N° J 24-80.650 F-D
N° 01366
LR
14 NOVEMBRE 2024
CASSATION PAR VOIE DE RETRANCHEMENT SANS RENVOI
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 NOVEMBRE 2024
M. [Z] [Y] [I] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Cayenne, chambre correctionnelle, en date du 4 janvier 2024, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 18 octobre 2023, pourvoi n° 22-86.956), pour violences et vol, aggravés, l'a condamné à sept ans d'emprisonnement, quinze ans d'interdiction de porter une arme soumise à autorisation, une interdiction définitive du territoire français, et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Guerrini, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [Z] [Y] [I], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 9 octobre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Guerrini, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Le Roch, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance du 19 avril 2021, le juge d'instruction a ordonné le renvoi de M. [Z] [Y] [I] devant le tribunal correctionnel, des chefs de vol en réunion dans un entrepôt de marchandises, violences avec arme n'ayant pas entraîné d'incapacité de travail, violences avec arme ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à huit jours et violences avec arme ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, faits commis le 9 novembre 2017.
3. Par jugement du 22 juillet 2021, le tribunal a déclaré le prévenu coupable et l'a condamné à six ans d'emprisonnement et cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation.
4. M. [Y] [I] a relevé appel et le ministère public a formé appel incident.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné le prévenu à la peine de sept ans d'emprisonnement, a prononcé à son encontre la peine d'interdiction de détenir et porter une arme soumise à autorisation pendant une durée de quinze ans, a dit qu'en application des articles L. 312-16 et R. 312-78 du code de la sécurité intérieure, cette sanction ferait l'objet d'une inscription au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes, a prononcé une interdiction définitive du territoire français, et a prononcé son maintien en détention, alors :
« 2°/ que seules peuvent être prononcées les peines légalement applicables, à la date à laquelle est commise l'infraction, lorsqu'elles sont moins sévères que les peines prévues par la loi nouvelle ; qu'en prononçant à l'encontre de M. [Y] [I] une peine complémentaire d'interdiction définitive du territoire français, cependant qu'à la date des faits, soit le 9 novembre 2017, une telle peine ne pouvait être prononcée en répression des infractions dont il a été déclaré coupable, soit le vol aggravé par deux circonstances, les violences avec usage d'une arme ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, les violences avec usage d'une arme ayant entraîné une incapacité totale de travail n'excédant pas huit jours, et les violences avec usage d'une arme sans incapacité, la cour d'appel a violé les articles 112-1, 131-30 et 222-48 du code pénal. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 112-1, et 222-48 du code pénal dans sa version modifiée par la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 applicable à la date des faits :
6. Selon le premier de ces textes, seules peuvent être prononcées les peines applicables à la date de la commission des faits qu'elles répriment.
7. Selon le second, l'interdiction du territoire français peut être prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable de l'une des infractions définies aux articles 222-1 à 222-8 et 222-10, aux 1° et 2° de l'article 222-14, aux articles 222-23 à 222-26, 222-30, 222-34 à 222-39 ainsi qu'à l'article 222-15 dans les cas visés au deuxième alinéa de cet article.
8. Par l'arrêt attaqué, la cour d'appel a condamné le prévenu, déclaré coupable de vol et violences aggravés, à une interdiction définitive du territoire français.
9. En prononçant ainsi, alors qu'à la date de la commission des faits, objet de l'accusation, cette peine n'était pas encourue en répression de ces derniers, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés.
10. La cassation est par conséquent encourue, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre grief invoqué .
Portée et conséquences de la cassation
11. La cassation sera limitée aux dispositions prononçant la peine d'interdiction définitive du territoire français, les autres dispositions seront donc maintenues. Elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE par voie de retranchement l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Cayenne, en date du 4 janvier 2024, mais en ses seules dispositions ayant prononcé une interdiction définitive du territoire français, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Cayenne et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille vingt-quatre.