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03/07/2024 | FRANCE | N°12400394

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 03 juillet 2024, 12400394


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


IJ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 3 juillet 2024








Cassation sans renvoi




Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 394 F-D


Pourvoi n° W 23-14.532








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
______________

___________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 3 JUILLET 2024


Mme [W] [E], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 23-14.532 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2022 par la cour d'appel de Lyon ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

IJ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 juillet 2024

Cassation sans renvoi

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 394 F-D

Pourvoi n° W 23-14.532

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 3 JUILLET 2024

Mme [W] [E], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 23-14.532 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2022 par la cour d'appel de Lyon (2e chambre A), dans le litige l'opposant à M. [P] [F], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Daniel, conseiller référendaire, les observations de Me Isabelle Galy, avocat de Mme [E], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [F], après débats en l'audience publique du 22 mai 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Daniel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 26 janvier 2022), un arrêt du 20 juin 2000 a prononcé le divorce de M. [F] et de Mme [E], mariés sans contrat préalable, et condamné M. [F] à verser à Mme [E] la somme de 100 000 francs (15 245 euros) à titre de prestation compensatoire.

2. Un jugement du 25 novembre 2010, confirmé par un arrêt du 30 janvier 2012, a statué sur divers points de désaccord relatifs à la liquidation du régime matrimonial, dit que la prestation compensatoire, augmentée des intérêts légaux à compter du 20 juin 2000, serait prise en compte dans le partage et renvoyé les parties devant le notaire.

3. Mme [E] a mis en oeuvre des mesures d'exécution forcée aux fins de paiement de la prestation compensatoire, dont un commandement de payer aux fins de saisie-vente, annulé, sur contestation de M. [F], par arrêt du 15 novembre 2018.

4. M. [F] a assigné Mme [E] pour voir trancher diverses nouvelles difficultés liquidatives.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et le second moyen, pris en sa troisième branche

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, qui est irrecevable, et sur le second moyen, pris en sa troisième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Mme [E] fait grief à l'arrêt d'homologuer l'acte contenant état des opérations de comptes, liquidation et partage dressé par notaire le 6 juin 2017, sauf à dire que cet acte devra être rectifié de façon à ajouter, dans son calcul des intérêts au taux légal de la prestation compensatoire encore impayée, la majoration de cinq points conformément aux dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, et ce à compter du 1er janvier 2001 et jusqu'au 25 novembre 2010, date à laquelle plus aucun intérêt ne sera calculé, alors « que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; que, comme l'a jugé la Cour de cassation par son arrêt du 14 octobre 2020 (n° 19-14.084), le jugement du 25 novembre 2010, confirmé par un arrêt du 30 janvier 2012, se bornait à dire dans son dispositif que la prestation compensatoire augmentée des intérêts à compter du 20 juin 2000 serait prise en compte dans le partage, ce qui faisait implicitement référence à la possibilité offerte aux parties d'effectuer une compensation conventionnelle et ne pouvait signifier qu'était ordonnée une compensation ; qu'en retenant, pour dire que le cours des intérêts concernant la prestation compensatoire devait être arrêté à la date du jugement du 25 novembre 2010, que ce jugement a eu pour effet d'arrêter définitivement le principe d'une compensation avec les autres créances dans le cadre du partage et de rendre inexigible la prestation compensatoire, la cour d'appel a violé les articles 1355 et 480 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1355 du code civil et 480 du code de procédure civile :

7. Il résulte de ces textes que l'autorité de la chose jugée par une décision civile n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et qui a été tranché dans son dispositif.

8. Pour arrêter au 25 novembre 2010 le cours des intérêts au taux légal, majoré de cinq points à compter du 1er janvier 2001, devant s'appliquer à la somme due par M. [F] au titre de la prestation compensatoire restée impayée, l'arrêt retient que le jugement du 25 novembre 2010 a eu pour effet d'arrêter définitivement le principe d'une compensation avec les autres créances dans le partage.

9. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que, dans son dispositif, ce jugement, confirmé en cela par l'arrêt du 30 janvier 2012, se bornait à dire que la prestation compensatoire, augmentée des intérêts à compter du 20 juin 2000, serait prise en compte dans le partage, ce qui faisait implicitement référence à la possibilité offerte aux parties d'effectuer une compensation conventionnelle et ne pouvait signifier qu'était ordonnée une compensation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Sur le second moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

10. Mme [E] fait le même grief à l'arrêt, alors « que la faculté ouverte au débiteur de la prestation compensatoire de régler sa dette dans le cadre des opérations de liquidation de la communauté ne retire pas à cette dette son caractère exigible et ne l'empêche donc pas de porter intérêts à compter du jour où ils ont été demandés ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1153-1 du code civil en sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et l'article L. 313-3 du code monétaire et financier. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 260 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, l'article 1153-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et l'article L. 313-3 du code monétaire et financier :

11. Il résulte de ces textes que la prestation compensatoire, comme les intérêts qu'elle produit, sont dus à compter de la date à laquelle la décision prononçant le divorce est devenue irrévocable, le taux de l'intérêt légal majoré étant applicable à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de condamnation a été notifiée.

