COUR DE CASSATION
Première présidence
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ORejRad
Pourvoi n° : Z 23-22.286
Demandeur : le cabinet Glacis
Défendeur : M. [F]
Requête n° : 463/24
Ordonnance n° : 90894 du 26 septembre 2024
ORDONNANCE
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ENTRE :
M. [T] [F], ayant la SCP Piwnica et Molinié pour avocat à la Cour de cassation,
ET :
le cabinet Glacis, ayant la SCP Marlange et de La Burgade pour avocat à la Cour de cassation,
Michèle Graff-Daudret, conseiller délégué par le premier président de la Cour de cassation, assistée de Vénusia Ismail, greffier lors des débats du 5 septembre 2024, a rendu l'ordonnance suivante :
Vu la requête du 6 mai 2024 par laquelle M. [T] [F] demande, par application de l'article 1009-1 du code de procédure civile, la radiation du pourvoi formé le 13 novembre 2023 par le cabinet Glacis à l'encontre de l'arrêt rendu le 12 septembre 2023 par la cour d'appel d'Angers, dans l'instance enregistrée sous le numéro Z 23-22.286 ;
Vu les observations développées au soutien de la requête ;
Vu les observations développées en défense à la requête ;
Vu l'avis de Anne-Marie Grivel, avocat général, recueilli lors des débats ;
Par arrêt du 12 septembre 2023, la cour d'appel d'Angers a notamment :
- condamné la société Cabinet Glacis à payer à M. [F] la somme de
2 151 euros à titre d'indemnisation du temps perdu par ses soins afin de satisfaire aux reprises des réserves émises lors de la réception de l'ouvrage ;
- condamné la société Cabinet Glacis à payer à M. [F] la somme de
27 300 euros à titre d'indemnisation du préjudice découlant de l'absence d'assurance de responsabilité décennale couvrant toutes les activités exercées sur le chantier de M. [F] ;
- dit que les sommes allouées à M. [F] porteront intérêt au taux légal à compter du 10 septembre 2019, avec capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, à compter du 3 septembre 2020 ;
- condamné la société Cabinet Glacis à payer à M. [F] la somme de
8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 13 novembre 2023, la société Cabinet Glacis a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.
Par requête du 6 mai 2024, M. [F] a demandé la radiation du pourvoi, sur le fondement de l'article 1009-1 du code de procédure civile, en invoquant l'inexécution de l'arrêt attaqué.
Par observations du 2 août 2024, la société Cabinet Glacis fait valoir que l'exécution de l'arrêt est impossible ou aurait des conséquences manifestement excessives, car sa situation est très précaire, ainsi qu'en attestent ses résultats et son relevé de compte bancaire, qui présente un solde débiteur de 7 313,30 euros au 28 juin 2024. Elle ajoute que cette situation l'a conduite à demander la désignation d'un conciliateur en justice, pour éviter une cessation des paiements, et que le président du tribunal de commerce d'Angers a fait droit à sa demande par ordonnance du 22 juillet 2024. Elle demande de rejeter la requête.
Par observations du 23 août 2024, M. [F] réplique que la société Cabinet Glacis ne rapporte pas la preuve de sa situation obérée, qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements et que pour demander la désignation d'un conciliateur, elle a indiqué que l'exercice 2024 serait meilleur que celui de 2023.
Aux termes de l'article 1009-1 du code de procédure civile, hors les matières où le pourvoi empêche l'exécution de la décision attaquée, le premier président ou son délégué décide, à la demande du défendeur et après avoir recueilli l'avis du procureur général et les observations des parties, la radiation d'une affaire lorsque le demandeur ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée de pourvoi, à moins qu'il ne lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que le demandeur est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.
La société Cabinet Glacis justifie, par la production de ses comptes pour les exercices 2022 et 2023, que ses résultats étaient déficitaires pour ces deux années.
Il résulte, en outre, des pièces versées aux débats qu'au 31 mai 2024, elle présentait un passif exigible très important envers l'Urssaf et l'administration fiscale, d'un montant total de 132 574 euros, sans pour autant disposer d'un actif disponible.
Cette situation l'a conduite à solliciter, le 11 juillet 2024, la désignation d'un conciliateur, au motif que « l'activité était très bonne et rentable jusqu'en 2020 dont l'exercice s'est clos avec un résultat d'exploitation de près de
30 000 €, (mais qu') à compter de 2021, la situation s'est compliquée en raison d'erreurs de recrutement. »
Par ordonnance du 22 juillet 2024, le président du tribunal de commerce d'Angers a accueilli sa demande et désigné un conciliateur pour une durée de quatre mois.
Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la société Cabinet Glacis est dans une situation très précaire, que l'exécution de l'arrêt attaqué ne pourrait qu'aggraver.
Le fait qu'elle ait déclaré, dans sa requête aux fins de désignation d'un conciliateur, ne pas être en état de cessation des paiements depuis plus de 45 jours ou que « son prévisionnel permettait d'envisager un exercice 2024 meilleur et renouant avec la rentabilité » est insuffisant pour écarter les conséquences manifestement excessives qu'entraînerait pour elle l'exécution de l'arrêt, alors que la mission du conciliateur est en cours et porte sur la « recherche d'un accord financier avec les principaux fournisseurs et tout créancier pouvant apporter un intérêt à l'équilibre de l'exploitation du débiteur. »
Dès lors, il n'y a pas lieu de radier l'affaire du rôle de la Cour.
EN CONSÉQUENCE :
La requête en radiation est rejetée.
Fait à Paris, le 26 septembre 2024
Le greffier,
Le conseiller délégué,
Vénusia Ismail
Michèle Graff-Daudret