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12/07/2024 | FRANCE | N°24-16.082

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation de section, 12 juillet 2024, 24-16.082


SOC. / ELECT

JL10



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 juillet 2024




Rejet


M. SOMMER, président



Arrêt n° 953 FS-B

Pourvoi n° B 24-16.082





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 JUILLET 2024

Le Syndicat Di I Travagliadori Corsi - des travailleurs co

rses, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° B 24-16.082 contre le jugement rendu le 24 mai 2024 par le tribunal judiciaire de Paris (pôle social, contentieux de...

SOC. / ELECT

JL10



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 juillet 2024




Rejet


M. SOMMER, président



Arrêt n° 953 FS-B

Pourvoi n° B 24-16.082





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 JUILLET 2024

Le Syndicat Di I Travagliadori Corsi - des travailleurs corses, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° B 24-16.082 contre le jugement rendu le 24 mai 2024 par le tribunal judiciaire de Paris (pôle social, contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :

1°/ à la Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO), dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à la direction générale du travail, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bérard, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat du Syndicat Di I Travagliadori Corsi - des travailleurs corses, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat du syndicat CGT-FO, et l'avis de Mme Roques, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 10 juillet 2024 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Bérard, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, Bouvier, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Ollivier, Arsac, conseillers référendaires, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Paris, 24 mai 2024), a été publiée, le 18 mars 2024, la décision du directeur général du travail du 13 mars 2024, fixant la liste des candidatures des organisations syndicales recevables à participer au scrutin relatif à la mesure de l'audience des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés.

2. La candidature du Syndicat Di I Travagliadori Corsi - des travailleurs corses (le STC) a été retenue parmi les organisations dont la vocation statutaire revêt un caractère national et interprofessionnel.

3. Par requête du 2 avril 2024, la Confédération générale du travail - Force ouvrière (la CGT-FO) a demandé au tribunal judiciaire d'annuler la décision du 13 mars 2024 du directeur général du travail en ce qu'elle déclare recevable la candidature du syndicat STC, de déclarer irrecevable sa candidature et de lui faire interdiction de se porter candidat au scrutin destiné à la mesure de l'audience électorale des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés au niveau national et interprofessionnel et d'ordonner au directeur général du travail de prendre une décision conforme au jugement à intervenir.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche et le second moyen, en ce qu'il fait grief au jugement de rejeter la fin de non-recevoir tirée d'une tardiveté de la requête

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen, en ce qu'il fait grief au jugement de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la CGT-FO, qui est préalable

Enoncé du moyen

5. Le STC fait grief au jugement de rejeter sa fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la CGT-FO, de le déclarer irrecevable à se porter candidat au scrutin destiné à la mesure de l'audience électorale des organisations syndicales auprès des entreprises de moins de onze salariés et d'annuler la décision du directeur général du travail du 13 mars 2024, alors « qu'il s'évince des articles L. 2133-1 et L. 2133-2 du code du travail, que pour être qualifiée d'union de syndicats, une organisation syndicale doit être composée d'au moins deux syndicats professionnels régulièrement constitués ; que pour rejeter la fin de non-recevoir soulevée par le syndicat STC relativement à la qualité à agir de la CGT-FO, le jugement relève que cette dernière justifiait de ses statuts, de la composition de son bureau et du dépôt en mairie de ces éléments et que dotée par conséquent de la personnalité morale, elle était habilitée à ester en justice sans avoir à justifier des syndicats qui la composent qui reviendrait à ajouter une condition à la loi ; qu'en se déterminant ainsi, le tribunal judiciaire a violé les articles L. 2133-1, L. 2133-2 et L. 2133-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. Aux termes de l'article L. 2122-9 du code du travail sont représentatives au niveau national et interprofessionnel les organisations syndicales qui :
1° Satisfont aux critères de l'article L. 2121-1 ;
2° Sont représentatives à la fois dans des branches de l'industrie, de la construction, du commerce et des services ;
3° Ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés résultant de l'addition au niveau national et interprofessionnel des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités sociaux et économiques, quel que soit le nombre de votants, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants ainsi que des suffrages exprimés aux élections des membres représentant les salariés aux chambres départementales d'agriculture dans les conditions prévues à l'article L. 2122-6. La mesure de l'audience s'effectue tous les quatre ans.

