COMM.
MB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 avril 2025
Cassation partielle
Mme SCHMIDT, conseiller doyen faisant fonction de président
Arrêt n° 227 F-D
Pourvoi n° K 23-21.744
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 AVRIL 2025
M. [C] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-21.744 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Silvestri Baujet, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], prise en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation de la société Autos Saint-Léger, défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Buquant, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. [D], et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 mars 2025 où étaient présents Mme Schmidt, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Buquant, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guillou, conseiller, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 juin 2023), par jugements des 5 novembre 2014 et 25 mars 2015, la société Autos Saint Léger a été mise en sauvegarde puis en liquidation judiciaire, la société Silvestri Baujet étant désignée liquidateur.
2. Le 19 mars 2018, le liquidateur a assigné M. [D] aux fins d'obtenir sa condamnation à supporter l'insuffisance d'actif et de voir prononcer sa faillite personnelle.
Examen des moyens
Sur le premier moyen pris en ses deux branches et le second moyen pris en sa deuxième branche
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. [D] fait grief à l'arrêt d'écarter la prescription et de prononcer sa faillite personnelle pour une durée de cinq ans, alors « que l'action aux fins de faire prononcer une mesure de faillite à l'encontre d'un dirigeant se prescrit par trois ans à compter du jugement prononçant l'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaires ; qu'en l'espèce, la procédure de liquidation judiciaire de la société Auto Saint-léger a été initiée par un jugement du tribunal de commerce de Bordeaux prononçant une sauvegarde en date du 5 novembre 2014 ; qu'en considérant comme non prescrite l'action introduite par le liquidateur à l'encontre de M. [D] le 19 mars 2018, soit bien plus de trois années après l'ouverture de la procédure concernant la société Auto Saint-Léger, la cour d'appel a violé l'article L. 653-1 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article L. 653-1 du code de commerce, les actions aux fins de voir prononcer la faillite personnelle ou l'interdiction de gérer à l'égard des dirigeants personnes physiques se prescrivent par trois ans à compter du jugement qui prononce l'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Il en résulte que le jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ne peut constituer le point de départ de ce délai.
6. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.
Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
7. M. [D] fait le même grief à l'arrêt, alors « que les juges doivent motiver leur décision ; qu'en se bornant à affirmer, pour prononcer la sanction de faillite personnelle, que M. [D] s'est abstenu de collaborer avec les organismes de la procédure", la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
8. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
9. Pour prononcer la faillite personnelle de M. [D], l'arrêt retient, par motifs adoptés, que celui-ci s'est abstenu de collaborer avec les organes de la procédure collective.
10. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. [D] qui contestait tout défaut de collaboration avec les organes de la procédure collective, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
11. La condamnation à la faillite personnelle du dirigeant ayant été prononcée en considération de plusieurs fautes, la cassation encourue à raison de l'une d'entre elles entraîne, en application du principe de proportionnalité, la cassation de l'arrêt de ce chef.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il prononce la faillite personnelle de M. [D] pour une durée de 5 ans, l'arrêt rendu le 26 juin 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
Remet, sur ce seul point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Silvestri Baujet en qualité de liquidateur de la société Autos Saint Léger aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [D] ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille vingt-cinq.