CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 janvier 2025
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 52 F-D
Pourvoi n° Y 21-14.158
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 JANVIER 2025
M. [E] [I], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-14.158 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2021 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [O] [H], domicilié [Adresse 1],
2°/ à la société Edifiance, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], représentée par son liquidateur amiable en exercice domicilié de droit audit siège,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de M. [I], de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. [H], après débats en l'audience publique du 17 décembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. [I] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Edifiance, représentée par son liquidateur amiable en exercice.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 26 janvier 2021), par acte authentique du 6 septembre 2012, M. [I] a vendu à M. [H] un local à usage d'habitation constituant le lot n° 36 d'un immeuble soumis au statut de la copropriété, d'une superficie de 13,94 m², moyennant le prix de 76 500 euros.
3. Par lettre du 22 mars 2016, la direction de l'écologie urbaine de la ville de [Localité 4] a fait savoir à M. [H] que ce lot allait faire l'objet d'une procédure d'interdiction d'habiter, au motif que la surface habitable de sa pièce principale était inférieure à 9 m².
4. Par arrêté du 21 juin 2016, le préfet du Rhône a déclaré le lot insalubre à titre irrémédiable, notamment en raison de l'insuffisance de la surface et de la hauteur sous plafond de la pièce principale.
5. M. [H] a assigné M. [I] en indemnisation de ses préjudices sur le fondement de l'article 1604 du code civil.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième et sixième branches
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa cinquième branche
Enoncé du moyen
7. M. [I] fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à M. [H] la somme de 68 000 euros en réparation de son préjudice financier, alors « que les juges sont tenus de réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; qu'en jugeant que les loyers perçus par M. [H] ne devaient pas être imputés sur le préjudice de l'acquéreur, la cour d'appel a violé le principe de réparation intégrale du préjudice. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1149 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et le principe de la réparation intégrale du préjudice :
8. Il résulte de ce texte et de ce principe que les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit.
9. Pour évaluer le préjudice subi par M. [H] à la somme de 68 000 euros, l'arrêt retient qu'il n'y a pas lieu d'imputer sur le préjudice de l'acquéreur les loyers éventuellement perçus par lui, alors que le préjudice résultant du défaut de conformité est le supplément de prix injustifié payé au vendeur lors de l'acquisition.
10. En statuant ainsi, après avoir retenu, par motifs propres et adoptés, que le préjudice subi par l'acquéreur résultait de l'impossibilité de louer et d'habiter le bien vendu, de sorte que les loyers éventuellement perçus par celui-ci devaient venir en déduction de la somme fixée à titre de réparation, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. [I] à payer à M. [H] la somme de 68 000 euros en réparation de son préjudice financier, l'arrêt rendu le 26 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne M. [H] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille vingt-cinq.