N° S 24-82.129 F-D
N° 00064
GM
22 JANVIER 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 22 JANVIER 2025
Le procureur général près la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 25 janvier 2024, qui a relaxé M. [W] [C] des chefs de violences, agressions sexuelles, aggravées, et contravention de violences.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Brugère, conseiller, et les conclusions de M. Crocq, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 décembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Brugère, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [W] [C] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel des chefs d'agressions sexuelles sur [D] [C], mineure de 15 ans, par ascendant, de violences sur [D] et [F] [C], mineurs de 15 ans, par ascendant, et de violences sans incapacité totale de travail sur ce dernier.
3. Par jugement du 9 mars 2023, M. [C] a été condamné à dix mois d'emprisonnement avec sursis et à 200 euros d'amende contraventionnelle. Le tribunal a, en outre, prononcé sur les intérêts civils.
4. Le prévenu a relevé appel de cette décision et le ministère public a formé appel incident.
Examen des moyens
Sur les premier et second moyens
Enoncé des moyens
5. Le premier moyen est pris de la violation des articles 485, 512, 567, 591 et 593 du code de procédure pénale.
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé M. [C] des chefs d'agression sexuelle, alors que la cour d'appel, en affirmant qu'il n'y avait pas eu « d'aggravation des gestes », puis en déniant l'existence de
« passage à l'acte », a statué par des motifs inopérants et contradictoires en méconnaissance des textes susvisés.
7. Le second moyen est pris de la violation de l'article 593 du code de procédure pénale.
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé M. [C], alors :
1°/ que, s'agissant des agressions sexuelles, la cour d'appel, qui a écarté l'élément intentionnel en retenant l'absence de profil pédophile du prévenu, son défaut de conscience de son comportement déplacé et la présence de témoins lors des actes qui lui sont reprochés, sans déduire cette intention des gestes volontaires, commis sur sa fille, dont la connotation sexuelle est incontestable, n'a pas justifié sa décision ;
2°/ qu'en retenant, s'agissant des violences, que M. [C] ne s'était pas emporté de manière excessive et en exigeant ainsi que celles-ci atteignent une intensité minimale pour être retenues, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.
Réponse de la Cour
9. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 222-13 et 222-22 du code pénal :
10. Selon le premier de ces textes, les violences n'ayant pas entraîné d'incapacité de travail sont punies de trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende lorsqu'elles sont commises par ascendant et de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende quand elles sont commises sur un mineur de moins de quinze ans par ascendant.
11. Selon le second, constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence contrainte, menace ou surprise.
12. L'arrêt attaqué, d'une part, après avoir constaté qu'entre 2015 et courant 2021, le prévenu embrassait sur la bouche sa fille, née en 2011, et touchait le sexe de celle-ci pour jouer, a prononcé sa relaxe du chef d'agression sexuelle pour défaut d'élément intentionnel, aux motifs qu'il n'avait pas eu conscience de l'interprétation qui pouvait être donnée à son comportement toléré par son entourage et qu'il n'avait pas eu la volonté d'agresser sexuellement sa fille.
13. La cour d'appel, d'autre part, après avoir constaté que le prévenu tirait les cheveux de ses enfants et leur donnait des « coups de savate », a prononcé sa relaxe du chef de violences, aux motifs qu'il ne s'était pas emporté de manière excessive et que son caractère colérique ne pouvait suffire à caractériser des violences.
14. En écartant ainsi, par des motifs erronés, l'intention coupable du prévenu, et en le relaxant d'infractions dont elle a caractérisé l'existence, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés.
15. La cassation est, dès lors, encourue.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, en date du 25 janvier 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt-cinq.