N° P 23-85.595 F-D
N° 00046
ODVS
21 JANVIER 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 JANVIER 2025
MM. [K] et [E] [L] [Z] [P] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 5 septembre 2023, qui, l'un et l'autre, pour travail dissimulé et le second, en outre, pour escroquerie, les a condamnés chacun à un an d'emprisonnement avec sursis, une interdiction professionnelle, et à une amende de 15 000 euros pour le premier et 10 000 euros pour le second, au paiement desquelles ils ont été déclarés solidairement tenus.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire, commun aux demandeurs, a été produit.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SARL Gury & Maitre, avocat de MM. [K] et [E] [L] [Z] [P], et les conclusions de M. Dureux, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 10 décembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Des contrôles ont été réalisés par les agents de l'Urssaf, les 8 décembre 2016 et 6 avril 2017, sur des chantiers de construction de la société [L] [1], à l'issue desquels ont été constatés des manquements aux règles du code du travail.
3. M. [K] [L] [Z] [P], en tant que gérant de droit de l'entreprise, a été poursuivi des chefs de travail dissimulé, défaut de tenue de comptabilité et abus de biens sociaux.
4. M. [E] [L] [Z] [P], fils du précédent, a été cité à comparaître en sa qualité de gérant de fait, pour les mêmes infractions et, en outre, pour escroquerie.
5. Par jugement en date du 23 janvier 2019, le tribunal correctionnel, après relaxe partielle des deux prévenus pour certains des faits de travail dissimulé poursuivis, les a déclarés coupables des délits susvisés et a prononcé sur les peines.
6. Chacun des prévenus, puis le ministère public, ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et troisième moyens
7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le quatrième moyen
Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit que MM. [K] et [E] [L] [Z] [P] seront tenus solidairement au paiement des amendes prononcées, et ce jusqu'à 10 000 euros en application des dispositions de l'article 480-1, alinéa 2, du code de procédure pénale, alors « que selon l'article 480-1, alinéa 2, du code pénal, rendu applicable à la procédure devant la cour d'appel par l'article 512 dudit code, le tribunal correctionnel peut, par décision spéciale et motivée, ordonner que le prévenu qui s'est entouré de coauteurs ou de complices insolvables sera tenu solidairement des amendes ; qu'en prononçant la solidarité au paiement des amendes prononcées sans statuer par une décision spéciale et motivée et sans constater que chacun des prévenus s'était entouré de coauteurs ou de complices insolvables, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 480-1, alinéa 2, du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 480-1, alinéa 2, du code de procédure pénale :
9. Selon ce texte, le juge qui prononce la solidarité au paiement des amendes entre les prévenus est tenu de le faire par décision spéciale et motivée.
10. En déclarant, sans motiver aucunement, MM. [K] et [E] [L] [Z] [P] tenus solidairement au paiement des amendes prononcées contre eux, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
11. La cassation est encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
12. La cassation à intervenir sera limitée aux seules dispositions relatives à la solidarité au paiement des amendes. Les autres dispositions seront donc maintenues.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Orléans, en date du 5 septembre 2023, mais en ses seules dispositions relatives à la solidarité dans le paiement des amendes, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bourges, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Orléans et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille vingt-cinq.