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22/01/2025 | FRANCE | N°23-15.764

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na, 22 janvier 2025, 23-15.764


COMM.

FM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 janvier 2025




Rejet


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 26 F-D

Pourvoi n° K 23-15.764




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 22 JANVIER 2025

1°/ M. [J] [E],

2°/ Mme [N] [

O], épouse [E],

tous deux domiciliés [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° K 23-15.764 contre l'arrêt rendu le 14 mars 2023 par la cour d'appel de Rennes (3e chambre commerciale...

COMM.

FM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 janvier 2025




Rejet


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 26 F-D

Pourvoi n° K 23-15.764




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 22 JANVIER 2025

1°/ M. [J] [E],

2°/ Mme [N] [O], épouse [E],

tous deux domiciliés [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° K 23-15.764 contre l'arrêt rendu le 14 mars 2023 par la cour d'appel de Rennes (3e chambre commerciale), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Banque Populaire Grand Ouest, société coopérative de banque populaire, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à M. [I] [D], domicilié [Adresse 1], pris en sa qualité de liquidateur de la société Chasseur.

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. et Mme [E], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Banque Populaire Grand Ouest, après débats en l'audience publique du 26 novembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 14 mars 2023), par un acte du 10 décembre 2008, la société Crédit maritime Bretagne Normandie (le Crédit maritime) a consenti à la société Chasseur (la société) un prêt, d'un montant principal de 281 000 euros.

2. Le même jour, M. [E], gérant de la société, et Mme [O], épouse [E] (M. et Mme [E]), se sont rendus cautions solidaires du remboursement de ce prêt dans la limite de la somme de 140 000 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard.

3. Le 2 juin 2016, à la suite du non-paiement de plusieurs échéances du prêt, le Crédit maritime a assigné la société et les cautions en exécution de leurs engagements.

4. Le 7 décembre 2017, le Crédit maritime a fait l'objet d'une fusion-absorption par la société Banque Populaire Grand Ouest (la banque).

5. Le 9 février 2018, la société a été placée en redressement judiciaire, M. [D] étant désigné en qualité de mandataire judiciaire.

6. Le 28 mars 2018, le Crédit maritime a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire.

7. Le 14 août 2018, il a assigné en intervention forcée M. [D], ès qualités.

8. Le 7 septembre 2018, la société a été placée en liquidation judiciaire, M. [D] étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

9. Le 4 septembre 2020, la banque a assigné en intervention forcée M. [D], ès qualités.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

10. M. et Mme [E] font grief à l'arrêt de les condamner à payer à la banque la somme de 54 357,76 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2016, en exécution d'un engagement de caution, alors « que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué qu'il a été rendu par une juridiction composée notamment de Mme Clément, présidente de chambre, après que l'affaire a été évoquée devant un magistrat unique, M. [T], qui a tenu seul l'audience, et ce, alors que Mme [Y] avait eu à connaître quelques mois plus tôt, en qualité de présidente du tribunal judiciaire de Quimper, d'une affaire relative à la procédure collective de la SCI Chakaser, dont les époux [E] étaient gérants, M. [E] ayant été entendu à l'audience, et qui avait donné lieu à un jugement du 7 juin 2022, aux termes duquel il avait été décidé de renouveler la période d'observation de la SCI Chakaser plutôt que de statuer sur la faisabilité d'un plan de redressement, au motif que les époux [E] et leur fils "ont fait l'objet d'une procédure pénale diligentée par la DIJP de Brest avec audience fixée le 9 février 2023 et que la SCI Chakaser a fait l'objet d'une saisie pénale immobilière" et "qu'il n'y a aucun fait suspect dans le cadre de la procédure mais il convient de rester vigilant jusqu'au terme de la période d'observation" ; qu'en statuant ainsi, dans une composition comportant un magistrat ayant déjà tranché un litige en prenant en compte le comportement des époux [E], la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

11. Les débats ayant eu lieu devant une formation collégiale dont la composition pouvait être connue des parties, celles-ci ne sont pas recevables à invoquer devant la Cour de cassation la violation de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elles n'ont pas fait usage de la possibilité d'en obtenir le respect en récusant le magistrat concerné par application de l'article 341, 5° du code de procédure civile et qu'en s'abstenant de le faire avant la clôture des débats, elles ont ainsi renoncé sans équivoque à s'en prévaloir.