7. Par arrêté du 28 juillet 2021 du ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel, dont la légalité n'a pas été contestée, la CGT-FO a été reconnue représentative au niveau national et interprofessionnel.

8. Il en résulte, eu égard au principe de la séparation des pouvoirs, que la qualité d'union de syndicats de la confédération CGT-FO ne peut être contestée devant le juge judiciaire.

9. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié.

Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches

Enoncé du moyen

10. Le STC fait grief au jugement de le déclarer irrecevable à se porter candidat au scrutin destiné à la mesure de l'audience électorale des organisations syndicales auprès des entreprises de moins de onze salariés et d'annuler en conséquence la décision du directeur général du travail du 13 mars 2024, alors :

« 1°/ qu'il résulte de l'article L. 2122-10-6 du code du travail que peuvent être candidates au scrutin permettant de mesurer l'audience des organisations syndicales dans les entreprises de moins de onze salariés, les organisations syndicales de salariés qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines, d'indépendance et de transparence financière, légalement constituées, depuis au moins deux ans et auxquelles les statuts donnent vocation à être présentes dans le champ géographique concerné, ainsi que les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel ; que peuvent être candidates à ce scrutin les organisations syndicales professionnelles, ainsi que les unions et confédérations syndicales, remplissant les conditions prévues à l'article L. 2122-10-6 du code du travail ; que constitue une union de syndicats au sens des articles L. 2133-1 à L. 2133-3 du code du travail, les organisations qui ont statutairement vocation à défendre les intérêts matériels et moraux des syndicats et groupements syndicaux qui y adhèrent ; que le dépôt de la liste du nom et du siège social des syndicats qui composent une union, prévu par l'article L. 2133-2 du code du travail, ne constitue pas une formalité dont l'absence prive, à elle seule, l'union de l'une de ses conditions d'existence et par conséquent de sa capacité à exercer ses prérogatives syndicales, dont celle d'être candidate au scrutin permettant de mesurer l'audience des organisations syndicales dans les entreprises de moins de onze salariés, à compter du jour du dépôt en mairie de ses statuts ; qu'en l'espèce, les statuts du STC, adoptés lors du 12e congrès des 13 et 14 mai 2023 et déposés en mairie d'[Localité 3] le 22 mai 2023, indiquent à l'article I.1. qu'''il est formé entre les adhérents aux présents statuts un syndicat dénommé Sindicatu di i Travagliadori Corsi'', ayant ''pour sigle STC'', qui est ''une union de sections syndicales professionnelles, de secteurs et d'Unions Locales qui sont constitués de salariés, de fonctionnaires et des personnels des trois fonctions publiques, la fonction publique hospitalière, la fonction publique territoriale, la fonction publique d'Etat, de l'Education Nationale, ainsi que des établissement publics et organismes assimilés'' et à l'article II.2. que le STC a pour vocation et mission de défendre les intérêts de ses adhérents ; qu'en retenant, pour le déclarer irrecevable à se porter candidat au scrutin destiné à la mesure de l'audience électorale des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés, que le syndicat STC n'établissait pas être composé de syndicats à défaut de rapporter la preuve que les unions locales, visées à ses statuts, sont dotées de la personnalité civile, le tribunal judiciaire a violé les articles L. 2131-1, L. 2122-10-6, L. 2133-1, L. 2133-2 et L. 2133-3 du code du travail, les articles I.1. et II.1. des statuts du STC, ensemble les articles 3, 5 et 8 de la convention n° 87 de l'organisation internationale du travail sur la liberté syndicale ;

3°/ que c'est à celui qui conteste la candidature d'une organisation syndicale dans les conditions prévues à l'article L. 2122-10-6 du code du travail d'apporter la preuve de sa contestation ; qu'en déclarant irrecevable la candidature du syndicat STC, dont la qualité d'union de syndicats était contestée par le syndicat CGT-FO, au motif qu'il n'établissait pas être composé de syndicats professionnels, le tribunal judiciaire a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

11. Selon l'article L. 2122-10-6 du code du travail, peuvent être candidates au scrutin permettant de mesurer l'audience des organisations syndicales dans les entreprises de moins de onze salariés les organisations syndicales de salariés qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines, d'indépendance et de transparence financière, légalement constituées depuis au moins deux ans et auxquelles les statuts donnent vocation à être présentes dans le champ géographique concerné, ainsi que les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel.

