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24/04/2024 | FRANCE | N°23-11.824

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation de section, 24 avril 2024, 23-11.824


SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 avril 2024




Cassation partielle


M. SOMMER, président



Arrêt n° 410 FS-B

Pourvoi n° C 23-11.824

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [C].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 8 décembre 2022.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRAN

ÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 AVRIL 2024

M. [O] [C], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 23-11.82...

SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 avril 2024




Cassation partielle


M. SOMMER, président



Arrêt n° 410 FS-B

Pourvoi n° C 23-11.824

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [C].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 8 décembre 2022.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 AVRIL 2024

M. [O] [C], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 23-11.824 contre l'arrêt rendu le 10 mars 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-5), dans le litige l'opposant à la société Adequat 029, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La société Adequat 029 a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [C], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Adequat 029, et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 13 mars 2024 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Rouchayrole, Flores, Mmes Deltort, Le Quellec, conseillers, Mmes Thomas-Davost, Techer, Rodrigues, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 mars 2022), M. [C] a été engagé en qualité de ferrailleur par la société de travail temporaire Adequat intérim 029 et mis à la disposition de la société Lagarrigue par trois contrats de mission des 29 au 31 mars 2017, 31 mars au 7 avril 2017, 8 au 14 avril 2017.

2. Le 7 février 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée et en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail et d'une indemnité de préavis outre congés payés afférents.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident de l'employeur

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen du pourvoi principal du salarié en ce qu'il fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande du salarié en paiement de dommages-intérêts pour licenciement abusif

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait ce grief à l'arrêt, alors « que l'action en requalification de contrats de mission en contrat à durée indéterminée introduite par le salarié contre l'entreprise de travail temporaire se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; que par l'effet de la requalification des contrats de mission, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée irrégulier ; que dès lors, le droit au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement nul, ou dépourvu de cause réelle et sérieuse en conséquence de la rupture du contrat à durée indéterminée ainsi requalifié naît au jour de cette requalification et est soumis à la même prescription que l'action en requalification elle-même ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. [C] a saisi conseil de prud'hommes d'Arles par requête du 7 février 2019 d'une action en requalification en contrat à durée indéterminée des contrats de mission successifs conclus avec la société Adéquat 029, dont le dernier avait expiré le 14 avril 2017 ; que la cour d'appel a accueilli cette action et prononcé la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée à défaut de transmission de ces contrats au salarié dans les délais légaux ; que cependant, elle a déclaré irrecevables les demandes du salarié en paiement d'indemnités de rupture et dommages et intérêts pour licenciement nul en conséquence de cette requalification, aux motifs que "le délai de prescription des demandes de M. [C] qui portent sur la rupture de son contrat de travail a commencé à courir, pour une durée de deux années, à compter du 14 avril 2017, date de rupture. Ce délai, alors en cours, a été interrompu le 24 septembre 2017, pour être transformé en un délai de douze mois qui a commencé à courir à compter de cette date, pour expirer le 24 septembre 2018. L'action ayant été engagée le 7 février 2019, les demandes de M. [C] doivent être déclarées irrecevables comme prescrites" ; qu'en statuant de la sorte quand les demandes de M. [C], consécutives à la requalification et nées au jour de celle-ci, étaient soumises à la même prescription que l'action en requalification elle-même dont elles n'étaient pas divisibles, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ensemble le principe actioni non natae non praescribitur. »

Réponse de la Cour

5. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement de dommages-intérêts en raison d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, fût-elle due à la requalification de contrats de mission en contrat à durée indéterminée, est soumise à la prescription de l'article L. 1471-1 du code du travail se rapportant à la rupture du contrat de travail.

6. Selon l'article L. 1471-1 alinéa 2 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture.

7. Selon l'article 40 II de ladite ordonnance, les dispositions réduisant à douze mois le délai de prescription de l'action portant sur la rupture du contrat de travail s'appliquent aux prescriptions en cours à compter du 23 septembre 2017, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

8. La cour d'appel, après avoir relevé que la relation de travail avait pris fin le 14 avril 2017, en a exactement déduit que, l'action ayant été engagée le 7 février 2019, la demande en paiement de dommages-intérêts du salarié en raison d'un licenciement abusif était irrecevable comme étant prescrite.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen relevé d'office

10. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article L. 3245-1 du code du travail :

11. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents, qui a la nature d'une créance salariale, est soumise à la prescription triennale prévue par l'article L. 3245-1 du code du travail.

12. Aux termes de cet article, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

13. Pour dire que la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents était irrecevable, l'arrêt retient qu'aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. L'arrêt ajoute que ce délai a été réduit à douze mois par l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 s'agissant des actions portant sur la rupture du contrat de travail, que l'article 40 de cette ordonnance dispose que ces nouvelles dispositions s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de publication de la présente ordonnance, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

14. La cour d'appel en a déduit que le délai de prescription des demandes du salarié qui portaient sur la rupture de son contrat de travail avait commencé à courir, pour une durée de deux années, à compter du 14 avril 2017, date de la rupture, que ce délai, alors en cours, avait été interrompu le 24 septembre 2017, pour être transformé en un délai de douze mois qui avait commencé à courir à compter de cette date, pour expirer le 24 septembre 2018 et que l'action ayant été engagée le 7 février 2019, les demandes du salarié devaient être déclarées irrecevables comme prescrites.

15. En statuant ainsi, alors que la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents, à caractère salarial, se prescrit par trois ans et que le délai, qui avait commencé à courir le 14 avril 2017, avait été interrompu par la saisine de la juridiction prud'homale le 7 février 2019 en sorte que la demande n'était pas prescrite, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident,

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne la société Adequat 029 aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Adequat 029 et la condamne à payer à la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation de section
Numéro d'arrêt : 23-11.824
Date de la décision : 24/04/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Analyses

La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement de dommages-intérêts en raison d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, fût-elle due à la requalification de contrats de mission en contrat à durée indéterminée, est soumise à la prescription de l'article L. 1471-1 du code du travail se rapportant à la rupture du contrat de travail

travail temporaire.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix en Provence 7B


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation de section, 24 avr. 2024, pourvoi n°23-11.824, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:23.11.824
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