12. Pour arrêter au 25 novembre 2010 le cours des intérêts au taux légal, majoré de cinq points à compter du 1er janvier 2001, devant s'appliquer à la somme due par M. [F] au titre de la prestation compensatoire restée impayée, l'arrêt retient que le jugement du 25 novembre 2010 a eu pour effet de rendre inexigible la prestation compensatoire et ainsi de stopper le cours de tous les intérêts dus.

13. En statuant ainsi, alors que la faculté donnée au débiteur de la prestation compensatoire de régler sa dette à l'occasion des opérations de liquidation de la communauté ne retire pas à cette dette son caractère exigible, de sorte que celle-ci continuait de porter intérêts au taux majoré, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

14. Mme [E] fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en toute hypothèse, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 15 novembre 2018 a, dans son dispositif, déclaré nul le commandement aux fins de saisie vente délivré le 23 juillet 2015 par Mme [E] et ordonné la mainlevée de cette saisie vente du 31 mai 2016 ; que c'est seulement dans les motifs qu'il a constaté que le principe de la compensation de la prestation compensatoire avec la soulte due par Mme [E] dans le cadre de la liquidation et partage de la communauté était acquis et définitif et que la prestation compensatoire n'était plus exigible ; qu'en retenant, pour dire que le cours des intérêts concernant la prestation compensatoire devait être arrêté au 25 novembre 2010, que l'arrêt du 15 novembre 2018, revêtu de l'autorité de la chose jugée, a définitivement constaté qu'aucune voie d'exécution n'était ouverte pour le recouvrement de la prestation compensatoire ce qui avait pour effet de stopper le cours des intérêts, quand les motifs de cet arrêt n'étaient pas revêtus de l'autorité de la chose jugée, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1355 du code civil et 480 du code de procédure civile :

15. Il résulte de ces textes que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif.

16. Pour arrêter au 25 novembre 2010 le cours des intérêts au taux légal, majoré de cinq points à compter du 1er janvier 2001, devant s'appliquer à la somme due par M. [F] au titre de la prestation compensatoire restée impayée, l'arrêt retient que plus aucune voie d'exécution n'était ouverte pour le recouvrement de la prestation compensatoire, ce qui avait pour effet de stopper le cours de tous les intérêts dus, la somme exigible étant arrêtée au 25 novembre 2010, ainsi que l'avait définitivement constaté l'arrêt du 15 novembre 2018, revêtu de l'autorité de la chose jugée.

17. En statuant ainsi, alors que, dans son dispositif, l'arrêt du 15 novembre 2018 se bornait à déclarer nul et de nul effet un commandement aux fins de saisie vente délivré par Mme [E] et à ordonner la mainlevée de la saisie vente mise en oeuvre aux fins de recouvrement de la prestation compensatoire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

18. Le second moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, ne formulant aucune critique contre les motifs de l'arrêt fondant la décision d'homologuer l'acte contenant état des opérations de comptes, liquidation et partage dressé par notaire le 6 juin 2017, sauf à dire que cet acte devra être rectifié de façon à ajouter, dans son calcul des intérêts au taux légal de la prestation compensatoire encore impayée, la majoration de cinq points conformément aux dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, et ce à compter du 1er janvier 2001, la cassation ne s'étend pas à ces dispositions de l'arrêt qui ne sont pas dans un lien de dépendance avec la disposition de l'arrêt critiquée par ce moyen.

19. La cassation du chef de dispositif arrêtant au 25 novembre 2010 le cours des intérêts au taux légal, majoré de cinq points à compter du 1er janvier 2001 conformément aux dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, devant s'appliquer à la somme due par M. [F] au titre de la prestation compensatoire restée impayée n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt statuant sur les dépens et les frais irrépétibles, justifiés par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.

20. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

21. La cassation prononcée par voie de retranchement n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce que, après avoir confirmé le jugement du 9 novembre 2020 en toutes ses dispositions, y compris en ce qu'il « homologue l'acte contenant état des opérations de comptes, liquidation et partage dressé par notaire le 6 juin 2017, sauf à dire que cet acte devra être rectifié de façon à ajouter, dans son calcul des intérêts au taux légal de la prestation compensatoire encore impayée, la majoration de cinq points conformément aux dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier et ce à compter du 1er janvier 2001 », il ajoute « et jusqu'au 25 novembre 2010, date à laquelle plus aucun intérêt ne sera calculé », l'arrêt rendu le 26 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne M. [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [F] et le condamne à payer à Mme [E] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12400394
Date de la décision : 03/07/2024
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 26 janvier 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 03 jui. 2024, pourvoi n°12400394


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune (président)
Avocat(s) : Me Isabelle Galy, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:12400394
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