LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 septembre 2023
Cassation partielle
Mme TAILLANDIER-THOMAS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 805 F-D
Pourvoi n° U 21-24.711
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 SEPTEMBRE 2023
La caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-24.711 contre l'arrêt rendu le 7 octobre 2021 par la cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société [2], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Cassignard, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société [2], et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 juin 2023 où étaient présentes Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cassignard, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller, et Mme Catherine, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 7 octobre 2021), la société [2] (l'employeur) a saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale en inopposabilité de la décision du 6 janvier 2014 de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée (la caisse) de prise en charge, au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles, de l'affection déclarée par l'un de ses salariés.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
2. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer inopposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie déclarée, alors « que la caisse satisfait à son obligation d'information dès lors que le dossier mis à disposition de l'employeur comporte les éléments prévus à l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale, et notamment l'avis du médecin conseil ; que l'avis du médecin conseil, qui n'est soumis à aucun formalisme, est complet dès lors que le médecin conseil a signé le colloque médico-administratif en retenant une orientation vers un accord de prise en charge de la maladie ; qu'il importe peu que le médecin-conseil n'ait pas répondu à la question « conditions médicales réglementaires du tableau remplies ? » et qu'il n'ait pas précisé la nature et la date de réalisation de l'examen complémentaire (IRM) exigé par le tableau n° 57 des maladies professionnelles, de telles mentions n'étant pas requises par les textes; qu'en décidant du contraire pour dire la décision de prise en charge de l'affection inopposable à l'employeur, la cour d'appel qui a ajouté une condition à la loi, a violé les articles R. 441-13 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, le premier dans sa rédaction issue du décret n° 85-1353 du 21 décembre 1985, le second dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicables au litige. »
Réponse de la Cour
Vu les articles R. 441-13 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, et le tableau n° 57A des maladies professionnelles :
3. Selon le deuxième de ces textes, dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné au premier.
4. Pour déclarer inopposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée le 20 septembre 2013, l'arrêt retient qu'il appartient aux juges du fond de vérifier, en cas de contestation, si les pièces du dossier constitué par la caisse ont permis à l'employeur d'être suffisamment informé sur les conditions dans lesquelles la maladie a été objectivée, étant rappelé que les modalités de constat de la maladie, en l'occurrence une objectivation par IRM, sont un élément constitutif de la maladie inscrite au tableau litigieux. Il relève que la réalisation d'une IRM le 30 septembre 2013 est établie par des documents versés aux débats qui ne faisaient pas partie du dossier consultable par l'employeur et que sur le colloque médico-administratif, le médecin conseil répond positivement à la question de savoir si les conditions médicales réglementaires du tableau sont remplies mais le terme IRM n'apparaît pas sur ce document. Il en déduit que le dossier mis à la disposition de l'employeur n'apporte aucune information concrète sur la réalisation effective d'une IRM objectivant la maladie finalement prise en charge, de sorte que c'est à bon droit que l'employeur se prévaut d'un non respect du principe du contradictoire à son égard.
5. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que figurait au dossier mis à la disposition de l'employeur l'avis favorable du médecin conseil de la caisse à la prise en charge de la maladie professionnelle, établissant qu'il considérait remplie la condition médicale du tableau, en ce compris son objectivation par IRM, de sorte que l'employeur avait été en mesure de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rectifie l'erreur matérielle affectant le jugement du tribunal judiciaire de La Roche-sur-Yon concernant la date de la maladie déclarée par M. [O] qui est le 9 septembre 2013 et non le 22 janvier 2013, l'arrêt rendu le 7 octobre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la société [2] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [2] et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé en l'audience publique du sept septembre deux mille vingt-trois par Mme Renault-Malignac, conseiller, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.