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26/06/2024 | FRANCE | N°12400365

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 juin 2024, 12400365


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


IJ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 26 juin 2024








Cassation partielle




Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 365 F-D


Pourvoi n° F 23-12.655








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
__________________

_______




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 2024


1°/ M. [Y] [Z], domicilié [Adresse 23] (Syrie), exerçant sous l'enseigne sociale OFOK Commerce,


2°/ la société Implementos medicos ortopedicos...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

IJ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 juin 2024

Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 365 F-D

Pourvoi n° F 23-12.655

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 2024

1°/ M. [Y] [Z], domicilié [Adresse 23] (Syrie), exerçant sous l'enseigne sociale OFOK Commerce,

2°/ la société Implementos medicos ortopedicos, société de droit mexicain, société anonyme (SA), dont le siège est [Adresse 21] (Mexique),

3°/ Mme [U] [UW], domiciliée [Adresse 5] (Royaume-Uni),

4°/ Mme [RP] [L], épouse [IC], domiciliée [Adresse 2] (Royaume-Uni),

5°/ Mme [V] [KY], domiciliée [Adresse 15] (Royaume-Uni),

6°/ Mme [W] [A], domiciliée [Adresse 10] (Royaume-Uni),

7°/ Mme [T] [S], domiciliée [Adresse 19] (Royaume-Uni),

8°/ Mme [OE] [O], domiciliée [Adresse 16] (Royaume-Uni),

9°/ Mme [P] [E], domiciliée [Adresse 12] (Royaume-Uni),

10°/ Mme [RP] [JE], domiciliée [Adresse 18] (Royaume-Uni),

11°/ Mme [AL] [B], épouse [YJ], domiciliée [Adresse 22] (Royaume-Uni),

12°/ Mme [DH] [NC], domiciliée [Adresse 14] (Royaume-Uni),

13°/ Mme [D] [EE], épouse [ZL], domiciliée [Adresse 11] (Royaume-Uni),

14°/ Mme [MA] [KG], domiciliée [Adresse 1] (Royaume-Uni),

15°/ Mme [X] [OW], domiciliée [Adresse 17] (Royaume-Uni),

16°/ Mme [OE] [C], domiciliée [Adresse 4] (Royaume-Uni),

17°/ Mme [H] [F], domiciliée [Adresse 3] (Royaume-Uni),

18°/ Mme [R] [J], domiciliée [Adresse 7] (Royaume-Uni),

19°/ Mme [I] [GI], domiciliée [Adresse 13] (Royaume-Uni),

20°/ Mme [G] [TU], domiciliée [Adresse 8] (Royaume-Uni),

21°/ Mme [K] [N], domiciliée [Adresse 6] (Royaume-Uni),

22°/ Mme [M] [FG], domiciliée [Adresse 20] (Colombie),

ont formé le pourvoi n° F 23-12.655 contre l'arrêt rendu le 20 mai 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 10), dans le litige les opposant :

1°/ à la société TÜv Rheinland Lga Products Gmbh, dont le siège est [Adresse 24] (Allemagne), société de droit allemand, venant aux droits de TÜV Rheinland Products Safety GmbH, prise en la personne de ses représentaux légaux et domiciliés en cette qualité audit siège,

2°/ à la société TÜv Rheinland France, société par actions simplifiée (SAS), dont le siège est [Adresse 9], prise en la personne de ses représentaux légaux en exercice et domiciliés en cette qualité audit siège,

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, quatre moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [Z], de la société Implementos medicos ortopedicos, de Mmes [UW], [L], [KY], [A], [S], [O], [E], [JE], [B], [NC], [EE], [KG], [OW], [C], [F], [J], [GI], [TU], [N], et Mme [FG], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Tüv Rheinland Lga Products Gmbh, et de la société Tüv Rheinland France, après débats en l'audience publique du 14 mai 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 mai 2021), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 10 octobre 2018, pourvois n° 16-19.430, n° 17-14.401,
n° 15-26.093, n° 15-28.891, n° 15-28.531, n° 15-26.115 et n° 15-26.388), la société Poly implant prothèse (la société PIP), qui fabriquait et commercialisait des implants mammaires, a demandé à la société TÜV Rheinland Product Safety GmbH, devenue la société TÜV Rheinland LGA
Products GmbH (la société TRLP), de procéder à l'évaluation du système de
qualité mis en place pour la conception, la fabrication et le contrôle final, ainsi qu'à l'examen du dossier de conception de ces dispositifs médicaux, en
sa qualité d'organisme notifié par les Etats membres à la Commission européenne et aux autres Etats membres, au sens de la directive 93/42/CEE
du Conseil du 14 juin 1993 relative aux dispositifs médicaux.

2. Une première inspection de certification a été réalisée auprès de la société PIP, suivie d'audits visant à renouveler la première certification. Ainsi, le 22 octobre 1997, la société TRLP a rendu une décision d'approbation du système de qualité de la société PIP, qu'elle a renouvelée les 17 octobre 2002, 15 mars 2004 et 13 décembre 2007. Le 25 février 2004, à la suite de la nouvelle classification des implants mammaires en classe III
de la directive 93/42, la société PIP a soumis la conception du dispositif médical dénommé « implants mammaires pré-remplis de gel de silicone à haute cohésivité (IMGHC)» à la société TRLP, qui a délivré, le 15 mars 2004, un certificat d'examen CE valable jusqu'au 14 mars 2009 et, le 27 mai 2009, saisie d'une nouvelle demande de la société PIP, un second certificat.

3. Ces audits ont été réalisés par ou avec les auditeurs de la société TÜV Rheinland France (la société TRF), également membre du groupe TÜV, en application d'un contrat cadre conclu le 30 avril 1999 avec la société TRLP.

