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22/01/2025 | FRANCE | N°24-82.186

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle - formation restreinte hors rnsm/na, 22 janvier 2025, 24-82.186


N° D 24-82.186 F-D

N° 00057


GM
22 JANVIER 2025


CASSATION PARTIELLE



M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 22 JANVIER 2025



Mme [G] [L] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Papeete, chambre correctionnelle, en date du 28 février 2024, qui, po

ur abus de faiblesse, l'a condamnée à deux ans d'emprisonnement dont six mois avec sursis probatoire, cinq ans d'interdiction professionnelle et a prononcé sur le...

N° D 24-82.186 F-D

N° 00057


GM
22 JANVIER 2025


CASSATION PARTIELLE



M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 22 JANVIER 2025



Mme [G] [L] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Papeete, chambre correctionnelle, en date du 28 février 2024, qui, pour abus de faiblesse, l'a condamnée à deux ans d'emprisonnement dont six mois avec sursis probatoire, cinq ans d'interdiction professionnelle et a prononcé sur les intérêts civils.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la société Buk Lament - Robillot, avocat de Mme [G] [L], et les conclusions de M. Crocq, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 décembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,




la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par jugement du 15 mars 2022, le tribunal correctionnel a déclaré Mme [G] [L] coupable d'abus de faiblesse commis sur la personne de [O] [I], l'a condamnée à deux ans d'emprisonnement dont six mois avec sursis probatoire, cinq ans d'interdiction d'exercer une activité en rapport avec des personnes âgées, et a statué sur l'action civile.

3. Mme [L] a relevé appel et le ministère public a formé appel incident.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

4. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné Mme [G] [L] à la peine de deux ans d'emprisonnement délictuel, a dit que cette peine sera assortie à hauteur de six mois d'un sursis probatoire pendant une durée de deux ans, alors « que lorsqu'une peine d'emprisonnement ferme supérieure à un an mais inférieure à deux ans est prononcée pour des faits commis avant le 24 mars 2020, le juge doit se prononcer sur un aménagement et s'il refuse d'aménager doit, soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce, de la personnalité du prévenu et de sa situation matérielle, familiale et sociale et ne peut, en présence du prévenu à l'audience, énoncer qu'il ne dispose pas, en l'état du dossier, d'éléments matériels suffisants lui permettant un aménagement immédiat ; qu'en retenant que la partie ferme de dix-huit mois de la peine restait « aménageable en fonction de l'évolution de sa situation dont elle n'a pas justifié », sans interroger la prévenue présente à l'audience, la cour d'appel a méconnu les articles 132-19, 132-25 du code pénal et 464-2, 591 et 593 du code de procédure pénale. »






Réponse de la Cour

Vu les articles 132-19, 132-25 du code pénal et 464-2 du code de procédure pénale :

6. Il se déduit de ces textes que si la peine d'emprisonnement ferme est supérieure à six mois et inférieure ou égale à un an au sens de l'article D. 48-1-1 du code de procédure pénale, et à deux ans lorsque les faits ont été commis avant le 24 mars 2020, son aménagement est le principe et le juge ne peut l'écarter que s'il constate que la situation ou la personnalité du condamné ne permettent pas son prononcé ou s'il relève une impossibilité matérielle de le faire. Dans ce cas, le juge doit motiver spécialement sa décision, de façon précise et circonstanciée, au regard des faits de l'espèce, de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale du condamné.

7. Il s'ensuit que le juge ne peut refuser d'aménager la peine au motif qu'il ne dispose pas d'éléments suffisamment précis et actualisés. Si le prévenu est comparant, le juge doit l'interroger sur sa situation personnelle et, le cas échéant, peut ordonner un ajournement de la peine aux fins d'investigations sur sa personnalité ou sa situation, en application de l'article 132-70-1 du code pénal.

8. Après avoir condamné Mme [L], pour des faits commis avant le 24 mars 2020, à une peine d'emprisonnement dont la partie ferme est de dix-huit mois, l'arrêt attaqué retient que cette peine reste aménageable en fonction de l'évolution de sa situation, dont la prévenue n'a pas justifié. Le dispositif de l'arrêt confirme le jugement du tribunal correctionnel, lequel ne s'était pas prononcé sur l'aménagement de la peine.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.

10. En effet, si elle estimait ne pas être en possession d'éléments suffisants sur la personnalité ou la situation de la prévenue, il lui appartenait d'interroger celle-ci, présente à l'audience, afin d'obtenir ces éléments pour apprécier si un aménagement de sa peine, au moins dans son principe, pouvait être prononcé et, le cas échéant, d'ordonner des investigations complémentaires sur ceux-ci, en application de l'article 132-70-1 du code pénal.

11. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.




Et sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a reçu les constitutions des parties civiles, a déclaré Mme [G] [L] entièrement responsable des préjudices subis et l'a condamnée à verser aux parties civiles les sommes de 2 004 069 F CFP au titre de leur préjudice économique et 100 000 F CFP à chaque partie civile au titre de leur préjudice moral, alors :

« 1°/ que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties et que le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties ; qu'en condamnant Mme [L] à payer au parties civiles la somme de 2 004 069 F CFP au titre de leur préjudice économique, correspondant aux sommes prétendument détournées, sans répondre aux conclusions de la prévenue qui soutenait avoir intégralement remboursé cette somme de sorte que le préjudice économique avait déjà été intégralement réparé, la cour d'appel a violé les articles 1382 devenu 1240 du code civil, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ que subsidiairement, la partie civile ne peut obtenir que la réparation du préjudice résultant de l'infraction, sans perte ni profit pour aucune des parties ; qu'en condamnant Mme [L] à verser la somme de 2 004 069 F CFP, laquelle, selon ses propres constatations, inclut une somme de 79 125 F CFP qui correspond au chèque que Mme [V] admettait avoir dérobé à M. [I], la cour d'appel qui a donc inclus dans la réparation une somme ne résultant pas directement de l'infraction commise par Mme [L], a violé les articles 1382 devenu 1240 du code civil, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1240 du code civil et 593 du code de procédure pénale :

13. Il résulte du premier de ces textes que le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties.

14. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties.

15. Pour condamner Mme [L] à payer aux parties civiles la somme de 2 004 069 francs CFP, en réparation de leur préjudice matériel, l'arrêt attaqué énonce que celui-ci correspond aux sommes détournées.



16. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la prévenue qui soutenait avoir intégralement remboursé cette somme, remise entre les mains du notaire chargé de la succession de la victime, et alors qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que ladite somme inclut celle de 79 125 francs CFP, laquelle correspond au montant d'un chèque volé et falsifié par un tiers, fait pour lequel Mme [L] n'a pas été poursuivie, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.

17. La cassation est par conséquent à nouveau encourue.

Portée et conséquences de la cassation

18. La cassation sera limitée aux peines, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure, ainsi qu'aux dispositions civiles de l'arrêt, les autres dispositions seront maintenues.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Papeete, en date du 28 février 2024, en ses dispositions relatives aux peines et aux réparations civiles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Papeete et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 24-82.186
Date de la décision : 22/01/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Publications
Proposition de citation : Cass. Crim. - formation restreinte hors rnsm/na, 22 jan. 2025, pourvoi n°24-82.186


Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:24.82.186
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