain.

9. Ils précisent que, par ordonnance du 30 octobre 2012, le juge des libertés et de la détention a autorisé la saisie pénale sur la commune de [Localité 2] d'une parcelle de terrain à bâtir et que l'ordonnance mentionnait notamment que, conformément aux dispositions de l'article 706-143 du code de procédure pénale, le propriétaire du bien est responsable de son entretien et de sa conservation et que tout acte ayant pour conséquence de transformer, modifier substantiellement le bien ou d'en réduire la valeur est soumis à l'autorisation du magistrat qui a ordonné la saisie.

10. Ils ajoutent que le tribunal correctionnel a incontestablement entendu confisquer l'entier immeuble, à savoir le terrain et la construction en cours dont les juges avaient connaissance, la propriété du sol étant indissociable de celle du dessus, la construction décrite dans la requête ne pouvant être mentionnée dans le jugement puisqu'elle n'existait pas à cette date.

11. Ils retiennent, enfin, que le jugement n'ayant pas fait l'objet d'un appel, la proportionnalité de la peine de confiscation, la présomption d'innocence et la solidarité concernant les impôts fraudés et pénalités ne sont plus dans le débat.

12. Ils en déduisent que la requête de M. [M] en ce qu'elle tend à ce que la confiscation soit limitée au seul terrain et ne soit pas prononcée en nature mais en valeur doit, en conséquence, être rejetée.

13. En se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

14. En effet, d'une part, statuant sur une requête fondée sur l'article 710 du code de procédure pénale et portant sur la décision du tribunal correctionnel ayant prononcé la confiscation du terrain, elle n'a pas le pouvoir de restreindre ou d'accroître les droits qu'elle consacre et de modifier ainsi la chose jugée, d'autre part, la propriété du sol entraîne la propriété du dessus et du dessous par application de l'article 552 du code civil.


15. Dès lors, le moyen doit être écarté.

16. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 24-80.795
Date de la décision : 30/04/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Publications
Proposition de citation : Cass. Crim. - formation restreinte hors rnsm/na, 30 avr. 2025, pourvoi n°24-80.795


Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:24.80.795
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