4. A la suite d'une inspection, les 16 et 17 mars 2010, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a constaté que de nombreux implants avaient été fabriqués à partir d'un gel de silicone différent du gel de marque Nusil qui figurait dans le dossier de marquage CE de conformité aux dispositions de la directive. En raison du risque de rupture précoce des implants fabriqués par la société PIP et du caractère inflammatoire du gel utilisé, le ministère de la santé français et différentes autorités sanitaires étrangères ont recommandé aux femmes concernées de faire procéder, à titre préventif, à leur explantation.

5. Le 30 mars 2010, la société PIP a été placée en liquidation judiciaire et, par arrêt du 2 mai 2016, ses dirigeants ont été déclarés coupables des délits de tromperie aggravée et d'escroquerie et condamnés, l'enquête pénale ayant établi que la société PIP avait utilisé ce gel à compter du mois d'octobre 2002.

6. La société Allianz, assureur de la société PIP, a assigné celle-ci en annulation des contrats d'assurance par elle souscrits. Les sociétés GF Electromedics Srl, EMI Importaçao E Distribuiçao Ltda et J & D Medicals, distributeurs d'implants mammaires, sont intervenues volontairement à l'instance pour soutenir que l'assureur devait sa garantie et ont assigné en intervention forcée les sociétés TRLP et TRF en responsabilité et indemnisation.

7. D'autres distributeurs et de nombreuses personnes physiques, porteuses
d'implants de la société PIP, de nationalité française ou étrangère, sont intervenus volontairement à l'instance aux mêmes fins.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen, en ce qu'il est présenté par Mme [GI] et la société Implementos Medicos Ortopedicos

En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable en ce qu'il est présenté par Mme [GI] et qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation en ce qu'il est présenté par la société Implementos Medicos Ortopedicos.

Sur le premier moyen, le deuxième moyen, le troisième moyen, pris en ses première et cinquième branches, et le quatrième moyen

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

9. Mmes [UW], [A], [S], [O], [E], [B], [C], [F], [TU], [N] et [FG] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors « que l'absence de cohérence entre les achats de matière première et la production d'un dispositif médical constitue un indice suggérant que le dispositif est susceptible d'être non conforme aux exigences découlant de la directive 93/42/CEE, et justifiant que l'organisme notifié prenne toutes mesures nécessaires pour s'acquitter de ses obligations ; que dès lors en retenant que les sociétés TRLP et TRF ne pouvaient être tenues de recourir à des visites inopinées qu'à partir du 1er septembre 2006, après avoir constaté que dès 2002 les quantités de gel Nusil achetées et non dissimulées étaient tout à fait insuffisantes à la production des prothèses, qu'elles étaient nulles en 2004 et que le volume des commandes de gel Nusil constituait un indice de nature à retenir l'attention des sociétés TRLP et TRF et à accroître leur devoir de prudence et de vigilance, circonstance qui justifiait à elle seule une obligation de contrôle renforcé et la réalisation de visites inopinées à tout le moins à partir de 2002, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les articles R. 5221 et suivants du code de la santé publique, ensemble les articles 3.2 et 5 de l'annexe II de la directive 93/42/CEE du 14 juin 1993 et l'article 1382, devenu 1340 du code civil ».

Réponse de la Cour

Vu le point 5.1 de l'annexe II des articles R. 665-1 à R. 665-47 du code de
la santé publique et l'article R. 5211-40 du même code, transposant en droit
interne le point 5.1 de l'annexe II de la directive 93/42, successivement applicables en la cause, et l'article 1382, devenu 1240, du code civil :

10. Il résulte de l'arrêt rendu par la CJUE le 16 février 2017, Schmitt (C-219/15), que, en présence d'indices laissant supposer qu'un dispositif médical ne serait pas conforme aux exigences qui découlent de la directive 93/42, un organisme notifié est tenu de procéder au contrôle des dispositifs
médicaux ou des documents du fabricant qui recensent les achats de matières premières ou à des visites inopinées.

11. Pour rejeter les demandes formées par les requérantes contre les sociétés TRLP et TRF, l'arrêt retient que ces sociétés ne pouvaient être tenues de recourir à des visites inopinées des locaux de la société PIP, qui auraient permis de découvrir la fraude, qu'à partir du 1er septembre 2006, de sorte que seules les patientes implantées entre le 1er septembre 2006 et le 6 avril 2010, date du retrait des certificats, peuvent prétendre qu'une exécution diligente des sociétés TRLP et TRF leur aurait permis de se soustraire à l'implantation de prothèses mammaires IMGHC produites par la société PIP.

12. En statuant ainsi, alors qu'elle avait préalablement constaté que, antérieurement au 1er septembre 2006, les volumes de gel Nusil achetés et
non dissimulés dans la comptabilité à laquelle les auditeurs avaient eu accès, ne pouvaient suffire à la production des prothèses et étaient même
nuls en 2004 et que ces volumes constituaient un indice suggérant une non-conformité aux exigences de la directive 93/42, de nature à justifier une
visite inopinée, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il déclare les sociétés TÜV Rheinland Product Safety GmbH, devenue TÜV Rheinland LGA Products GmbH et TÜV Rheinland France responsables in solidum, pour la seule période du 1er septembre 2006 au 6 avril 2010, l'arrêt rendu le 20 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne les sociétés TÜV Rheinland Product Safety GmbH, devenue TÜV
Rheinland LGA Products GmbH et TÜV Rheinland France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12400365
Date de la décision : 26/06/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 mai 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 jui. 2024, pourvoi n°12400365


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune (président)
Avocat(s) : SAS Buk Lament-Robillot, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:12400365
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