12. Par ce motif de pur droit, relevé d'office après avis donné aux parties conformément à l'article 16 du code de procédure civile, le moyen est irrecevable.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

13. M. et Mme [E] font le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que tenu de respecter le principe du contradictoire, le juge ne peut soulever un moyen d'office sans avoir préalablement invité les parties à formuler leurs observations ; que, pour infirmer le jugement déféré, l'arrêt attaqué retient que la société absorbante, unique associée de la société absorbée, acquiert la qualité de partie à la procédure à l'issue du délai de trente jours suivant la publication de la dissolution laissé aux créanciers pour former opposition à la dissolution de la société conformément à l'article 1844-5 du code de commerce, que la société Crédit Maritime Bretagne Normandie a régulièrement initié l'instance principale par assignation délivrée le 2 juin 2016, qu'elle a été absorbée par la société Banque Populaire Grand Ouest à effet au 7 décembre 2011 et qu'ayant été radiée du registre du commerce et des sociétés et ayant perdu sa personnalité juridique, la société Banque Populaire Grand Ouest a acquis la qualité de partie à l'instance sans qu'une régularisation soit nécessaire de sorte que l'assignation en intervention forcée délivrée le 4 septembre 2020 par la société Banque Populaire Grand Ouest est régulière ; qu'en se déterminant ainsi, par un moyen relevé d'office, sans avoir invité les parties à formuler leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que les époux [E] avaient fait valoir, que la banque ne versait aux débats aucune lettre d'information annuelle de la caution depuis 2008, année de leur engagement de caution, que, faute d'avoir satisfait à son obligation légale, elle était déchue du droit aux intérêts contractuels, et que les pièces versées étant insuffisantes pour calculer les sommes restant dues après imputation prioritaire des sommes versées par le débiteur sur le capital, elle devrait produire un décompte actualisé tenant compte de la déchéance et de l'imputation prioritaire sur le capital des paiements intervenus outre l'historique financier du prêt et qu'à défaut, elle ne justifiait pas de sa créance ; que, pour condamner les époux [E] au paiement de la somme de 54 357,76 euros en exécution de leur engagement de caution, l'arrêt attaqué retient que la banque n'a pas mentionné dans sa déclaration de créance le paiement d'intérêts ou de pénalités de retard de sorte que la demande de déchéance du droit à ces intérêts ou pénalités est sans objet ; qu'en se déterminant ainsi, par un moyen relevé d'office, sans avoir invité les parties à formuler leurs observations, la cour d'appel a encore violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ que le juge ne doit pas méconnaître les termes du litige ; que les époux [E] avaient fait valoir que, faute d'avoir satisfait à son obligation légale d'information annuelle de la caution, la banque était déchue du droit aux intérêts contractuels et que les pièces versées étant insuffisantes pour calculer les sommes restant dues après imputation prioritaire des sommes versées par le débiteur sur le capital, elle devrait produire un décompte actualisé tenant compte de la déchéance et de l'imputation prioritaire sur le capital des paiements intervenus outre l'historique financier du prêt et qu'à défaut, elle ne justifiait pas de sa créance ; qu'en retenant que la banque n'avait pas mentionné dans sa déclaration de créance le paiement d'intérêts ou de pénalités de retard de sorte que la demande de déchéance du droit à ces intérêts ou pénalités était sans objet cependant les époux [E] demandaient la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et pas aux intérêts de retard, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en condamnant les époux [E] à payer la somme de 54 357,76 euros en exécution de leur engagement de caution, au motif notamment que la créance déclarée par la banque ne comportait pas d'intérêts ou de pénalités de retard, sans répondre aux conclusions soutenant que la banque ayant manqué à son obligation annuelle d'information des cautions, elle encourait la déchéance du droit aux intérêts contractuels, mentionnés dans la déclaration de créance de la banque, de sorte que les "règles" effectués par le débiteur devaient être imputés sur le montant du prêt garanti, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

14. En premier lieu, dès lors que les cautions invoquaient les effets de la fusion-absorption du Crédit maritime avec la Banque populaire Grand Ouest et que cette dernière soutenait venir aux droits du premier, la cour d'appel a, en application de l'article 12 du code de procédure civile, sans relever aucun moyen d'office, tranché le litige conformément aux règles de droit qui lui étaient applicables, en retenant qu'il résulte de l'article L. 236-3 du code de commerce qu'en sa qualité d'ayant cause universel de la société absorbée, la société absorbante acquiert de plein droit, à la date d'effet de la fusion, la qualité de partie aux instances antérieurement engagées par la société absorbée, que la société absorbante, unique associé de la société absorbée, acquiert la qualité de partie à la procédure à l'issue du délai de trente jours suivant la publication de la dissolution laissé aux créanciers pour former opposition à la dissolution de la société conformément à l'article 1844-5 du code civil et que la société Banque Populaire Grand Ouest avait ainsi de plein droit acquis la qualité de partie à l'instance sans qu'une régularisation ne soit nécessaire.

15. En second lieu, M. et Mme [E] sont sans intérêt à invoquer un manquement de la banque à ses obligations d'information, dès lors que l'article L. 341-6 du code de la consommation, alors applicable, ne prévoit aucune règle d'imputation des paiements dérogatoire au droit commun et que le montant de la créance tel qu'il ressort de la déclaration de créance effectuée par la banque ne porte que sur le principal du prêt cautionné.

16. Inopérant en ses trois dernières banches, le moyen est donc mal fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Banque Populaire Grand Ouest aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Banque populaire Grand Ouest et la condamne à payer à M. et Mme [E] la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé en l'audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt-cinq et signé par M. Ponsot, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de M. Vigneau président, empêché, le conseiller rapporteur et M. Doyen, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 23-15.764
Date de la décision : 22/01/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes 02


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na, 22 jan. 2025, pourvoi n°23-15.764


Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.15.764
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