12. La Cour de cassation juge qu'il résulte de la distinction opérée par le code du travail entre les syndicats dits primaires et les unions de syndicats que si les unions de syndicats peuvent être intercatégorielles, les syndicats professionnels primaires doivent respecter dans leurs statuts les prescriptions de l'article L. 2131-2 et ne peuvent dès lors prétendre représenter tous les salariés et tous les secteurs d'activité (Soc., 21 octobre 2020, pourvoi n° 20-18.669, publié au rapport).

13. En application des articles L. 2133-1 et L. 2133-2 du code du travail les unions de syndicats sont composées d'au moins deux syndicats. Elles font connaître le nom et le siège social des syndicats qui la composent.

14. La Cour de cassation juge que le dépôt de la liste du nom et du siège social des syndicats qui composent une union, prévu par l'article L. 2133-2 du code du travail, ne constitue pas une formalité dont l'absence prive, à elle seule, l'union de l'une de ses conditions d'existence et par conséquent de sa capacité à exercer ses prérogatives syndicales (Soc., 28 février 2007, pourvois n° 06-60.150, 06-60.151, Bull. 2007, V, n° 39).

15. Elle juge également qu'en application de l'article L. 2131-3 du code du travail, un syndicat n'a d'existence légale que du jour du dépôt en mairie de ses statuts et du nom des personnes chargées de sa direction et de son administration (Soc., 13 octobre 2010, pourvoi n° 09-14.418, Bull. 2010, V, n° 223 ; Soc., 8 décembre 2016, pourvoi n° 15-16.999, Bull. 2016, V, n° 236).

16. Elle juge encore qu'une section syndicale, dépourvue de personnalité morale, ne peut prétendre à la qualité d'organisation syndicale (Soc., 30 mai 2001, pourvoi n° 00-60.159, Bull. Civ., V, n° 188).

17. Il en résulte que lorsque la qualité d'union de syndicats d'une organisation syndicale est contestée, il appartient à celle-ci, si elle n'a pas mentionné le nom des syndicats adhérents dans ses statuts, ni satisfait à la formalité de dépôt en mairie de la liste du nom et du siège social des syndicats qui la composent, de justifier qu'elle est composée d'au moins deux syndicats.

18. Le jugement retient d'abord que le STC énonce dans ses statuts être une union de sections syndicales professionnelles, de secteurs et d'unions locales qui sont constitués de salariés, de fonctionnaires et des personnels des trois fonctions publiques, la fonction publique hospitalière, la fonction publique territoriale, la fonction publique d'Etat, de l'éducation nationale ainsi que des établissements publics et organismes assimilés, que la section rassemble quatre adhérents au minimum travaillant dans une même entreprise, une même administration, que l'union locale est la réunion des sections par secteur géographique quel que soit leur corps professionnel, privé ou d'Etat, que les sections d'un même secteur économique sont invitées à se regrouper dans une structure technique dite secteur dont l'objet est d'élaborer une stratégie commune et de développer une réflexion d'ensemble susceptible d'aider au développement et à la création des sections dans ledit secteur, que le conseil national est composé de l'ensemble des représentants des sections et que le congrès rassemble les représentants des sections élus proportionnellement au nombre d'adhérents à jour de leurs cotisations.

19. Il constate ensuite que le STC se borne à alléguer qu'il est une union de syndicats sans le démontrer, n'établissant pas que les unions locales et les secteurs évoqués sont dotés de la personnalité civile.

20. Le tribunal en a exactement déduit, sans inverser la charge de la preuve, que, faute de justifier, en produisant leurs statuts déposés en mairie, de l'existence d'au moins deux syndicats affiliés, le STC n'était pas une union de syndicats et ne pouvait en conséquence être candidat au niveau national et interprofessionnel au scrutin permettant de mesurer l'audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés.

21. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation de section
Numéro d'arrêt : 24-16.082
Date de la décision : 12/07/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Paris


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation de section, 12 jui. 2024, pourvoi n°24-16.082, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:24.16.082
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